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lundi 26 août 2019

L’Arbre de sang - El Árbol de La Sangre, Julio Medem (2018)


En écrivant l'histoire de ses ancêtres, un jeune couple met au jour de sombres secrets familiaux, tandis que la réalité refait soudain surface.

Julio Medem a depuis ses débuts développé un style foisonnant où s’entrecroise esthétique étrange et densité narrative. Après avoir maturée dans ses trois brillants premiers films (Vacas (1991), L’écureuil rouge (1993) et Tierra (1996)), cette approche avait atteint son apogée avec les chefs d’œuvres Les Amants du cercle polaire (1998) et Lucia et le sexe (2000) avant de se perdre dans un fascinant trop-plein dans Caotica Ana (2007). Depuis le réalisateur avait se réinventer, maintenant sa singularité mais à travers une épure narrative voire spatiale dans ses deux derniers films, la romance Room in Rome (2010) et le mélodrame Ma ma (2015). El Árbol de La Sangre renoue avec l’excès de la première manière de Medem mais malheureusement quelque chose semble s’être perdu en route.

Sous la multitude des strates narratives et des exubérances formelles, chaque film de Julio Medem est porté par un fil rouge thématique ou narratif qui en faisait l’unité : la destinée et l’héritage dans Vacas, la quête d’identité avec Tierra, les spirales de la fiction et la porosité avec le réel pour Lucia et le sexe, l’idéal amoureux des Amants du Cercle Polaire, ou encore l’état et les origines du monde pour Caotica Ana. Tous les excès, circonvolutions et écarts tenaient par cette ligne conductrice et la maîtrise de Medem qui semble absente de ce nouvel opus où au contraire il semble tout concentrer sans choisir. On accepte l’entrée en matière nébuleuse mais intrigante qui voit ce couple de jeune gens (Ursula Corbero et Alvaro Cervantès) se réunir dans une maison de campagne pour coucher sur papier leurs secrets de famille. Leurs destins semblent avoir toujours été liés et remonter aux tumultes de la Guerre Civile espagnole, de la migration de certains de leur ancêtre en Russie puis de leur retour au pays. Ce rapprochement se fait justement par une fratrie d’espagnols élevés en Russie, Olmo (Joaquin Furiel) et Victor (Daniel Grao) qui seront pour eux une parenté plus ou moins explicite.

Medem croise les lieux, temporalités et destinées par le montage, la notion de point vue avec quelques idées visuelles intéressante où les personnages du présent observent dans une même image, un même décor, les actes passés des protagonistes qu’ils dépeignent – principalement cette maison de campagne. Cette densité du récit donne cependant plus dans le soap opera que le romanesque dont est capable Medem et les quelques fulgurances sont noyés dans un ensemble qui nous perd et ennuie. Passé familial coupable, amours contrariés, jeu du destin, on retrouve tout ce que l’on a pu apprécier auparavant chez le réalisateur mais dans une boursouflure pénible à suivre. 

La patine numérique semble également avoir fait beaucoup de mal au style terreux de Medem qui ancrait les envols onirique dans un entre-deux onirique et psychanalytique, notamment l’esthétique publicitaire des scènes d’amour (un comble pour le cinéaste du désir qu’est Medem) qu’il avait su éviter dans Room in Rome notamment. Le sacrifice final d’un personnage prête ainsi plus au rire qu’à l’émotion alors que les écarts les plus extravagants s’acceptaient sans ambages dans les œuvres précédentes. On décroche assez vite devant ce charivari lourdement feuilletonesque seulement sauvé par des prestations convaincantes (Joaquin Furiel remarquable d’intensité et qui porte le protagoniste le plus intéressant). Un sévère ratage qu’on espère être un incident plutôt qu’un vrai déclin pour Julio Medem. 

Disponible sur Netflix 


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