L’Amérique des années
60. Autrefois champion de sport de son lycée, Seymour Levov, dit « le Suédois
», est devenu un riche homme d’affaires marié à Dawn, ancienne reine de beauté.
Mais les bouleversements sociopolitiques de l’époque font bientôt irruption
dans la vie bourgeoise, en apparence idyllique, de Seymour. Lorsque sa fille
adorée, Merry, disparaît après avoir été accusée d’acte terroriste, il part à
sa recherche pour que sa famille soit de nouveau unie. Profondément ébranlé par
ce qu’il découvre, il doit affronter le chaos qui secoue la société américaine
et jette les bases d’un nouveau monde. La vie de famille ne sera plus jamais la
même…
Des jeunes gens se réfugiant dans un activisme/ idéologie extrême
nourrissant autant leur mal-être que le rejet de la société de leurs parents…
C’est un schéma qui alimente une triste actualité récente mais qui n’est
finalement pas nouveau, des chiens fous des Brigades Rouges dans
l’Italie des Années de Plomb à la Bande à Baader allemande durant la même
période. Ce contraste n’aura jamais été aussi fort qu’entre l’Amérique
idéalisée des années 50 et celle des soubresauts politique de la décennie
suivante, l’assassinat de JFK marquant la fin du rêve. American Pastoral est l‘adaptation du roman éponyme de Philip Roth
et constitue dans son œuvre le premier volet d’une trilogie où il s’interroge
sur l’identité américaine avec J'ai
épousé un communiste puis La Tache.
C’était sans doute un projet trop ambitieux pour un premier film et Ewan McGregor
en tire une transposition manquant singulièrement de nuances.
Le récit oppose l’adhésion et la profonde idéalisation au
Rêve Américain entre l’homme d’affaire Seymour Levov (Ewan McGregor) et sa
fille Merry (Dakota Fanning) basculant dans l’activisme politique violent. La
relation père/fille à l’amour inconditionnel faite d’incompréhension est ce
qu’il y a de plus réussit et touchant dans le film, porté par l’interprétation
sensible de McGregor et celle tour à tour fébrile et hébétée de Dakota Fanning.
C’est plutôt dans la description du contexte socio-politique de leur rupture
que le film échoue. Ce sera d’abord dans l’aspect fidèle mais finalement
pauvrement illustratif de cette bascule des époques. Les flashbacks du roman
entouraient « le suédois » d’une aura quasi mythique, en faisant une
icône idéalisée pour tous les jeunes fils d’émigrants juifs se rêvant tous un
avenir aussi doré que ce modèle à suivre. McGregor est la fois trop fidèle et
pas assez audacieux pour retranscrire cette idée.
Toutes ces évocations du
passé ne trouve pas d’imagerie suffisamment puissante et/ou nostalgique pour se
résumer à la vision d’une photo ou un simple dialogue en voix-off. Il en va de
même pour voir la manifestation du rêve américain dans l’existence de Levov, marié
à une ancienne reine de beauté (Jennifer Connelly) et vivant dans un cadre
fermier bourgeois somptueux. L’esthétique tapageuse à la Norman Rockwell
attendue pour contraster avec la noirceur à venir s’avère donc assez quelconque.
La jeune Merry, en confrontant ses propres limites (à travers son bégaiements)
à ses modèles écrasant de perfection découvre et se passionne aussi aux maux
d’un monde loin du paradis qui l’entoure : Guerre du Vietnam, Mouvement
des droits civiques des noirs-américains… Mais son propre déséquilibre et
mal-être l’amène à exprimer tragiquement ses engagements, jusqu’au point de
non-retour du terrorisme.
L’environnement agité des 60’s souffre de cette même
illustration sans relief où l’on ne sent jamais la force de ce monde changeant
malgré la reconstitution impeccable. La fidélité littérale à Philip Roth
dessert également le film en ajoutant les scènes au présent de la réunion au
lycée qui ne se justifiait qu’à l’écrit avec la présence de son personnage
récurrent Nathan Zuckerman. Le film dénué de cette continuité littéraire tacite
rend toutes les parties du présent lourdement explicatives et empêche une
construction qui aurait gagnée à s’émanciper pour paradoxalement mieux servir
le propos de Philip Roth. Heureusement Ewan McGregor retrouve une vraie force
mélodramatique dès qu'il donne dans l’intimisme et plus précisément la direction
d’acteur.
Le réel et justifié engagement politique masque ainsi la haine
aveugle de l’idéal bourgeois que représente le Suédois (les confrontations
éprouvantes avec l’activiste hargneuse jouée Valorie Curry) où son rejet par
pur fragilité psychique (l’ultime entrevue avec Merry où on comprend que
n’importe quel dogme aurait pu la faire vaciller). Et dans tout cela le drame
qui consumera un père aimant, incrédule et impuissant en voyant sa fille
sombrer. Malheureusement, même cet élément vraiment réussi du film sera un peu
édulcoré par une conclusion qui contredit le désespoir plus total du livre. Un
premier film pas inintéressant mais qui confirme les difficultés à adapter
Philip Roth – se souvenir du maladroit La Couleur du mensonge (2003) de Robert
Benton adaptant La Tâche.
En salle
Dommage que le film ne remplisse pas ses promesses, je me rattraperai avec le roman. J'en profite pour te souhaiter une excellente fin d'année !
RépondreSupprimerOui le film n'est pas dénué d'intérêt mais le roman est bien plus fort je recommande ! Merci et très bonnes fête de finn d'année à toi aussi ;-)
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