Des inspecteurs américains traquent des trafiquants de drogue qui s’approvisionnent en fleurs de pavot en Iran. Grâce aux autorités iraniennes, ils procèdent au marquage radioactif d'une cargaison afin qu’elle les mène aux responsables du réseau. C’est en Italie que les inspecteurs retrouvent la piste du convoi…A première vue, rien ne semble distinguer cet
Opération Opium de la vague de films d‘espionnage pop (et auquel le Coin du cinéphile se pencha en son temps) produits dans le sillage des James Bond : belles jeunes femmes courtes vêtues, décors luxueux, contrées exotiques et atmosphères colorées. Se suivant avec plaisir et sans ennui, le film est un honnête divertissement désuet, typique de son époque, mais guère inoubliable. L’intérêt est ailleurs et la vision s’avère bien plus excitante quand on connaît la nature étonnante de son processus de production.
Opération Opium a en effet la particularité d’être le seul film de cinéma produit par l’ONU. Comme nous l’explique judicieusement l’excellent module en bonus, le film naît de la volonté d’un responsable de l’ONU de montrer de manière pédagogique à travers des fictions les différentes missions remplies par l’organisation. Originellement destiné à la télévision pour laquelle trois téléfilms seront réalisés (dont un par Mankiewicz en personne),
Opération Opium aura l’insigne honneur de sortir en salle par la volonté de son réalisateur Terence Young, qui va mettre tous les atouts de son côtés. Young est surtout connu pour avoir mis en scène trois des premières et meilleures aventures de James Bond,
Dr No,
Bons baisers de Russie et plus tard
Opération Tonnerre.
C’est précisément le créateur de James Bond, Ian Fleming, qui lui donne le sujet idéal en s’inspirant du motif d’un de ses livres, où des policiers rendaient radioactifs des diamants afin de remonter la filière d’un réseau de trafiquants. Young remplace les diamants par l’opium pour traiter du travail de l’ONU dans la lutte anti-drogue. Problème : le sujet est finalement trop ambitieux et demande un budget bien plus élevé qu’une simple production télévisée. Qu’à cela ne tienne, le bouche à oreilles des agents les plus influents d’Hollywood parvient à constituer finalement un casting monstrueux venu participer gratuitement au film pour la bonne cause. Défilent donc sous nos yeux pour des rôles plus ou moins consistants Omar Sharif, Trevor Howard, Angie Dickinson, Yul Brynner, Marcello Mastroianni, Eli Wallach et bien d’autres.
Une fois ses données connues, le regard aguerri distingue progressivement divers éléments qui dénotent de la production d’espionnage standard. Terence Young oblige, les éléments
bondiens sont omniprésents entre le générique façon Maurice Binder, l’élégance et le luxe ambiant ainsi qu’une nerveuse bagarre dans un train lorgnant sur celle mythique entre Bond et Red Grant dans
Bons Baisers de Russie. Sous cette futilité se dévoile une touche de gravité inhabituelle trahissant les attentes de son commanditaire prestigieux.
On n'est ainsi pas loin du film de propagande didactique lorsque la caméra s’attarde longuement sur ces junkies, un échange absolument pas naturel entre les héros nous donnant les chiffres de l’escalade de la toxicomanie aux Etats-Unis. La construction du film surprend également en sacrifiant violemment son héros au deux tiers de l’intrigue de manière inattendue, ornant l’ensemble d’un voile de noirceur qui l’éloigne du divertissement léger apparent.
Sorti en dvd zone 2 franais chez Carlotta
Terence Young a toujours été abonné au Kitsch ...voir le singulier Soleil Rouge.
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