Un jeune comte qui se prétend d'origine russe et rentier, en
villégiature sur les bords d'un lac (le lieu n'est pas précisé, mais le
tournage eut lieu à Évian), tombe amoureux d'une sublime jeune femme,
Yvonne, qui est accompagnée de son dogue allemand Oswald et d'un vieil
homme excentrique, le docteur Meinthe. Peu à peu, le comte va découvrir
la singularité de ces êtres, et recevoir en particulier bien des mises
en garde au sujet de la jeune femme qu'il souhaite épouser et emmener en
Amérique pour y faire éclater son talent d'actrice. L'homosexualité du
vieux médecin, auto surnommé la reine des Belges, est également
plusieurs fois évoquée, toujours sous forme insultante.
Le Parfum d'Yvonne s'inscrit dans le registre dramatique initié par Patrice Leconte à partir de Tandem (1987) et surtout Monsieur Hire (1989), tout en le lançant sur une veine romanesque rétro qui perdurera dans La Veuve de Saint-Pierre (2000), Rue des plaisirs (2002) ou le plus récent Une promesse (2014). Adapté du roman Villa triste
de Patrick Modiano, le film dans sa narration dresse un constant
parallèle entre apaisement et agitation. C'est d'abord dans le contexte
initial, une villégiature de province qui n'a que faire des tumultes du
pays en cette année 1958 (conscription, Guerre d'Algérie, attentats),
baignée dans sa langueur ensoleillée.
C'est également le cas dans la
temporalité où un présent sombre et torturé annonce la tournure
dramatique des flashbacks lumineux qui dominent le récit. Patrice
Leconte reste très évasif dans ces enjeux et la caractérisation de ses
personnages, l'émotion se ressentant au jour le jour à la manière du
personnage mutin et sensuel d'Yvonne (Sandra Majani). Les raisons qui
mènent Victor (Hippolyte Girardot) là ainsi que son passé restent
nébuleux, tout comme les secrets que dissimulent la bonhomie du docteur
Meinthe (Jean-Pierre Marielle). Patrice Leconte nous plonge dans une
atmosphère tour à tour solaire et torturée, romantique et pesante, le
tout porté par des somptueuses compositions de plan (la balade en bateau
d'Yvonne et Victor) et une photo stylisée d'Edouardo Serra.
Le
problème est que tout cela finit par tourner à vide et sonner faux, à
cause de la fadeur de l'héroïne. Sandra Majani n'existe que par sa
photogénie mais rien dans l'attitude, la diction ou le mystère ne
parviennent à sortir son personnage de sa dimension quelconque. La
sensualité fonctionne sur un aspect plus publicitaire qu'autre chose
(Sandra Majani étant déshabillée plus qu'à son tour tout au long du
film), l'actrice n'ayant ni le glamour insaisissable nous la sensualité
plus ravageuse que pouvait dégager une Pauline Laffont dans L'été en pente douce
(1987).
Sans enjeu romantique consistant le drame ne fonctionne pas et
toutes les idées formelles de Patrice Leconte tombent à plat (le très
bon plan revisitant longuement en pleine mer le souffle sous la robe de Sept ans de réflexion).
Une des dernières scènes avec Richard Bohringer en oncle d'Yvonne fait
bien plus exister celle-ci par l'entremise d'un autre que par sa propre
présence à l'écran. Peut-être aurait-il fallu tenir le parti pris de
cette scène et ne faire d'Yvonne qu'une incarnation lointaine faisant
tourner la tête des autres protagonistes. L'hésitation entre la nature
évanescente et plus ordinaire ne fonctionne pas en tout cas et rend le
drame final moins puissant qu'attendu malgré de remarquables Hippolyte
Girardot et Jean-Pierre Marielle.
Sorti en dvd zone 2 français chez Aventi
Extrait
[Film] The Price We Pay, de Ryûhei Kitamura (2022)
Il y a 5 heures
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