Dans une ville
américaine non identifiée, Luther Brooks, qui vient de décrocher son diplôme de
docteur, tente de soigner deux frères malfrats dans l'hôpital de la prison du
comté. Brooks est le premier médecin afro-américain à être nommé dans cet
établissement. L'un des deux frères meurt ; l'autre accuse immédiatement Brooks
de l'avoir tué, l'injuriant à coup de propos racistes.
No Way Out
participe avec On murmure dans la ville
sorti l’année suivante, à l’expression d’une démarche progressiste pour
Mankiewicz. Si On murmure dans la ville
sera une métaphore du Maccarthysme sévissant alors, No way out aborde la question toujours sensible du racisme. Le
contexte du récit montre justement le constat progressiste d’un jeune homme
noir, Luther Brooks (Sidney Poitier), qui au prix de bien des sacrifices a
obtenu son diplôme de docteur et est apprécié et respecté au sein de l’hôpital
o il officie. La scène d’ouverture montre d’ailleurs le cocon que constitue cet
espace de l’hôpital lors de l’arrivée de Luther où il salue amicalement tous le
personnel pour l’essentiel blanc qui lui répond chaleureusement en retour. Il
est membre à part entière de ce lieu où la compétence surmonte toute notion de
race, mais va se confronter à travers de dangereux malades à la haine aveugle
du monde extérieur.
Le criminel Ray Biddle (Richard Widmark) est un bloc de
haine qui vomit Luther pour sa couleur, mais surtout qu’il ait réussit à
atteindre ce statut malgré sa couleur alors que lui est resté dans sa fange. Au
premier abord outrancière, la remarquable prestation de Richard Widmark laisse
deviner ce mélange de haine et de jalousie qui trahit finalement une profonde
détresse. Ce refus d’autopsie pour prouver la fiabilité du diagnostic de Brooks
ne révèle pas un doute des institutions, mais une peur et une confirmation une
ce « nègre » le surpasse en tout point. Sidney Poitier est excellent
également pour subtilement évoquer cette aspiration vertueuse, ce sacerdoce
mise à mal par le manque de confiance du personnage et ébranlée par l’aveuglement
raciste de ses patients blancs (le moment où la mère d’un malade lui crache à
la figure est particulièrement intense).
Le personnage du Docteur Wharton (Stephen McNally) préfigure
un peu la malice en moins le Cary Grant de On
murmure dans la ville, tout en bienveillance. Mais c’est définitivement
avec les tempéraments vacillants que la direction d’acteur de Mankiewicz
brille, notamment Linda Darnell, démonstration d’un conditionnement de classe
et de lieu qui peut être transcendé. Son cheminement est le plus captivant du
récit. Un des aspects intéressants et peu vu jusque-là dans le cinéma
hollywoodien, c’est la dimension de poudrière raciale et urbaine régissant la
société américaine.
Les expéditions punitives tragiques des blancs sont
évoquées, ainsi que la rancœur des noirs qui désormais anticipent et se
rebiffent face à l’agression lors d’une scène de simili guérilla urbaine où
Mankiewicz. C’est haine des blanc est montrée dans toute sa nature grossière,
stupide et outrancière alors que celle vengeresse des noirs les voit filmés
dans l’ombre, spectres nocturnes réclamant justice. La montée en puissance de
ces moments intéresse plus Mankiewicz que l’affrontement en lui-même qui passe
par une ellipse. La violence du groupe n’a certes pas les mêmes raisons ni le
même visage, mais s’avère tout aussi vaine dans les deux cas.
La confrontation finale entre Richard Widmark, Sidney
Poitier et Darnell est bien plus subtile. Le plus enragé révèle sa faiblesse,
le plus légitime à cette haine la surmonte pour retrouver la hauteur
bienveillante de sa vocation, et la plus tiraillée choisis enfin le camp de l’espoir
et de la bonté. Mankiewicz inscrit cela dans un pur moment de suspense où
cependant le passage de l’ombre à la lumière fige les personnages dans leurs
certitudes comme leurs failles. Une œuvre remarquable et malheureusement encore
bien d’actualité dans les Etats-Unis d’aujourd’hui.
Sorti en dvd zone 2 français chez Fox
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