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samedi 18 octobre 2014

Revenge - Tony Scott (1990)

Jay Cochran est un ancien pilote de chasse. Il est invité à Mexico par son vieil ami Tiburon, puissant propriétaire terrien et peu recommandable. Jay tombe alors amoureux de la très belle Miryea, la jeune épouse de ce dernier. La vengeance de l'époux trahi sera terrible...

Tony Scott avait réalisé des débuts tonitruant avec Les Prédateurs (1983), une des plus belles illustrations contemporaine du mythe du vampire. L'insuccès de ce galop d'essai avait malheureusement contraint le réalisateur à se perdre dans des produits commerciaux où l'on ne reconnaissait plus l'auteur de Hungers avec Top Gun (1986 et qui reste néanmoins un petit plaisir coupable) et Le Flic de Beverly Hills 2 (1987). Il faudrait attendre Revenge pour retrouver le romantisme noir de Tony Scott qui s'approprie là un matériau très disputé. Le film adapte la nouvelle éponyme de Jim Harrison parue en 1979 dans le recueil Legends of the fall (et contenant donc aussi Légendes d'automne adapté plus tard dans les 90's avec Brad Pitt) et que se disputèrent des cinéastes aussi prestigieux que Sydney Pollack, Jonathan Demme ou John Huston. Ce dernier s'opposera d'ailleurs au choix de Kevin Costner convoitant le rôle mais la star au sortir du succès des Incorruptibles possède assez de pouvoir pour le produire lui-même. Cela aurait même pu être la première réalisation de Costner avant Danse avec les loups mais les producteurs calmeront ses ardeurs et feront appel à Tony Scott qui signe là un de ses meilleurs films.

Jay Cochran (Kevin Costner) ancien pilote fraîchement retraité de l'armée décide de rendre visite au Mexique à son vieil ami Tiburon Mendez (Anthony Quinn), homme puissant menant ses affaires d'une main de fer. Malgré leur amitié solide, l'entourage douteux, les ambitions et agissements peu recommandables de Tiburon vont progressivement créer un fossé entre les deux amis. Cette dichotomie entre la chaleur des relations privées et la froideur des affaires, Miryea (Madeleine Stowe) la jeune épouse de Mendez la connaît bien et c'est ce qui va la rapprocher de Jay avec lequel elle va entamer une liaison torride. Lorsque Tiburon le découvrira, sa réaction sera terrible et les entraînera tous dans une irréversible spirale de violence.

Dès les premiers instants du film, la photo de Jeffrey L. Kimball confère à ce Mexique une imagerie ensoleillée oscillant entre la chaleur immaculée du paradis et le rougeoiement de l'enfer. Un film comme La Horde Sauvage était à sa manière une illustration outrancière de toute l'aura mythologique et tapageuse que véhicule le Mexique dans la culture populaire. Tony Scott s'y essaie également à sa manière plus intimiste avec fce olklore local s'exprimant pour le meilleur et pour le pire. Politiciens corrompus, moindre contrariété, regard ou mot de travers conclut à coups de revolver. L'américain plus mesuré que joue Kevin Costner ne trouve bien sûr pas sa place dans ce monde d'excès, mais va pourtant être contaminé par cette fièvre par son attirance fiévreuse pour Miryea.

Pour se fondre dans ces lieux, il doit à son tour basculer dans l'irrationnel. Tony Scott est avare de longs dialogues inutiles et instaure une tension sexuelle intenable pour ses deux protagonistes qui ont finalement peu à se dire, les regards, silences et raideur corporels trahissant leur émois mutuels. Lorsqu'ils s'abandonnent enfin, c'est une libération que Scott traduit par des scènes très osées pour ce type de productions où Costner et Stowe vont loin dans le rapprochement. Le drame est en marche au cœur même de ces moments torrides où les personnages se savent perdus sans pouvoir s'arrêter, à l'image de Costner giflant sa partenaire avant de l'embrasser de plus belle.

Pourtant comme un dialogue le soulignera, dans ce monde de toutes les outrances, un adultère ne se règlera que dans le sang et les larmes. Anthony Quinn offre à ce titre une performance captivante. Meurtri par cette double trahison, il semble comme se forcer à entamer le cycle de violence qu'on attend de lui en retour et chacun de ses actes les plus révoltants semblent ainsi imprégnés de cette douleur contenue. Alors qu'il ne souhaiterait que se réfugier dans sa peine, il se doit de montrer sa nature impitoyable à ceux qui l'entoure car c'est ainsi que fonctionne son monde.

Chacun aura cédé à ses passions avec excès et si l'on s'attache forcément plus au couple Jay/Miryea, il n'y aura pas de vrais héros ni vainqueur dans ce Revenge dont le titre relève finalement d'une certaine ironie. Après le châtiment brutal et insoutenable infligé par Tiburon, on alternera ainsi entre les morts intérieures et en sursis de chacun des trois protagonistes. Jay remonte rageusement la piste de Miryea dans un Mexique truffé de danger mais l'absence de crescendo dramatique, les acolytes accessoires (Miguel Ferrer et un tout jeune John Leguizamo) et la violence sèche montre bien que l'enjeu ne reposera pas sur sa vengeance. L'ambiance western est bien plus crépusculaire et désenchantée que conquérante.

Tiburon lorsqu'il recroisera sa route lui demandera simplement de s'excuser de sa trahison et Jay lucide s'exécutera. Les compisitions de plans somptueuses de Scott capturent autant la sauvagerie que la beauté des paysage de ce Mexique qui semble comme consumer les âmes solitaires qui le traversent, tel ce cow-boy texan (James Gammon) vendeur de chevaux et compagnon de route éphémère mourant en silence de ses abus.

Miryea apparait comme la figure la plus tragique du film, défigurée droguée et souillée, ne survivant que dans l'attente de revoir Jay dans de magnifique retrouvailles finale où la superbe musique de Jack Nitzsche traduit autant le romantisme que la tragédie inéluctable.

Jay aura navigué entre la fureur (Tiburon) et la paix intérieure que peuvent susciter ces terres (la longue scène de convalescence avec Tomás Milián dont on découvrira également le drame personnel avec une belle retenue) et la conclusion semble nous montrer qu'il est sans doute prêt à pencher vers la seconde. Une des grandes réussites de Tony Scott, saluée avec le temps notamment par un Quentin Tarantino qui quand il le verra transposer son script inaugural de True Romance y attendra plus le réalisateur de Revenge que celui de Top Gun.

 Sorti en dvd zone 2 français chez Sony et un director"s cut plus court existe également en bluray

2 commentaires:

  1. On peut préférer "Apportez-moi la tête d'Alfredo Garcia", avec son Mexique de cauchemar et sa bouleversante histoire d'amour maudit ; Nitzsche brilla aussi chez Forman, Carpenter ("Starman", pour rester dans le registre sentimental) ou Friedkin ; quant à Scott, quoi que l'on pense de sa filmographie (ou de celle de son frère), il ne méritait certes pas les applaudissements critiques injurieux qui accompagnèrent son suicide...

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    1. Ce n'est pas tout à fait le même esprit que le Peckinpah je trouve qui est un film désespéré qui vous enfonce dès le départ avec ses personnages usés et son atmosphère sordide. Là ce que j'ai trouvé intéressant c'est de vraiment installer tout les codes d'un film de genre, de western et des les désamorcer complètement tout en en gardant la construction. Le Peckinpah on est cloué au sol dès le départ et il tourne volontairement le dos à une construction héroïque qu'il connaît bien, Scott la garde mais pour en faire autre chose (curieux de lire la nouvelle de Harrison après coup d'ailleurs). Scott a un peu mélangé les Mexique de la Horde Sauvage et d'Alfredo Garcia dans sa vision en fait.

      Pour Tony Scott j'ai le souvenir surtout d'un texte honteux où le journaliste disait qu'il s'était suicidé car il faisait un complexe par rapport à son frère. Sachant que sur les 10/15 dernières années la filmo de Tony est bien plus intéressante (il n'y a qu'à comparer leur deux films d'espionnages commun de l'époque avec un Spy Games autrement plus prenant que le Mensonge d'état de Ridley) que celle de Ridley qui n'a jamais su faire ne serait ce qu'aussi bien que ses quatres premier films quand Tony n'a cesser de s'améliorer.

      J'aime beaucoup Nitzsche aussi le score de Starman est fabuleux, et hors cinéma un grand producteur aussi : Mink Deville, ingénieur de Phil Spector...

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