Un interne est assassiné au sein de l'hôpital Bellevue de New York. L'affaire semble compliquée et le chef de la police décide de placer l'inspecteur Fred Rowan, qui a officié comme infirmier dans l'armée, sous couverture dans l'établissement. Sa plongée en immersion lui fait courir de nombreux dangers...
De la longue et prolifique carrière de George Sherman, on retient avant ses incursions dans le western et particulièrement ses glorieuses années 50 où il fut une contribution majeure à l’essor du genre, même si rencontrant moins de reconnaissance critique que ses collègues Anthony Mann, John Ford ou Howard Hawks. Sherman est un talent entre l’auteur et l’artisan très doué qui promena son savoir-faire avec brio dans de multiples registres. La preuve en est avec ce Brigade secrète, belle proposition de film noir.
Brigade secrète est dans la tendance du film noir de ce début des années 50, une tendance délaissant la stylisation expressionniste pour l’immersion réaliste et simili documentaire. A cet argument s’ajoute le sous-genre du récit d’infiltration, meilleur argument dramatique pour nous plonger dans un microcosme comme Incident de frontière d’Anthony Mann (1949) où jouer sur les peurs façon I was communist for FBI de Gordon Douglas (1951). Brigade secrète reprend tous ces motifs mais trouvent néanmoins une vraie originalité. L’infiltration se fait ici en milieu hospitalier après le meurtre irrésolu d’un interne, Richard Conte (pour une fois du bon côté de la loi) jouant un policier sous couverture et crédible grâce à ses deux ans d’études de médecine. L’aspect réaliste tient au tournage effectué selon le souhait de Sherman au sein du véritable Bellevue Hospital à New York. D’ailleurs au vu du portrait peu reluisant qui sera fait des coulisses de l’établissement, le maire de la ville exigera un prologue insistant sur la nature fictionnelle du film et rendant hommage à la dévotion du personnel hospitalier.Avant que les dessous criminels ne se dévoilent, Sherman passe ainsi un long moment à observer le quotidien de l’hôpital. La tension naît de situation où Conte se retrouve à pratiquer t risquer l’erreur au vu de sa faible expérience, tandis que le spleen ordinaire des internes et infirmières se dessine. Aspirant à une promotion, à ouvrir leur propre cabinet et un jour fonder une famille, ils se sentent végéter voient leur sacerdoce s’effriter, au point de possiblement céder à de mauvaises tentations. Cette caractérisation se conjugue à la traversée de toutes les strates de l’hôpital, de chacun de ses lieux et acteurs, des petites mains aux chirurgiens chevronnés. Ce que l’on a pris pour un simple travail d’immersion dissémine pourtant les indices, de ses protagonistes les plus truculents et faussement inoffensifs à certains sursauts de stylisation où la mise en scène sobre ose quelques effets (ce plan étouffant en plongée sur des escaliers symbolisant l’étouffement ressentis par certains internes). La photo de William Miller travaille habilement cet aspect, notamment lors des incursions à l’extérieur comme les pauses sur le toit déployant un panorama urbain de façon crue, travaillant la proximité et l’éloignement de la « vie réelle » pour les internes à travers cette vue. Sans trop en dire, le scénario distille habilement son mystère, et après avoir fait miroiter une vaste organisation criminelle, révèle une menace aussi sobre que sournoise et en parfaite cohérence avec les maux intimes que l’on a pu observer. Sherman sait déployer quelques fulgurances sous son parti-pris réaliste et retenu comme cette formidable poursuite à pied laissant voir un électrisant instantané des bas-fonds. Richard Conte tout en sobriété est remarquable dans cette dualité enquêteur/confident, tout comme une Coleen Gray exprimant bien ce côté à la fois proche et insaisissable travaillé par Sherman. Un bon film noir très bien mené.Sorti en dvd zone 2 français chez Elephant Film
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