Dans sa première partie, le film raconte l'épisode biblique de la captivité des Hébreux en Égypte à l)'époque du pharaon Ramsès II (Charles de Rochefort), leur exode vers la Terre Promise, la traversée de la Mer Rouge, Moïse (Theodore Roberts) recevant les tables des Dix Commandements.
La seconde partie se
situe dans les années 1920. Elle relate l'histoire des deux fils d'une femme
bigote (Edythe Chapman), l'un mauvais garçon (Rod La Roque), l'autre sérieux
(Richard Dix), qui convoitent tous deux la même jeune femme.
Si l’on ne retient aujourd’hui de Cecil B. DeMille que l’image
du réalisateur de monumentales fresques religieuses, il n’en fut pas toujours
ainsi. Sa première incursion dans le gigantisme fut un échec commercial avec son
Jeanne d’Arc réalisé en 1917. DeMille rencontre ses premiers succès au début des
années 20 avec des comédies de mœurs caustiques et irrévérencieuses annonçant
la screwball comedy des années 30 et dont l’audace est à peine atténuée par la
morale finale comme Le Détour (1922)
ou Le Réquisitoire (1922).
Le DeMille
pieux et adepte du gigantisme nait donc réellement avec Les Dix Commandements, première
version muette de l'épopée biblique qu’il remakera en 1956 dans son film le
plus célèbre. Bien différente de la seconde version essentiellement consacré au
destin de Moïse, DeMille adopte ici une construction à la manière de Griffith
dans Intolérance (1916) qui superpose
les époques. La partie péplum constitue en fait un long prologue de 48 minutes
avant d'embrayer sur un récit contemporain où après avoir assisté à
leur édification pleine de bruits et de fureur on verra la difficile application
de ses des Dix Commandements à l'ère moderne.
Dans un premier temps on assiste donc à l'histoire bien
connue de Moïse dans un format plus resserré que la version de 56 à laquelle il
fallait presque 4 heures pour tout raconter. Les situations défilent trop vite, on
s'attache peu aux personnages qui ne dépasse jamais leur archétype biblique (notamment
le Moïse très théâtral incarné par Theodore Roberts) et l’ensemble constitue
surtout un beau livre d'images où DeMille étale sa foi avec quasiment tous les
intertitres étant issus du livre de l'Exode.
Cependant on en prend plein les
yeux et niveau gigantisme cette version n'a rien à envier à celle de 56 avec
ses palais égyptien monumentaux, les figurants à pertes de vue et les fameux
morceaux de bravoures que sont la traversée de la mer rouge (effets spéciaux
épatants pour l'époque) ou l'écriture des tables de la loi, le tout débordants
d'idées.
Le côté sadique et libidineux de DeMille fonctionne à plein aussi
entre les châtiments infligés aux israélites et surtout la scène du veau d'or
tout aussi gratinée dans les deux versions avec orgies, beuveries et ambiance
païenne offrant de saisissant tableaux. C'est aussi le seul moment où DeMille
s'écarte du texte biblique en forçant le trait et infligeant la lèpre à une des
pècheresses, fait qui se répercutera dans la partie moderne.
On passe ensuite à la partie moderne avec la rivalité entre
deux frères faisant un parallèle avec Moïse et Ramsès. L'un est un athée bien
décidé à transgresser tous les commandements pour faire fortune tandis que l'autre
pieux et réfléchi en reste à sa modeste condition. C’est un moment de cinéma assez étonnant, le
ridicule le plus désopilant côtoyant de pur moment de grâce.
La mère des deux
frères, vraie grenouille de bénitier sortant sa bible énorme et assénant les
commandements à tout bout de champs amène pas mal de situations comiques
illustrant le talent de DeMille dans la comédie à l'époque et le montrant
capable de second degré en dépit de sa réputation. Les personnages sont bien
plus intéressants avec ces deux frères se disputant l'amour d'une femme et
lorsque la tragédie surgit à cause de la cupidité Dan (Rod La Rocque) le non
croyant, l'émotion fonctionne vraiment, pure et intense.
Si DeMille parvient enfin à nous impliquer
émotionnellement dans cet épisode moderne, il a par contre la main bien lourde
dans la diatribe religieuse. La lente et interminable déchéance de John où
lui est rappelé chaque commandements qu'il a enfreint tout au long du film est
des plus pénibles, provoquant presque l'effet inverse puisque même dans ces errements le personnages a au moins suivi une voie individuelle et autonome. Malgré l’indéniable puissance visuelle, on peut donc
préférer la seconde version qui sans
être moins pieuse savait y mêler une dimension épique et grandiose parlant à
tous. Il semble d’ailleurs que DeMille ait retenu la leçon après cette première
tentative puisque toutes ses futures fresques religieuses sauront apporter un
piquant supplémentaire bienvenu que ce soit la luxure Pré-code du Signe de la croix (mais aussi Cléopâtre - 1934) ou l’histoire d’amour de Samson et
Dalila (1949).
Sorti en dvd zone 2 français et bluray en édition collector comprenant également la version de 1956.
Ouh, ça donne envie, ça ! C'est facilement trouvable ? Merci pour ce billet.. :-D
RépondreSupprimerOui il suffit de prendre l'édition collector des Dix Commandements de 1956, cette version muette y est incluse. J'avais pu la découvrir en salle il y a quelques années à l'occasion de la rétro DeMille à la cinémathèque française avec accompagnement musicale ça faisait son petit effet.
RépondreSupprimerC'est tout aussi spectaculaire et impressionnant que la seconde version même si je préfère cette dernière.