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mardi 26 novembre 2013

Passeport pour Pimlico - Passport to Pimlico, Henry Cornelius (1949)

A Pimlico, un quartier de Londres, l'explosion d'une bombe, dernier vestige de la guerre, met à jour un trésor du XVe siècle ainsi qu'un édit royal certifiant que Pimlico est la propriété des ducs de Bourgogne. Aucun décret n'ayant annulé depuis cet héritage, les habitants décident de proclamer leur indépendance à l'égard du Royaume-Uni.

Passeport pour Pimlico est une des plus audacieuses productions Ealing de l'époque et témoigne magnifiquement de la capacité du studio se faire un prolongement de la réalité anglaise d'alors dans une tonalité où s'entremêlent la célébration et la critique de cette anglicité. Le pitch audacieux voit Pimlico, un petit quartier de Londres bouleversé par la découverte d'un décret d'Edward IV enterré depuis le XVe siècle en faisant une propriété du Duc de Bourgogne et donc une terre indépendante en pleine Angleterre. Par jeu les habitants vont rapidement défier l'autorité mais seront rapidement dépassé par les enjeux socio-politiques de ce nouveau statut.

Le film arbore un postulat commun à plusieurs productions Ealing, à savoir une petite communauté ligué contre une entité puissante le plus souvent symbolisé par la Grande-Bretagne elle-même. Ce sont les villageois écossais alcoolisés du génial Whisky à gogo (1949), les chansonniers tout aussi avinés de Champagne Charlie (1944) ou encore le village défendant son train à vapeur dans Titfield Thunderbolt (1953), les protagonistes luttant dans ces trois films sur une forme d'autoritarisme de l'état britannique qu'il soit politique ou moral.

Des thèmes cher au scénariste T. E. B. Clarke qui dans Il pleut toujours le dimanche (1947) aura également fait le portrait d'une Angleterre d'après-guerre assez sinistre pour une des productions Ealing les plus sombre. Le film surprend ainsi par ce ton vindicatif faisant sous l'humour du pays une nation sclérosée et autoritaire via l'attitude du gouvernement, mais se moquant aussi dans un sens du côté insulaire et autarcique typiquement anglais par l'attitude fermée des héros quand ils se découvrent malgré eux citoyens bourguignons. Une approche osée qui se rééquilibrera et évitera la froide démonstration par la truculence et l'empathie typique d’Ealing envers ses héros modestes.

Quelques années après la fin de la guerre l'Angleterre est encore un pays sinistré et criblés de dette, les quartiers en ruine (dont celui de Pimlico) venant rappeler le souvenir des difficiles années du Blitz. Une période de privation encore vivace qui explique le sentiment de défi des habitants qui voient là une occasion de s'en sortir mais mettra à jour les dérives du moment avec une foules d'individus louches profitant de cet espace hors la loi pour faire fructifier le marché noir et trafic de bons de rationnement. Derrière la légèreté de l'ensemble vient donc pointer une réalité pas si éloignée encore mais c'est à nouveau la communauté qui sera ici mise en avant pour célébrer l'Angleterre.

Si effectivement le gouvernement est fustigé par son attitude ambiguë (qui les verra affamer et assoiffer Pimlico pour soumettre les dissidents), le peuple ayant survécu par l'entraide et la solidarité est représentée ici par le microcosme des habitants de Pimlico dont l'astuce est louée lors des séquences où il se joue de l'autorité pour assurer leur survie.

Ironiquement, des situations de film de guerre (exactement comme dans Whisky à gogo) sont reprises avec évasion, guet-apens et camouflage pour permettre à nos héros passant sous les barbelés et sortant de nuit de se rationner. Cette solidarité sera même étendue lorsque les denrées arriveront de tout le pays pour aider nos héros. Une habile pirouette scénaristique verra tout de même les rebelles rentrer dans le rang tout en gardant la main, rétablissant intelligemment l'ordre moral cher à Michael Balcon, tatillon patron d’Ealing.

Tout cela ne fonctionnerait par sans un merveilleux casting de monsieur et madame tout le monde attachants à la tête desquels trône le génial Stanley Holloway (ou une tordante Margaret Rutherthord en historienne farfelue). Henry Cornelius qui triomphera plus tard avec la géniale comédie automobile Genevieve (1953) mène l'ensemble à la perfection, autant pour pousser le postulat de départ jusqu'à l'absurde que pour conférer une chaleur et émotion de tous les instants.

Sorti en dvd zone 2 français chez Tamasa

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