Dans cette biographie précise et inhabituelle, le truand Al Capone
arrive à Chicago à la veille de la prohibition pour être le garde du
corps du trafiquant Johnny Torrio. La progressive prise de pouvoir de
Capone dans le gang s'accompagne d'une série de meurtres, d'actes
d'extorsion et de fraudes politiques. Il prend alors la tête de la plus
grosse "affaire" de Chicago, mais déjà le déclin de son pouvoir s'amorce
et une fin horrible l'attend.
La fin des années 50 voit un
véritable film de gangster dans le cinéma américain. Le genre n'avait
jamais complètement disparu mais n'était plus pourvu de l'aura du début
des années trente avec le triomphe des productions Warner (Le Petit César de Mervyn LeRoy (1931), L'Ennemi public
de William A. Wellman (1931)). La criminalité montante aux Etats-Unis
d'alors se répercutait sur les écrans mais les studios devaient avancer
masqués dans leur évocation, Scarface (1932) de Howard Hawks étant un
biopic officieux et romancé d'Al Capone sans pouvoir le nommer. C'est
donc le créneau pour lequel vont opter les productions des années 50
avec une multitude de biopic assumés dont la nature de série B (et un
relâchement du Code Hays) autorisera une violence bien plus corsée : Baby Face Nelson de Don Siegel (1957), The Bonnie Parker Story (1958) de William Witney ou encore Machine Gun Kelly de Roger Corman (1958).
Le
film de Richard Wilson s'inscrit dans ce courant et va trouver avec Rod
Steiger un interprète à la démesure du célèbre gangster, en plus
d'entretenir une troublante ressemblance physique avec son modèle.
L'acteur affirme avoir fait grandement modifier le scénario qui selon
lui romantisait trop Al Capone. Il en fait effectivement une figure
monstrueuse et exubérante, passant de la petite frappe mal dégrossie à
l'homme de l'ombre indispensable puis au chef impitoyable et
sanguinaire. L'aura maléfique de Capone se déploie progressivement,
d'abord par ce physique intimidant et la violence dont il est capable
puis par un pouvoir de séduction insidieux où il nourrit l'ambition
(Johnny Torrio (Nehemiah Persoff) poussé à trahir son mentor) mais aussi
le désir (Fay Spain séduite par l'homme qui l'a rendue veuve).
L'ascension d'Al Capone se fait dans le sang et la corruption, Richard
Wilson s'appliquant autant à dépeindre les règlements de comptes
incroyablement brutaux (avec en point d'orgue le fameux Massacre de la
Saint Valentin superbement filmé) que les processus du trafic d'alcool
lors de la Prohibition et surtout l'aspect moins connu des méandres de
la corruption et fraude politique (le long épisode où la Mafia investira
une petite ville voisine de Chicago pour détourner une élection). Al
Capone par son énergie, férocité et bagout balaie dans un premier temps
toute les entraves, soumet les opposant, attire les soupirant et séduit
les femmes. C'est pourtant un être profondément seul dont l'attrait ne
tient qu'à sa poigne de fer et deviendra de plus en plus solitaire et
pathétique quand son pouvoir se délitera.
Le scénario fait des échos
constant entre l'ascension et la déchéance, les raisons de la réussite
étant les mêmes que celles de la chute avec un Capone s'accrochant
maladivement à un pouvoir si durement conquis. Le récit alerte fait
passer tout cela efficacement, humanisant Capone malgré ses actes
notamment dans sa relation avec Fay Spain. L'épilogue en prison retrace
en miniature et à ces dépends ce qui a constitué l'existence de Capone,
la mégalomanie, la solitude face au monde qui l'entoure et la violence.
La voix-off amène une hauteur morale paradoxale aux excès en tous genres
auxquels on vient d'assister.
Sorti en dvd zone 2 chez Warner
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