Adolescente paumée, Riley tente de
survivre à la pression quotidienne d’un lycée complètement azimuté et
frappé par un tueur tout droit échappé d’un authentique slasher. Mais
l’établissement recèle aussi d’autres secrets…
L'ancien clippeur Joseph Kahn s'était fait connaître bien malgré lui avec un des plus beaux nanars des années 2000, Torque (2004). Ersatz à deux roues et encore plus décérébré de Fast and Furious
le film était un plaisir coupable pour le spectateur mais une tâche
embarrassante sur le cv de son réalisateur dont c'était le premier film
et qui mettrait quelques années à s'en remettre. Ce n'est que huit ans
plus tard que Joseph Kahn pourrait enfin signer un second film avec ce Detention financé en grande partie par ses propres économies. Detention s'avère tout autant un ovni que Torque mais dans le bon sens du terme cette avec un teen movie unique en son genre.
La
survoltée séquence d'ouverture nous avertit des dérapages à venir avec
la présentation d'une sorte de caricature monstrueuse de l'adolescente
superficielle pom pom girls scotchée à son portable où Kahn nous égare
dans un montage hystérique et une avalanche d'informations avant de
brutalement interrompre le tout pas l'irruption d'un serial killer qui
va violemment stopper la logorrhée vide de sens de la belle.
L'intrigue
s'intéressera ensuite à une adolescente nettement moins populaire avec
la complexée et attachante Riley (Shanley Caswell), secrètement
amoureuse du rebelle Clapton Davis (Josh Hutcherson) que son ancienne
meilleure amie et mordue des années 90 Ione (Spencer Locke) fréquente. Il faut un
temps pour s'habituer au rythme infernal du film dont l'inventivité
perdra les moins attentif rien qu'avec son générique utilisant tous les
éléments de décors et vestimentaire dans sa présentation, tout comme les
multiples références musicales.
On pense d'abord avoir une sorte de
teen movie post moderne ultime où les connaisseurs du genre relèveront
assez vite toute les référence : Trois heures l'heure du crime (Clapton Davis défié par la brute du lycée), évidemment Breakfast Club (des élèves aux personnalités antinomiques réunis en retenue commune), Fatal Games (mal être adolescent conduisant au meurtre et au suicide) et une bonne dose de Scream
avec ce serial killer trucidant ses camarades et surtout la distance
des lycéens sur les évènements conscients de ce qui fait d'eux une
victime potentielle et les rend cool (être dévergondé et populaire
selon les canons établis par Halloween et Vendredi 13).
Le
film trouve sa propre identité par ses personnages et la façon de se
réapproprier cette pluie de références. Les clichés attendus sont dans
un premier temps malmenés pour rendre les héros plus consistants que les
caricatures attendues avec une Riley certes mal dans sa peau mais pas
sainte nitouche (hilarante scène de beuverie), le si insouciant Clapton
Davis anxieux pour ses notes et son avenir et l'obsession pour les 90's
de la si superficielle Ione va trouver une explication pour le moins
surprenante.
Kahn donne même quelques respirations bienvenues à ce
rythme infernal avec la ballade nocturne en skate-board de Clapton et
Riley où on comprend que seules les entraves du paraître de ce monde
lycéen les empêchent de concrétiser une complicité évidente.
Car en
dehors de cela c'est dans le mouvement perpétuel et les allusions tous
azimuts à la culture pop qu'avance Detention
qui se relance à mi-parcours par un argument de science-fiction aussi
cohérent qu'inattendu qui convoque cette fois l'esprit des Retour vers le futur
de Robert Zemeckis. Film dans le film, voyage dans le temps et
transfert de corps (et une autre référence de venir à l'esprit avec les
deux versions de Freaky Friday
avec Jodie Foster puis Lindsay Lohan) nous emmènent dans un ailleurs
complètement déjanté où cette caractérisation initiale des héros servira
de guide idéal face aux enjeux.
Ce qui nous aura éventuellement perdu
dans les multiples ruptures de ton, de rythme et de visuel, on le
comprend malgré tout par les problématiques des personnages et
inversement. C'est l'occasion pour Joseph Kahn de déployer à bon escient
(malgré les apparences foutraques) sa virtuosité avec notamment ce
fabuleux plan-séquence où la caméra remonte le temps de la salle de
retenue en variant look et atmosphère musicale au gré du travelling
circulaire.
Detention
est un film bien de son temps avec ce visuel qui convoque toute la
panoplie des outils numériques, langages sms et réseaux sociaux à
l'image (onomatopées de textos surgissant plein écran entre autres) tout
en évoquant la propre nostalgie du réalisateur dont l'adolescence s'est
déroulée dans les 90's. Ces va et vient traite un questionnement
central du film à savoir l'insatisfaction par rapport à son époque et
son environnement, la difficulté à affronter le présent qui parle autant
aux adultes (le personnage de Dane Cook passant du directeur aigri à
l'époux aimant et détendu une fois sa destinée modifiée, ) qu'aux
adolescents avec l'obsédée des 90's (qui sans en dire plus joue sur les
deux tableaux en fait) et bien sûr le couple Riley/Clapton.
C'est ce mal
être qui tirera les protagonistes vers des solutions extrêmes, des
refuges factices où la plénitude au bout de ce périple éreintant mais si
plaisant qu'est Detention, film culte en puissance.
Sorti en dvd zone 2 français chez Sony
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