Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
A la fin des années 1950, au Nouveau-Mexique.
Une jeune demoiselle du téléphone, Fay et un animateur radio, Everett
découvrent une étrange fréquence comportant des appels interrompus et
anonymes et des signaux sonores conduisent Fay et Everett à résoudre
l'énigme...
The Vast of Night est un remarquable
premier film dont le réalisateur revisite brillamment l'imaginaire SF
américain classique. On craint lors du générique façon The Twilight Zone
le film de petit malin trop référencé mais Andrew Patterson trouve
l'équilibre idéal pour captiver le spectateur. La trame est connue mais
l'écrin et le ton amènent une vraie fraîcheur au sujet. Nous suivons
deux jeunes gens, Fay (Sierra McCormick) et Everett (Jake Horowitz), qui
sont passionné de sons et d'innovations technologique de par leur
activité d'opératrice téléphonique et animateur radio. Un soir où toute
la ville désertée à l'occasion d'un match de basket, des sons mystérieux
envahissent les ondes radios et téléphoniques et titillent ainsi la
curiosité de nos deux héros. Les indices progressivement réunis
indiquent qu'il s'agirait peut-être d'une présence extraterrestre...
La mise en scène de Patterson joue constamment sur plusieurs niveaux de
lecture. Il y a quelques tics méta qui voient lors de certaines
séquences un cadre 4/3 se substituer au format cinémascope pour figurer
un écran de télévision et ainsi nous faire l'effet de justement regarder
un programme à la Twilight Zone. A
d'autres moments il convoque les racines de cet imaginaire SF lors de la
brillante séquence où un auditeur vient narrer son expérience de ces
bruits étranges à Everett. On retrouve à la fois le sensationnalisme à
la Orson Welles dans la manière qu'a Everett de "teaser" son auditeur à
l'antenne, mais aussi l'intimité de ces libre-antennes nocturnes où les
confidences se font.
Patterson isole totalement cet instant d'un fondu
au noir où l'on entend plus que les voix des interlocuteurs, et cela
crée un sentiment intermédiaire où le mystère grandit mais qui ramène
également à l'expérience enfantine que l'on aurait potentiellement à
l'époque en écoutant sous sa couette ce type d'émission
sensationnaliste. Tout le film joue sur ce tableau, notamment quand Fay
et Everett iront rencontrer une vieillarde solitaire qui semble en
savoir long également. Là le mode narration, la manière d'évoquer les
extraterrestres comme une entité indicible qui a toujours observé les
humains lorgne sur Lovecraft notamment dans cette façon de créer un
moment suspendu au récit d'un interlocuteur. Patterson là aussi amène
une touche formelle qui rend fascinante une scène de dialogue par
l'atmosphère étrange qui guide le monologue, la photo clair-obscur
bleutée qui donne des contours inquiétant au visage de Gail Cronauer.
Les longs plans-séquences du début accompagnant les échanges enjoués
entre Fay et Everett semblent initialement gratuit, mais dressent en
fait la topographie des courtes proportions de la ville que nous
arpenterons de long en large au fil des découvertes. C'est assez
brillant et contribue une nouvelle fois à poser une ambiance très
particulière qui dilate ou accélère le temps dans cette nuit étrange,
notamment lorsqu'une attente de dix minutes est comblée par un mouvement
de caméra entre le standard téléphonique et la station radio. Les deux
personnages sont très attachants et sous l'urgence du récit révèlent
leur attachement, et la façon dont ils cherchent à tromper l'ennui de
cette vie provinciale (l'arrogance et le sensationnalisme radio
d'Everett) ainsi que le déterminisme social (Fay dont on ressent toute
l'intelligence et la curiosité mais qui n'envisage pas l'université faut
de moyens).
Après nous avoir ainsi envouté par la seule force de sa
mise en scène malgré l'économie de moyen, Patterson ose enfin le grand
moment de révélation lorgnant sur Rencontre du Troisième Type
de Steven Spielberg (1977). Contrairement à la spectaculaire symphonie
son et lumière de ce dernier, ce contact se fait dans une sidération
silencieuse et poétique (le final du Monsters
(2010) de Gareth Edwards n'est pas loin non plus dans cette idée de
gigantisme intimiste) où "l'autre" se révèle en fond de cadre avant de
dominer de toute sa majesté ce décorum isolé. Une très belle réussite
qui rend vraiment curieux des futurs travaux du réalisateur qui a
financé seul son film en tournant des publicités.
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