En pleine guerre de Sécession, le
colonel Marlowe et son détachement de cavalerie nordiste se lancent dans
un raid de sabotage en territoire ennemi. Durant le voyage, Marlowe
s'oppose régulièrement au médecin militaire. Dans un périple, ils sont
obligés d'emmener avec eux une aristocrate sudiste qui pourrait menacer
le succès de la mission. Un autre antagonisme naît entre Marlowe et la
Sudiste. Après maintes péripéties, ils arrivent à saboter la principale
voie ferrée, à brûler train et coton. Poursuivis par les Sudistes, ils
font tout pour leur échapper...
Les Cavaliers constitue une sorte de chaînon à la fois isolé et pouvant tout à fait s'ajouter à la célèbre trilogie de la cavalerie (Le Massacre de Fort Apache (1948), La Charge héroïque (1949) et Rio Grande
(1950)). Ce qui l'en détache, c'est l'absence de continuité avec un
John Wayne incarnant un tout autre personnage que le Kirby York dont on
suivait la carrière militaire tout au long de la trilogie et surtout la
période qui traite de la Guerre de Sécession. Grand connaisseur du
conflit, Ford aura longtemps caressé le dessein de signer un film
évoquant le sujet et ce n'est qu'en fin de carrière qu'il en aura
l'occasion avec Les Cavaliers.
Malheureusement, un tournage tumultueux (où il fut marqué par la mort
accidentelle de son ami cascadeur et collaborateur de longue date Fred
Kennedy) et un échec commercial en fera un opus peu estimé par Ford et
la critique d'alors. Un constat assez injuste tant le film s'avère un
opus passionnant et à la hauteur de la trilogie de la cavalerie dont il
partage l'humanisme et le regard contrasté sur l'uniforme.
Le
scénario de John Lee Mahin et Martin Rackin transpose les hauts faits du
colonel H. Grierson qui en 1863 mena une brigade derrière les lignes
ennemies, afin de détruire le maximum de matériel et de moyens de
transport et de susciter une diversion aux manœuvres d'envergure du
Général Grant sur d'autres fronts. John Wayne incarne dont le personnage
renommé colonel Marlowe et le début du film nous le montre se faire
confier cette périlleuse mission. La dureté nécessaire à mener à bien
pareil périple transparait immédiatement à travers les attitudes du
personnage, renforcées lors qu'on inclut à son régiment le Major Hank
Kendall (William Holden), médecin militaire qui constitue son exact
contraire. Au pragmatisme militaire rigoureux de Marlowe s'oppose donc
constamment l'humanisme détaché de l'enjeu de Kendall et ce dès les
préparatifs où Marlowe s'arrangerait volontiers d'emmener ses hommes de
confiance quel que soit leurs santé quant Kendall s'y opposera. Une
différence qui se confirmera dès la première anicroche sur le terrain
lorsque Kendall quittera ses blessés pour aider une femme noire à
accoucher, un ralentissement impensable pour Marlowe.
Alors que
l'on s'attend à cette opposition binaire tout au long du récit, le
scénario va s'avérer bien plus subtil. L'ajout forcé de Hannah Hunter
(Constance Towers) à la compagnie va ainsi bouleverser le rapport de
force. Celle-ci incarne au départ une sorte de cliché de la South Belle,
tout à la fois par ses manières précieuses forcées et surtout sa haine
farouche des yankees nordistes. Forcé d'enlever cette teigne toute prête
à les trahir, Marlowe est forcé d'atténuer sa rudesse au contact de
cette présence féminine même s'il lui en fera voir de toutes les
couleurs lors de divers moments comiques. Si Kendall s'amuse de cette
dame encombrante, Marlowe se montrera plus gêné et emprunté face à une
Hannah constamment haine et indignée. Ford tisse ses différences qu'il
illustre d'abord dans des péripéties sans conséquences où le regard des
uns sur les autres sera progressivement changeant, Hannah étant surprise
par l'attitude roublarde et digne à la fois de Marlowe face à deux
déserteurs sudistes.
Dès lors durant des vrais moments de tension les
déchirements n'en seront que plus intenses avec notamment un combat
homérique et sanglant dans la ville de New Station. Les conséquences
dramatiques du carnage marquent tout autant Hannah découvrant les
horreurs de la guerre que Marlowe qui sous la nécessité de la manœuvre
souffre du bain de sang qu'elle a nécessité. C'est un moment poignant où
les personnages échappent à leurs camp respectif, Hannah brisée mais
consciente que les conséquences auraient été tout aussi dramatique en
cas de victoire sudiste et Marlowe ayant le triomphe amer et fendant
l'armure avec une confession touchante.
Ford parvient donc tout
autant à célébrer les valeurs de l'Union que le panache du sud
(l'attitude des soldats sudistes feignant la reddition avant l'arrivée
des troupes à New Station) tout en en dénonçant les travers. L'attitude
obtuse puis digne dans la défaite d'un ancien compagnon d'arme de
Kendall laisse ainsi un sentiment ambigu quant à la fierté sudiste qui
laisse admiratif tout en interrogeant sur son fanatisme. On aura la même
interrogation durant l'attaque des cadets d'une école militaire
sudiste, des enfants envoyés dans une attaque désespérée où l'humanisme
de Marlowe les sauvera en préférant battre en retraite plutôt que de
décimer ces soldats en culottes courtes mais bel et bien armés.
Ford
offre toutes les variantes possibles à ses morceaux de bravoures dont la
mise en scène se plie tout à la fois à l'émotion du moment qu'aux
contingences de la mission en cours. On a ainsi un vrai film d'aventures
où l'on savourera l'habile montée de suspense et une magistrale gestion
de l'espace quand l'instinct et la rigueur de Marlowe qui agence dans
l'urgence ses soldats de manière stratégique alors qu'un ennemi
inattendu déferle lors de la bataille de New Station. A l'inverse une
certaine poésie et une dimension épique nimbe l'assaut des jeunes
cadets, l'avancée des frêles silhouettes étant magistralement filmée par
Ford dans un saisissant plan d'ensemble sur la plaine.
Enfin, le
caractère héroïque peut enfin s'affirmer lors d'un superbe final
désespéré. L'arrivée de la cavalerie initialement prévue au scénario est
annulée avec le décès de Fred Kennedy et Ford offrira une bataille
finale plus modeste (peut-être pas totalement crédible tant nos héros
semble acculé), brutale et où l'humain prend le pas sur le spectaculaire
dans l'expression de l'héroïsme avec un John Wayne fabuleux de charisme
lors de l'ultime assaut. De même cette dernière scène où il traverse au
galop un pont qui explose en arrière-plan est tout simplement
somptueuse de puissance évocatrice.
Wayne est grandiose, viril et
subtilement vulnérable et les échanges avec Constance Towers se font
moins disert au fil de leur compréhension et sentiment mutuel pour
finalement tout faire passer par le regard (la scène où elle le soigne
dans la cabane) même si Marlowe se fend d'un aveux touchant et maladroit
lors des adieux. William Holden apporte l'unité et le détachement
humaniste paisible quand les deux autres protagonistes devront apprendre
à se délester de l'idéologie pour se rapprocher. Une vraie belle
réussite de Ford trop mésestimée.
Sorti en dvd zone 2 français et bluray chez MGM
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