Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mardi 3 avril 2018

High Fidelity - Stephen Frears (2000)

Rob Gordon tient à Chicago une boutique de disques fréquentée par des amateurs de vinyles, d'albums rares et ésotériques des années soixante et soixante-dix. Sa vie entière est placée sous le signe de la pop. C'est en elle qu'il puise le courage d'affronter le quotidien, c'est elle qui l'accompagne depuis toujours dans ses tribulations sentimentales et donne un sens à son existence. Après avoir enduré moult ruptures, Rob est une fois de plus plaqué. Il s'efforce de comprendre les raisons de ce nouvel échec. Il décide de relancer ses ex pour trouver la clé de l'énigme.

Stephen Frears adapte avec High Fidelity le cultissime roman éponyme de Nick Hornby. Deuxième livre d'Hornby, High Fidelity forme avec Carton jaune et À propos d'un gamin une sorte de trilogie sur l'immaturité du trentenaire masculin. Avec Carton jaune (qui connaîtra deux adaptations) et High Fidelity, Hornby centrait une partie des problèmes de ses héros autour de leurs passions pour le football et la musique qui sont également celles de l'auteur et revêtent donc une grande part autobiographique. Stephen Frears avait apprécié le livre sans en être non plus un grand admirateur et c'est grâce à la volonté de John Cusack et du scénariste D.V. DeVincentis, tous deux dingues de musiques, que le projet verra jour.

Le film perd un peu de la spécificité du livre en transposant l'intrigue de l'Angleterre aux Etats-Unis et plus précisément de Londres à Chicago. La grisaille londonienne sied mieux au moment de spleen de Rob (John Cusack) et malgré une volonté évidente de montrer un Chicago plus interlope (une seule séquence révèle réellement l'urbanité de la ville) on ressent tout de même qu'un certain esprit s'est perdu en route. De ce choix découle aussi une bande-son chiadée (The Velvet Underground, Bruce Springsteen, Aretha Franklin) mais plus attendue et moins au centre du récit (le légendaire passage où Rob se trouve face une épouse aigrie bradant la collection de rêve de son mari volage sera tournée mais coupée au montage). Stephen Frears ne parvient pas à traduire par un film réellement "musical" le côté obsessionnel de son héros (les fameux tops 5 musicaux divers et variés du livre sont amenés de façon quelconque ne suscitant pas la même jubilation que pour le lecteur mélomane) et s'appuie plutôt sur l'étude de caractère à travers la géniale interprétation de John Cusack.

L'acteur offre un hilarant patchwork de tares masculines en se montrant tour à tour jaloux, de mauvaise foi, imbu de lui-même ou pathétique d'auto-apitoiement. Le fil rouge sera le souvenir de ses cinq plus douloureuses ruptures pour atténuer celle de sa plus récente avec Laura (Iben Hjejle) dont il peine à se remettre. Montage dynamique et astucieux accompagne des monologues rompant le quatrième mur pour dresser le caractère autocentré de Rob dont la passion musicale aura toujours constitué un refuge/prétexte face à la réalité (la manie de reclasser ses vinyles après une rupture amoureuse) et empêché d'avancer.

Frears met au cœur du récit cet aspect en interrogeant l'obsession musicale de Rob comme cause ou conséquence de ses déboires, les moments embarrassants avec Laura se conjuguant aux hilarantes scènes en magasin avec les deux acolytes Dick (Todd Louiso) et Barry (Jack Black révélation du film qui comporte ce degré de folie et d'outrance qui manque au reste). Là encore la dimension musicale reste en surface et prétexte comique quand tous les moments intimistes fonctionnent parfaitement, l'agitation de John Cusack étant contrebalancée par la résignation silencieuse d'une excellente Iben Hjejle.

L'universalité recherchée par Frears en fait un modèle de comédie romantique subtile mais fait perdre une partie de l'humour et du sens du rythme inhérent à la geekerie musicale (malgré quelques éléments comme la compilation cassette) contenue dans l'écriture de Nick Hornby. Un film attachant et agréable mais à l'identité moins forte que son modèle papier (Carton jaune (1997) sur un scénario de Nick Hornby était plus équilibré entre l'intime et univers des footeux) pour toucher au plus grand nombre. Détail amusant alors que le contexte du film tendait à être désuet les années suivantes, il redevient vivace avec le nouvel essor du vinyle et l'objet physique.

Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Touchstone et le roman est édité aux éditions 10/18 

2 commentaires:

  1. Je n'ai pas lu le bouquin d'Hornby, mais c'est avec ce film que j'ai découvert l'acteur Jack Black, qui compose ici un personnage de vendeur ultra pointilleux (au point de refuser de vendre un disque à un client qui décrète t'il: ne le mérite pas ! ha ha ), les meilleurs moments d'ailleurs sont les scènes dans la boutique, c'est souvent hilarant.

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    1. Il faut vraiment lire le livre qui est bien meilleur. j'aime bien le film mais en le voyant j'ai le sentiment qu'on pourrait facilement remplacer la passion musicale du héros par autre chose (les livres, les timbres ou autres) sans que ça ne bouleverse son déroulement général. Le livre à l'inverse ne pouvait être écrit que de cette façon dans sa description de l'obsession musicale du personnage. Vraiment à lire si tu en a l'occasion c'est autre chose !

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