Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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dimanche 19 septembre 2010

Total Western - Eric Rochant (2000)


Un flingueur abruti, un deal mal négocié, pas mal de morts et quelques millions de francs poussent Gerard Bedecarrax, dit Bede, a se mettre au vert. Direction Millau dans l'Aveyron, ou s'érige l'Espérance, centre d'hebergement pour jeunes délinquants. La, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si Ludo Daes, accompagne de cerbères armes jusqu'aux dents, ne tenait a tout prix a récupérer son argent.

Curieux parcours que celui d'Eric Rochant. Auteur d'un vrai film culte générationnel avec Un Monde Sans Pitié, le réalisateur voit son élan brisé avec l'accueil public tiède (et le massacre critique cannois) de Les Patriotes pourtant un des plus ambitieux et brillant film français des années 90, récit d'espionnage comme on en avait plus tenté depuis Henri Verneuil. Dès lors c'est tout une carrière qui se voit détournée par cet échec injuste, Rochant devant montrer s'assurer un succès pour retrouver des productions plus nanties auquel son talent le destine. Ni le curieux Anna Oz ni la comédie Vive la République n'atteindront cet objectif, les films bien qu'intéressants n'étant pas non plus de totale réussite.

Total Western est d'une toute autre trempe et aurait clairement dû relancer le cinéaste. Tout comme avec Les Patriotes, Rochant relance ici un genre tombé en désuétude au sein du cinéma français (depuis le retrait de Delon et Belmondo) en s'attaquant au polar (nous sommes avant le succès de 36). Le pitch est assez rafraîchissant même si l'idée de croiser western et policier musclé dans la campagne française profonde n'est pas neuve, George Lautner s'y étant essayé avec brio dans les 60's avec Fleur d'oseille. La confrontation entre petites frappes banlieusardes et banditisme chevronné est néanmoins très réussi. Tout d'abord en confrontant le truand en cavale Samuel Le Bihan aux "racailles" à la vanne dévastatrice, mais surtout dans l'action lorsque les ennuis arrivent avec de redoutable gangster armés jusqu'au dents.

L'écriture fait clairement la différence, la construction de Rochant est exemplaire et surtout les dialogues de Laurent Chalumeau sont dévastateurs. Chalumeau, auteur des textes de Antoine de Caunes à la grande époque de NPA a été biberonné à l'école Michel Audiard (il est d'ailleurs l'auteur de roman policiers décalés et hilarant Neuilly brûle t il et Topodoco) dont il donne ici une variante déjantée et outrancière. Difficile de garder son sérieux lorsqu'on entend Kalfon s'écrier "Ca va sentir la fondue savoyarde" après avoir fait exploser une laiterie...

Samuel Le Bihan acteur au charisme certain mais très inégal dans l'interprétation trouve ici son meilleur rôle avec ce gangster mutique et déterminé. Les jeunes acteurs jouant les délinquants sont tous également très justes, dans le croisement idéal entre le pur cliché pour l'aspect comédie les confrontant aux autochtones ruraux et la vrai sincérité chacun étant bien caractérisé. C'est pourtant Jean Pierre Kalfon qui éclipse tout le monde en méchant mémorable, mine sadique et réplique salaces en pagailles.

Le film fait preuve d'une violence parfois difficilement soutenable (Le Bihan se faisant torturer) rendre ses méchants menaçants même si quelques idées délirantes viennent alléger l'atmosphère tel cette apparition d'une milice armée du dimanche adepte du painball se faisant décimer en un clin d'oeil. Visuellement Rochant justifie son titre en multipliant posture, cadrage les plaines de l'Aveyron en simili Almeiria (lieux de tournage en Espagne plébiscité pour les western spaghetti). Et ça fonctionne grâce notamment à la photo solaire et écrasante de Vincenzo Marano et la musique de Marco Prince (qui a un petit rôle) multipliant les clins d'oeil à Ennio Morricone. Le défaut et la qualité du film serait sont urgence, les évènements s'enchaînent très vite et sans ennui mais on aurait aimé voir la relation entre Le Bihan et les ados s'instaurer un peu plus subtilement. Là il faut vraiment l'arrivée de l'action et du danger pour qu'un rapprochement se fasse sentir.

Un polar fort réussi et à l'identité propre donc mais sans doute un peu trop en avance sur la mode et sortis en salle de manière désastreuse en plein mois de juillet, époque où les films français sorti en période estivale étaient sacrifiés. Après ce nouvel insuccès, Rochant donnera dans la grosse comédie calibrée et ratée avec L'école pour tous pour se reconvertir dernièrement dans la série télé Mafiosa sur Canal +. Vraiment dommage et tellement loin de qu'il pouvait nous offrir...



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