Dans la Vienne
d'après-guerre, découpée en quatre zones d'occupation, et sous la férule du
Docteur Falke, le meneur de jeu, les amours de Rosalinda Eisenstein, partagée
entre le capitaine américain Alfred et son mari. Bal masqué, champagne et
quiproquos...
Oh Rosalinda !
est l’œuvre qui entame la fin des Archers et donc de l’association entre
Michael Powell et Emeric Pressburger. Deux derniers films suivront avec La Bataille du Rio de la Plata (1956) et
Intelligence Service (1956), des œuvres
qui se tiennent dans la maîtrise et le savoir-faire mais dont le génie d’antan
est absent. C’est un constat que l’on peut malheureusement déjà faire aussi
pour Oh Rosalinda ! malgré l’attente
immense qui suscite le fait de voir le duo redonner dans le film musical après
les chefs d’œuvres Les Chaussons Rouges
(1948) et Les Contes d’Hoffman
(1951). Le film adapte Die
Fledermaus (La Chauve-Souris),
opérette viennoise composée par Johann Strauss en 1874. Cette dernière était
déjà une adaptation d’une pièce autrichienne de 1851 intitulée Das Gefängnis (La Prison).
Le scénario est très fidèle au matériau d’origine qu’il
transpose cependant dans un cadre contemporain où les prétendants de Rosalinda
(Ludmilla Tcherina) représentent également quatre forces politiques d’alors se
partageant la ville de Vienne. Le mari de Rosalinda est donc le français Eisenstein
(Michael Redgrave), on croisera un ancien amant américain avec le Capitaine
Westerman (Mel Ferrer), mais aussi l’anglais Major Frank (Dennis Price) et
enfin le général russe Orlovski (Anthony Quayle). Eisenstein est condamné à 5
jours de prison pour outrage à un fonctionnaire, ce qui laissera le champ libre
à tous les autres pour tenter leur chance avec Rosalinda. Eisenstein avant de
purger sa peine s’éclipse pour se rendre à un bal costumé peuplé de belles
jeunes femmes, manipulé qu’il est par le sournois Docteur Falke (Anton
Walbrook). On voit donc bien venir une intrigue légère, riche en rebondissement
et quiproquos divers.
Avec Les Chaussons
Rouges, Powell et Pressburger avaient pour ambition d’étendre l’espace
scénique avec les moyens du cinéma pour en faire un véritable prolongement
mental des pensées de son héroïne Moira Shearer, mais également un
environnement onirique permettant de déployer pleinement la trame du conte d’Andersen.
Les Contes d’Hoffman cherchait au
contraire à retranscrire dans le ton l’emphase dramatique de l’opéra, mais
également dans la forme par ses cadrages hiératique figurant la position du
spectateur de théâtre, ainsi que par des idées poétiques reproduisant au cinéma
les habituelles conventions scéniques trahissant la facticité des décors. Oh Rosalinda ! semble être dans
cette continuité en cherchant à retraduire visuellement la tonalité guillerette
de l’opérette.
Le jeu outrancier des acteurs est dans cet esprit, et tout le jeu
de mensonge et de faux-semblant passe par l’artificialité assumée des
environnements conçus par Hein Heckroth (déjà à la direction artistique sur Les Contes d’Hoffman et en partie pour Les Chaussons Rouges). Le problème est
que le ton léger ne semble pas appeler à l’émerveillement et à la sidération
des deux précédents films et que l’on ne retient que le « faux » de
chaque décor ou arrière-plan sans être particulièrement frappé par la beauté
(ou même la laideur si c’était le parti-pris) de ce que l’on voit. On observe
juste des acteurs s’agiter et cabotiner dans un environnement toc que ne
transcende pas une mise en scène statique sortie de quelques idées amusantes
(la bibliothèque peinte d’Orlovski) et quelques compositions de plans somptueuses
comme l’arrivée de Rosalinda au bal masqué (et un travail inventif sur les
caches et matte-painting).
L’apport du langage cinématographique faisait des films
précédents de vraies portes d’entrées (en particulier Les Contes d’Hoffman) à l’art musical scénique, son absence ou du
moins sa pauvreté dans Oh Rosalinda !
ferait plutôt office de repoussoir. On se désintéresse vite de ce marivaudage
hystérique, les fulgurances formelles manquent et les chansons (réarrangées par
L’Orchestre symphonique de Vienne et aux paroles réécrites par Dennis Arundell,
tous le casting étant bien sûr doublé lors des scènes de chant) sont monotones
et peu mémorables dans leur interprétation pour le néophyte. On s’ennuie donc beaucoup
malheureusement et voici donc la preuve que Powell et Pressburger étaient bien
humains après tout et capables eux aussi parfois de rater un film.
Sorti en bluray anglais chez Network et doté de sous-titres anglais
Sorti en bluray anglais chez Network et doté de sous-titres anglais
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