Lors d’une inspection,
des agents des douanes découvrent le cadavre d'une jeune femme dont la
chevelure continue de croître. Cet étrange phénomène n’échappe pas au gardien
de la morgue qui entreprend de fabriquer des extensions pour les revendre aux
salons de coiffure. Mais tous ignorent que ces extensions, douées d’une vie
propre, sont muées par des pulsions meurtrières. Accompagnée de sa nièce, une
apprentie coiffeuse va tenter de démêler le mystère avant que d'autres décès ne
surviennent ...
Exte voit Sono
Sion s’aventurer sur les terres de la J-horror tout en y prolongeant nombre de
thématiques récurrentes de son œuvre. Ici se rejoignent l’observation d’une
cellule familiale malmenée avec un questionnement sur la place de la femme dans
la société japonaise. Le surgissement de l’élément surnaturel de la chevelure
meurtrière relève d’une souffrance et exploitation féminine exacerbée par son
origine morbide. Ainsi le cadavre d’une jeune femme mutilé par des trafiquants
d’organes survit par la force du seul élément qui n’a pu lui être totalement
arraché, ses cheveux qui repoussent indéfiniment. Pourtant, une fois de plus
cette douleur va être exploitée par une perversion masculine, la tricophilie (attirance
sexuelle pour la pilosité) qui avive les sens d’un médecin légiste (Ren Osugi)
qui va répandre la chevelure maudite en ville pour le pire.
En parallèle nous suivons l’apprivoisement mutuel de Yuko (Chiaki
Kuriyama), apprentie coiffeuse prenant en charge sa nièce Mami (Miku Sato).
Cette dernière est particulièrement vulnérable face aux abus d’une mère abusive
et violente, et ancienne tourmenteuse de sa propre sœur Yuko. Dès lors Sono
Sion fait de des manifestations meurtrières de cette chevelure meurtrière une
émanation à la fois organique et psychologique. La première victime se faisant
des extensions capillaires avec est ainsi assaillie de flashback sordides sur le calvaire
initial de la maudite avant de basculer dans la folie. Par la suite le
réalisateur convoque l’imagerie J-horror (où le célèbre Ring d’Hideo Nakata a
popularisée ces figures macabre à cheveux longs) qu’il fait vriller sur les
rives de l’Ero-guro, mais également du dégoût organique d’un Cronenberg tout en
confectionnant des tableaux graphiques qui n’appartiennent qu’à lui. Les
cheveux émanent ainsi des yeux, de la bouche, des plaies et s’étendent avec la
souffrance et la haine sans limite de disparue pour déborder du cadre, envahir
l’espace et confectionner un cocon abstrait.
La lente caractérisation de Yuko et sa nièce sert à montrer
comme une douleur initiale peut être matérialisée en amour, le métier de
coiffeuse de Yuko offrant un parallèle lumineux à ce même élément de la
chevelure. Avoir subi à une échelle également traumatisante la violence et la
domination d’autrui, les deux personnages frôlent le précipice sans jamais y
tomber. La candeur naturelle de la fillette (toujours à ouvrir son cœur à cette
mère qui la malmène tant) rejoint la vulnérabilité et l’innocence dégagée par
Chiaki Kuriyama et donne un récit les contours d’un vrai beau mélodrame auquel
s’ajoute brillamment l’élément horrifique.
La dimension grotesque ou vaine des
protagonistes masculins (l’amant violent de la mère, le médecin légiste
pervers, les policiers) ne sert donc qu’à appuyer cette vaillance féminine. Ce
n’est qu’en opposant sa souffrance à l’oppression masculine que le « monstre »
retrouve son statut de victime et la rédemption dans un final totalement fou
dont Sono Sion a le secret. Cet équilibre se tient formellement entre l'imagerie lumineuse des extérieurs de la ville et les vues sur la mer, et l'ambiguïté de la créature dont les manifestation s'amorce par la ritournelle Douce nuit. Malgré de petites longueurs, un objet singulier,
fou et captivant.
Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez HK Vidéo
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