Sur le point de quitter Reno pour gagner San Francisco, où l'attend
son riche fiancé, Helen Brent découvre que deux des clients de l'hôtel
où elle est descendue ont été assassinés pendant la nuit. Elle choisit
de se taire pour protéger sa réputation et conserver la considération de
son fiancé. Dans le train qui la conduit en Californie, elle fait la
connaissance de Sam Wilde, un homme étrange et brutal, qui la séduit
malgré elle. Helen, qui ne veut pas renoncer à son mariage, accepte
néanmoins de revoir Sam. Après avoir fait la connaissance de la famille
de la jeune femme, celui-ci séduit Georgia, la demi-sœur d'Helen...
Born to kill
se situe dans la première période de Robert Wise où au sein de la RKO
il enchaîne les réussites à l'économie et dans tous les registres, du
film fantastique La Malédiction des hommes-chats (1943) au drame en costume (Mademoiselle Fifi (1944) ou le western Ciel Rouge (1948) et dont le sommet sera Nous avons gagné ce soir (1949), classique du film noir qui conclut cet phase. Né pour tuer
est donc un objet singulier, définitivement délesté de "l'héroïsme"
relatif ou prononcé des criminels dans les polars et film de gangsters
des années 30 pour nous montrer des psychopathes en puissance auxquels
il est impossible de s'identifier. Sam Wilde (Lawrence Tierney) est de
ceux-là, homme taciturne, séduisant et brutal qui s'illustre dans une
mémorable introduction. Furieux de voir sa petite amie sortir avec un
autre, il s'introduit chez elle et la tue avec une violence froide ainsi
que son rival. En fuite vers San Francisco il fait la rencontre de la
fraîchement divorcée Helen Brent (Clair Trevor) dans laquelle il semble
trouver son égal au féminin.
La mise en scène de Robert Wise,
entre élégance et crudité s'adapte ainsi au mélange de séduction et de
férocité qui caractérise son personnage principal. Le meurtre initial
choque ainsi par son filmage heurté tandis que les plans macabres et
stylisés s’illustrent lorsqu’Helen découvrira les cadavres dans la
maison, en particulier celui laissant deviner le corps inanimé de la
jeune femme dans la pénombre. C'est aussi dans cette dualité que se
développent les enjeux du récit. Sam Wilde par sa virilité marquée et le
danger qu'il émane offre un attrait différent aux protagonistes
féminins. L'oie blanche et richissime Georgia (Audrey Long) est sous le
charme sans voir l'attirance intéressée de Sam qui y voit l'occasion de
s'élever. Helen voit plus clair dans son jeu mais malheureusement ne se
reconnaît que trop en lui puisqu'elle aussi nourrit une même frustration
et ambition.
La face noire de Sam est donc aussi séduisante que
repoussante, Claire Trevor exprimant bien ce désir coupable à travers
les étreintes intense partagée avec Lawrence Tierney. Ce dernier,
carrure épaisse, visage fermé taillé en lame de couteau et voix de
stentor est sacrément intimidant et imprévisible. La moindre
contrariété, le plus infime doute sur l'autre semblent prêts à réveiller
la bête en lui par cette personnalité écorchée et paranoïaque.
Il est
dommage que l'intrigue soit par moment assez poussive notamment avec
l'enquête du détective privé joué par Walter Slezak (qui amène certes un
contrepoint plus léger avec ce personnage facétieux) mais dès qu'il
s'agit d'instaurer la tension et de zébrer l'ensemble d'éclairs de
violence saisissants, Robert Wise excelle. La tentative de meurtre sur
la plage ou encore le final particulièrement vicieux - où Sam se perd
pour de bon en cédant à ses instincts les plus primaires - offrent des
moments sacrément dérangeant. Imparfait mais très intéressant.
Sorti en dvd zone 2 français aux Edtions Montparnasse
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