Le socle de la Corée du sud repose sur les inégalités, d’abord entre le pouvoir et le peuple durant les longues années de dictature avec la police et l’armée comme bras armé de l’état face à un peuple qui n’aura de cesse de marquer sa défiance. Bong Joon-ho prolonge vois un statuquo de cette situation dans la Corée du sud contemporaine et post-dictature, mais les inégalités sociales et la lutte des classes ont pris le pas avec l’ascension économique du pays en tant que place forte capitaliste. L’auteur dépeint les leitmotivs récurrents du réalisateur qui exprime cette lutte des classes par le schématisme et la métaphore de lieux, notamment la maison de Parasite ou le train de Snowpiercer (2013). Les démunis y sont livrés à eux-mêmes, ne pouvant compter sur des autorités d’hier et aujourd’hui toujours violente, répressive, mais surtout indifférente à leur sort comme la famille de The Host (2006) forcée de passer par la débrouille pour retrouver un des siens enlevé par un monstre.
Erwan Desbois s’attarde sur un ensemble de symboliques signifiées par la mise en scène, la méticulosité des décors, les moments les plus réalistes et cru comme ceux profondément stylisé voyant leur conception profondément guidés et altérés afin de servir la vision et le message de Bong Joon-ho. L’auteur fait un parallèle avec d’autres grands réalisateurs sud-coréens (Park Chan-wook, Lee Chang-dong) ayant émergé dans le sillage de Bong Joon-ho à la fin des années 90, en notamment la manière donc s’articule de manière différente un même regard désabusé sur la société coréenne. C’est le cas notamment par l’art des ruptures de ton, l’usage de la comédie noire et un certain penchant pour le nihilisme dans des intrigues finissant souvent mal. Chez Bong Joon-ho, cet humour s’exprime entre autres en soulignant l’incapacité des protagonistes, condamné d’avance par l’incompétence de la police laisser un meurtrier en liberté dans Memories of Murder (2005), un système D roublard qui se retourne contre vous dans Parasite, une révolution mort-née dans Snowpiercer. Le mélodrame le pus appuyé et le grotesque le plus outranciers s’entrecroisent dans ce regard désespéré, tant dans la description haute en couleur des antagonistes (Snowpiercer, Okja (2017), Mickey 17 (2025)) que de la maladresse des héros.
Erwan Desbois souligne les influences de Bong Joon-ho, de Claude Chabrol à la comédie italienne féroce comme Affreux, sales et méchants d’Ettore Scola et exprimant le regard le regard tour à tour clinique, grotesque mais toujours profondément engagé dans l’injustice qu’il veut dépeindre. Le manichéisme n’est de mise malgré la virulence du message, Erwan Desbois expliquant bien comme les pauvres se confrontent et trahissent souvent entre eux face à la solidarité méprisante des nantis (Mother (2009), Parasite). Voilà donc un ouvrage passionnant qui éclaire sous un jour précis et accessibles la richesse de l’art de Bong Joon-ho.
Edité chez Playlist Society

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