Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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jeudi 9 septembre 2010

Ces Messieurs Dames - Signore & Signori, Pietro Germi (1966)

Tony Gasparini confie à son ami et docteur, le professeur Castellani, ses ennuis intimes. Celui-ci estime que le meilleur remède est de conduire son ami à une party. Pour ce faire, il n'hésite même pas à le jeter dans les bras de sa femme Noemi. Mais voici que le plus grand colporteur de ragots de Trévise, Scarabello, apprend à Castellani qu'en réalité l'infirmité prétendue de Gasparini n'est pour lui qu'un alibi opportun...Signore & Signori est une chronique sociale cherchant à fustiger les mœurs douteuses et l'hypocrisie de la bourgeoisie du nord de l'Italie (et plus précisément Trévise). Sans être un film à sketches, le long métrage se divise en trois récits distincts regroupant un même ensemble de personnages et traitant précisément à chaque fois d'un travers particulier. Le scénario fut écrit par Germi épaulé par le duo phare de la comédie italienne Age-Scarpelli ainsi que Luciano Vincenzoni (collaborateur attitré de Sergio Leone entre autres) qui apporta l’idée de départ. Ce dernier, originaire de Trévise, s'inspire en grande partie de scandales et de rumeurs locales bien réels pour nourrir son script et persuade Germi de situer l’histoire dans cette ville.

Le film remporte un énorme succès dans toute l'Italie sauf à Trévise où les habitants voueront une haine tenace envers Vincenzoni et Germi (au point de recevoir un accueil hostile pendant des années lorsqu'ils s'y rendront) tant ils se sont reconnus dans les personnages infâmes du film. Un des grands atouts nés des contraintes budgétaires, est de ne pas avoir (hormis Virna Lisi) de stars dans le film. Un Vittorio Gassman ou un Alberto Sordi auraient été excellents mais trop visibles. Là, des acteurs plus discrets mais talentueux renforcent l'unité et la force du propos.

La première histoire sert à introduire tous les personnages dans le cadre d'une fête se déroulant chez un notable de la ville. Germi gère avec brio la foule de personnages qu'il définit en un clin d’œil à travers les dialogues et les situations. Couple adultère, médisance, mâles tous plus pervers les uns que les autres, autant d'êtres parfaitement détestables mais hilarants (mention spéciale à Scarabello en pot de colle rasoir).

La seconde histoire est dans la lignée des thèmes de son Divorce à l'italienne. Osvaldo Bisigato est marié à une affreuse mégère qui ne cesse de le rabaisser et l'insulter à longueur de journée. Les boules quiès ne sont pas superflues pour apaiser son enfer quotidien. Tombé amoureux d'une jolie caissière de bar (jouée par Virna Lisi), il voit une foule d'obstacles se dresser en travers de sa romance. Gastone Moschin est excellent, avec sa mine de chien battu qui subit les outrages d'une femme insupportable et qui, dans une séquence absolument jubilatoire manifestera sa rébellion par une gifle retentissante.Le couple adultère de Moschin et Virna Lisi représente ironiquement les seuls personnages purs du film, mais qui vont subir la pression sociale et morale de leur entourage surtout soucieux de maintenir les apparences. On retrouve le thème de Divorce à l'Italienne avec l'impossibilité de divorcer, l’influence de l'Eglise qui parvient à ébranler la situation sociale du couple adultère (perte d’emploi, arrestation pour adultère, lettres anonymes calomnieuses) dans le but de les séparer et les marginaliser. On comprend que l'adultère est parfaitement accepté à condition de rentrer sagement chez sa femme ensuite mais que toute séparation est exclue dans l'ordre social établi. La conclusion bien qu'assez drôle est plutôt amère : le retour du héros dans sa prison dorée.

La troisième histoire voit un groupe de notables s’échanger dans la même journée une jeune fille peu farouche, acceptant leurs petits cadeaux en échange d'une coucherie. Débarque alors le père, paysan furieux à la mine patibulaire qui révèle que la fille n'a pas seize ans. Sûrement la plus féroce des trois histoires, les personnages masculins sont de vrais porcs tandis que les femmes ferment les yeux et emploient des moyens douteux pour sauver leurs maris. La presse en prend également pour son grade, les notables mettant la pression pour tourner le fait divers à leur avantage. La conclusion ignoble à souhait achève le tout dans un cynisme grinçant et sans espoir. On comprend aisément ce qui a pu froisser les habitants de Trévise qui ont droit à un portrait peu reluisant.

Sortie dans une belle édition chez Carlotta, après avoir été de longues années indisponible en France.


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