jeudi 10 novembre 2011
Mes chers amis - Amici Miei, Mario Monicelli (1975)
Cinq quinquagénaires, un journaliste, Perozzi, un chirurgien, Sassaroli, un noble ruiné, Mascetti, un patron de café, Necchi, et un architecte, Melandri, font des virées de potaches, remplies de blagues.
Mes chers amis est l'ultime projet d'un Pietro Germi qui affaibli par la maladie décida d'en confier la réalisation à son ami Mario Monicelli (auquel 10 ans plus tôt et en pleine crise personnelle il tenta d'offrir Signore & Signori avant de reprendre le projet avec le résultat que l'on sait). Le film est donc un hommage de Monicelli à son ami disparu et bien difficile de démêler les apports de chacun. L'institution du mariage aliénante pour des hommes immatures en quête d'ailleurs fut déjà malmenée dans Divorce à l'italienne et l'un des segments de Signore & Signori avec Gaston Moschin qu'on retrouve ici au casting. L'ironie mordante et le désespoir latent qui traverse le film sont aussi du pur Germi tandis que la tendresse, la formidable gestion et la complicité du groupe d'acteurs ainsi que la drôlerie en toute chose sont typique de la patte de Monicelli. En tout cas l'union des deux hommes donne un résultat jubilatoire.
Sans ligne narrative définie, le récit accompagne les facéties de cinq quinquagénaires qui pour contrebalancer un quotidien morne ont décidés de s'amuser de tout. Pour ce faire, ils s'engagent dans des périples rocambolesques et improvisés (appelés tziganades) où ils multiplient les blagues potaches. Au fil des différents périples se dessine le portrait de chacun et c'est à celui qui se disputera l'existence la plus pathétique. On y trouve notre narrateur Perrozi (Philippe Noiret) journaliste solitaire méprisé par son fils terre à terre, le noble déchu et embrouilleur de première Macetti (Ugo Tognazzi), l'architecte doux rêveur Melandri (Gaston Moschin), le propriétaire de bar Necchi (Diulio Del Prete moins fouillé que les autres) et le chirurgien farceur Sassaroli (Adolfo Celli). Le film s'inscrit dans la veine de ses films italiens des 70's dépeignant une génération usée, revenue de tout et ne croyant plus en rien sinon se réfugier dans leur souvenirs (Nous nous sommes tant aimés de Scola) ou le suicide (La Grande Bouffe de Ferrari).
A la mélancolie et au nihilisme de ces œuvres, Monicelli troque un humour dévastateur et offre une des comédies italiennes les plus drôles, inventives et irrévérencieuses de l'âge d'or. Les situations vont du plus simple immédiatement tordant (le gag des baffes dans la gare énorme) au plus alambiqué et tout aussi hilarant (le long canular final au malheureux Bernard Blier). Les acteurs s'en donne à cœur joie lors de moments comiques étincelant tel cet hôpital traversé d'un tsunami avec le passage des compères, avec une inventivité constante notamment le phrasé improbable de Tognazzi qui en rendra fou plus d'un.
Derrière les rires un profond malaise se fait sentir néanmoins, autant par les comportements peu reluisant des héros que par cette société terne qui n'a plus rien à offrir. Le machisme et la vulgarité sont autant source de rire que de vraie cruauté avec des personnages féminins tour à tour victimes (Milena Vukotic épouse sacrifiée de Tognazzi), harpies (l'amour de Moschin qui passe de la douceur romantique à l'exigence matérielle) ou bel objet indifférent avec la jeune et belle Titti.
Le seul refuge sera donc le rire pour les héros dès lors vu sous un jour fort pathétique. Toutes leurs facéties ne sont qu'une sorte de baroud d'honneur rigolard en attendant la fin, qui va survenir de manière inattendue lors de la conclusion. Mais là aussi la tristesse passée l'important reste de s'amuser, la preuve avec une ultime scène où on aura rarement autant ri à un enterrement.
Film toujours inédit en dvd français, assez honteux mais le film ressort en salle cette semaine donc pour les parisiens (qui risquent d'être les seuls concernés malheureusement) courez y !
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