Dans les années 70 à San Francisco, une adolescente a une aventure avec le petit ami de sa mère.
The Diary of a Teenage Girl est un attachant coming of age
qui donne un souffle rafraîchissant au teen movie. Il s'agit du premier
film de Marielle Heller qui adapte là le roman graphique
semi-autobiographique de Phoebe Gloeckner, The Diary of a Teenage Girl: An Account in Words and Pictures.
Après se l'être fait offrir en 2007, Marielle Heller aura nourrit une
véritable passion pour le roman graphique qu'elle adapte tout d'abord au
théâtre (et y incarne l'héroïne) en 2010. L'accueil positif de la pièce
et surtout la justesse et l'inventivité avec laquelle sont repris ses
thèmes incite Phoebe Gloeckner à vendre les droits à Marielle Helle qui
pourra se pencher sur cette adaptation cinématographique.
On suit le
destin de Minnie (Bel Powley) adolescente de 15 ans dans le San
Francisco de 1976. L'atmosphère hippie et libertaire de l'époque se
reflète dans son foyer ou avec sa sœur elle est élevée par sa mère
(Kristen Wiig) jeune femme délurée et immature. La frontière entre
l'adolescence insouciante et l'âge adulte semble plus ténue à cette ère
de libération sexuelle. Jeune fille attrayante mais encore innocente,
Minnie va prendre conscience de son pouvoir de séduction sur les hommes
en couchant avec Monroe (Alexander Skarsgård) le petit ami de sa mère.
La scène où les sentiments basculent et le désir mutuel s'éveille
exprime d'ailleurs en situation ce changement, un chahutage enfantin se
teintant d'une soudaine tension sexuelle entre Monroe et Minnie.
Marielle
Heller adopte une approche sobre pour la scène de "première fois",
montrant l'appréhension et l'excitation de l'avant puis la
transformation apaisée de l'après, immortalisée par un portrait en
polaroid de Minnie. A partir de là, le film se montre bien plus
décomplexé (sans être racoleur non plus) dans l'illustration du sexe et
la libido décomplexée de l'héroïne. La culpabilité naît plus de la
trahison envers la mère que de la transgression en elle-même le contexte
70's et la constante quête d'expérience de Minnie justifiant la
situation. Mais si notre héroïne est une femme accomplie à travers ses
courbes sensuelles et ses aventures sexuelles, c'est nettement moins le
cas dans son identité. Marielle Heller exprime ces doutes dans la
rêverie et le réel à travers ses expériences. Aspirantes dessinatrice,
Minnie laisse se déployer ses interrogations sur la bande d'un
magnétophone et surtout des rêveries convoquant l'animation
psychédélique, baignée de cette obsession du sexe et de son mal-être
latent. Parmi les plus belles idées, on aura un parallèle animé d'une
coucherie avec un camarade de lycée où Minnie apparait gigantesque face
au garçon, métaphore de son expérience précoce face à son partenaire
dépassé par tant d'ardeur.
Le plus intéressant sera le sentiment
de vide ressenti par Minnie face une libido aussi accomplie pour son
âge. Marielle Heller dresse un portrait de femme hésitante dans son
émancipation. Selon l'ordre supposé des choses, ce désir doit forcément
se raccrocher à la normalité d'une relation normale qui lui est refusée
avec son amant adulte. Minnie reproduit le schéma matriarcal
traditionnel où la femme doit forcément s'épanouir au bras d'un homme, à
l'image de sa mère qui sous la modernité s'est mariée trop jeune et qui
ressent viscéralement le besoin de séduire en dépit de son propos
féministe. Minnie en s'accrochant à Monroe ou en attente permanente
d'une étreinte masculine anonyme reproduit finalement ce modèle et devra
apprendre à exister par elle-même. Face à ce constat encore insoluble,
ell va sombrer dans les excès de drogues, d'expériences sexuelles
sordides où là aussi le contexte destroy 70's joue à plein et autorise
les situations très dérangeantes.
Marielle Heller tout en reproduisant
bien l'époque évite toute patine vintage forcée (y compris dans la bande-son ne donnant pas dans le juke-box si ce n'est pour les plus maniaques l'usage du See no evil du groupe Television un an trop tôt) et plie
constamment le film au point de vue de Minnie avec cette photo au
teintes pastel légèrement désaturées, la vitesse de l'image, l'animation
et l'onirisme s'invitant dans le réel sans prévenir. Une des meilleures
inventions sera notamment de faire enregistrer à Minnie son journal
partout à travers la ville, déclamant à haute voix ses aventures
sexuelles dans le bus comme en pleine rue. Cela exprime à la fois son
sentiment de liberté et la manière dont la chose obsède ses pensées.
Bel
Powley est une sacrée révélation dégageant un mélange de sensualité et
mélancolie par un charisme magnétique. Le reste du casting est à
l'avenant, notamment Alexander Skarsgård parfait en amant immature
(quand on voit sa composition catastrophique récente de Tarzan il semble
qu'il suffise d'une moustache pour gagner en charisme) et une poignante
Kristen Wiig en mère dépassée qui montre toute l'étendue subtile de son
registre. Une très belle réussite qui aurait vraiment mérité une sortie
salle en France.
Sorti en dvd zone 2 chez Lumière
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Nous avons eu plus de chance que les français, car le film, précédé d'une excellente critique, a bien été diffusé dans nos salles. Il faut dire que le film a été tourné à Los Angeles par une division de la société bruxelloise Caviar et que la postproduction a été effectuée chez nous, ceci expliquant sans doute cela. Je n'ai malheureusement pas eu le temps d'aller le voir mais il est bien sur ma liste d'attente. Le fait que tu précises qu'il ne soit pas racoleur me rassure également. Car vu le sujet, ce n'était pas évident non plus...
RépondreSupprimerAh je comprends mieux maintenant pourquoi le dos de jaquette de mon dvd a une partie en flamand et en français ^^ En France il n'est dispo qu'en VOD malheureusement, pas encore trop friand de ce mode de visionnage...
SupprimerEt sinon oui ça reste sobre tout en ne cachant pas les choses, autant dans l'aspect sensuel que glauque. Le mélange avec l'animation amène beaucoup de poésie.