Otto et Ana se connaissent depuis leur
plus tendre enfance. Ils s’en remettent au hasard pour se retrouver au
cercle polaire en Laponie étant adultes.
Poétique, envoutant et rêveur, Julio Medem signe un vrai bijou romantique avec
Les Amants du cercle polaire.
Ses thèmes sur l'amour, la destinée et le hasard n'ont jamais été plus
prononcés que dans l'intrigue flottante de ce film. La scène de
rencontre des deux héros annonce déjà la symbolique au cœur du récit.
Otto et Ana se connaissent depuis l'enfance, leur route s'étant croisée
avant même qu'ils connaissent l'identité l'un de l'autre. Voulant
rattraper un ballon échappé à la sortie de l'école, Otto cavale après et
se retrouve à partager la course d'Ana qui s'écroule bientôt devant
lui. Ils ne partageront là qu'un regard intense mais leur destin se
trouve dès lors liés. Ils ne couraient pas dans la même direction pour
la même raison, lui pour rattraper un ballon, elle pour fuir son chagrin
et celui de sa mère suite à la mort de son père. Après cette rencontre
leur vie va suivre une ligne commune, un cercle qui malgré les aléas de
la vie et les épreuves va les amener à se retrouver constamment jusqu'à
un final improbable en Laponie.
Medem fait de cet élément le moteur de sa narration où l'on suivra le
point de vue d'Otto et Ana sur les même évènements (le ton adoptant leur personnalités, tourmenté et passionné Otto, doux et rêveur pour le point de vue d'Ana) puis lorsqu'ils
seront éloignés physique sur une même période de leur existence commune
de tout manière constamment amenée à se rejoindre. Une magie s'instaure
alors dans cet amour naissant avec des retrouvailles attendues mais
toujours surprenante pour les protagonistes et le spectateur, donnant
quelques-unes des plus belles scènes du film. On pense à ce moment où
enfant, Otto attends Ana à la sortie de l'école pour lui déclarer sa
flamme, qu'elle n'arrive pas et que dépité en pénétrant dans la voiture
de son père il la découvre installée là, l'attendant et souriante.
Autre
moment somptueux, Otto se rendant de nuit dans la chambre d'Ana suite à
son invitation, dépité de la trouver endormie retourne dans la sienne
et la trouve l'attendant dans son lit, le tout filmé avec une grâce
inouïe par Medem. Avec peu de mots le réalisateur tisse la complicité et
le monde intérieur de ces amoureux, l'extérieur n'existant pas (tout ce
qui est lié à leur vie personnelle/professionnelle sorti de leur
relation est traité en ellipse) où se pliant à eux tel la relation
amoureuse entre leur parent lorsqu'ils sont enfants. Le montage tout en
restant relativement linéaire multiplie les inserts passés et futurs,
réels ou fantasmés ainsi que les symboles et détails étrange mais qui
trouveront leur explications au moment opportun. Les allusions à cet éternel recommencement sont contenus jusque dans les prénoms des protagonistes formant un palindrome puisque se répétant même tournés à l'envers.
Le film est incroyablement riche dans les thèmes explorés. L'ensemble
est autant ancré dans le réel que le fantasme dans les bonheur et
traumas de ses héros. On aborde ainsi quasiment le conte, le deuil et la
séparation se mêle à l'œdipe (Ana et Otto comblant ensemble la perte
et/ou l'absence d'un de leur parents) avec un soupçon de trouble
coupable puisque les héros élevés comme frères et sœurs se dissimulent
pour assouvir leur passion.
Il y a du Douglas Sirk dans la manière qu'à
Medem de faire surgir la puissance mélodramatique de façon improbable
(Otto qui devient pilote d'avion avec la facilité d'un Rock Hudson médecin dans
Le Secret Magnifique, le saut en parachute, l'apparition d'un cerf façon
Tout ce que le ciel permet)
sans jamais tomber dans le ridicule, on est dans l'onirisme le plus
prononcé où les évènements défilent comme dans un rêve seul importe les
prochaines retrouvailles.
Après avoir été les jouets du hasard et du destin tout au long du récit,
nos amants vont tester leur amour en provoquant ce destin à leur tour
pour une rencontre impossible au cercle polaire en Laponie. Là encore le
lieu n'est pas innocent puisque cela arrive au moment où inversement à
la nuit polaire où l'obscurité est continue en hiver, la rencontre se
fera en été où le soleil et les journées sont continus et formant donc
un cercle à la manière de l'amour éternel d’Otto et Ana. Julio Medem
immortalise cela avec un terrible rebondissement final et une idée de
cinéma sublime qui fige cette romance de la plus belle des
façons. Grand mélo contemporain.
Sorti en dvd zone 2 français chez Studio Canal
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire