À Naples, dans les années 1880, Felice
Sciosciammocca, un écrivain public sans le sou, partage l'appartement où
il vit en famille, avec la famille de son ami Pasquale, un photographe
de rue. Les deux familles désargentées y cohabitent tant bien que mal,
bien souvent contraintes de se passer de repas. Un jeune aristocrate,
Eugenio, amoureux d'une danseuse, Gemma, leur propose un marché : Felice
et Pasquale, en échange d'un somptueux repas, se feront passer pour ses
nobles parents afin de convaincre le père de la demoiselle, un ancien
cuisinier quelque peu infatué de noblesse, de la laisser l'épouser.
Misère et Noblesse
est une merveille de vaudeville toute à la gloire de la personnalité
comique de Toto alors au sommet de sa gloire. Le film constitue le point
central d'une trilogie où Toto incarne le même personnage dans une
série d'adaptation de pièces du dramaturge napolitain Eduardo Scarpetta (Un Turco napoletano (1953), Misère et noblesse et Il medico dei pazzi (1954), tous réalisés par Mario Mattoli). Misère et Noblesse
est la troisième adaptation de cette pièce écrite en 1888, après celle
muette de 1914 (dans laquelle joue d'ailleurs Eduardo Scarpetta) et une
parlante de 1940 (où joue cette fois Vincenzo, fils d'Eduardo
Scarpetta). Le film s'inscrit pleinement dans le cadre du néoréalisme
rose où les sujets sociaux s'imprégnaient de comédie plutôt que du
drame, avec ici une patine de film historique théâtral et visuellement
chatoyant (et à la mode.
Cet aspect factice et théâtral est
assumé dès la scène d'ouverture où le spectateur est associé à ceux
d'une pièce, les crédits du film apparaissant quand ceux-ci lisent le
livret et l'histoire démarrant alors qu’ils voient le rideau se lever
depuis leur loge. Le tournage en studio, la propreté dénuée de réalisme
et les couleurs pastel du procédé Ferraniacolor (moins onéreux que le
Technicolor) mettent donc en valeur les acteurs plutôt que
l'environnement pour souligner la pauvreté des héros. Les familles de
Felice (Toto) et Pasquale (Enzo Turco) se partagent ainsi un appartement
exigu, accumulant les loyers de retard et peinant à nourrir leur
famille.
Le jeu outré et les dialogues vachards soulignent par
l'hilarité leur situation désespérée entre dettes et faim qui les
tenaillent. La placidité et presque insouciance face à un dénuement trop
habituel souligne paradoxalement ce désespoir, dans des situations
triviales (Felice et Pasquale se disputant en douce une tartine de
confiture chez la jolie voisine d'en-dessous (Franca Faldini future
épouse de Toto)) souvent porté par le génie comique de Toto (l'hilarant
gag où il fait commander une pizza en pensant à tort être payé par un
client). La narration habile caractérise avec limpidité une
multitude de personnages, leurs interactions et passif (la femme quittée
de Felice, le prétendant vieillissant de Gemma (Sophia Loren) la
danseuse...) qui serviront dans la dernière partie purement
vaudevillesque.
Le mélange de cabotinage et d'instinct primaire de
crève-la-faim de nos héros se faisant passer pour des nobles - et où s'articule le thème central u clivage social insurmontable sans l'artifice et la tromperie - provoquent
une hilarité irrésistible que la mise en scène conventionnelle de Mario
Mattoli ne fait pas complètement décoller. Les quiproquos multiples se
résolvent ainsi de manière un peu précipitée et sans avoir exploités
suffisamment étirés leur potentiel comique. Il n'en reste pas moins une
superbe comédie où le ressent la patte de l'écriture de Ruggero Maccari,
partenaire d'Ettore Scola encore scénariste puis réalisateur sur ses
meilleurs films comme Affreux, sales et méchants (1976) dont Misère et
Noblesse semble être un prédécesseur léger.
Sorti en dvd zone 2 français chez Tamasa
[Film] Les Jeux de la Mort, de Michael Elliot (1984)
Il y a 6 heures
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