Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mardi 11 juillet 2017

The Doom Generation - Gregg Araki (1995)


Jordan et Amy, deux ados punks et rebelles du fin fond des États-Unis, rencontrent au hasard d'une fête bien arrosée Xavier, un étrange individu qui va alors les impliquer dans une série de meurtres sanglants alors que des événements étranges vont les poursuivre, les plongeant petit à petit dans un cauchemar psychédélique alors que le jeune couple se transforme en ménage à trois.

The Doom Generation est le deuxième volet de la « trilogie de l’apocalypse » de Gregg Araki, suivant Totally Fucked Up (1993) et précédant Nowhere (1997). On retrouve donc là ce mélange d’hédonisme adolescent, de sexe et de violence tapageuse ici dans une même approche schizophrène typique d’Araki. Le scénario reprend ainsi le motif classique des adolescents criminels en fuite vu dans Les Amants de la nuit (1949) de Nicholas Ray ou encore Bonnie and Clyde (1967) d’Arthur Penn. Araki renoue aussi avec le croisement d’innocence juvénile qui caractérisait les personnages et une violence qui les dépasse. Le couple d’ado punk Jordan (James Duvall) et Amy (Rose McGowan) apparaît ainsi à la fois libéré dans une ouverture tapageuse en boite de nuit mais finalement aussi timoré, la peur du sida étant un prétexte (puisque tous deux sont encore vierges) refrénant leurs ardeurs. Lorsque le tourmenté Xavier (Jonathan Schaech) vient s’immiscer parmi eux, son influence illustre cette idée de libération et de tumulte.

La sexualité se libère pour Jordan et Amy passant enfin à l’acte, pour s’émanciper de la norme avec le détonant ménage à trois qui va se constituer. Seulement cette liberté va se faire au prix d’une perte de repère dans la violence par l’entremise de Xavier, véritable agent du chaos introduit par une scène de rixe et qui provoque une bascule nihiliste de plus en plus prégnante par ses débordements sanglants et grotesque. Dès lors le cadre du récit devient de plus en plus stylisé et irréel (le déco différentes chambres de motels parcourues constituant une œuvre en soit), que ce soit un rattachement familial rapidement expédié ou des rencontres de plus en plus folles et excentriques. La bande-son va dans ce sens, les plages planantes de Slowdive ou Cocteau Twins accompagnant les visions contemplatives de ce road movie tandis qu’un rock plus nerveux accompagne les éclairs de violence. 

Cette dichotomie devient plus incertaine au fil de la perte de repères, notamment dans les scènes de sexe où la douce candeur de Jordan alterne avec l’agressivité torride de Xavier. Gregg Araki l’illustre par sa mise en scène de ces instants, les plans fixes et les couleurs douces des étreintes Jordan/Amy étant contredites par le montage chaotique, la furie rock’n’roll et les pratiques audacieuses (dont un doigt placé à un endroit singulier de l’anatomie du partenaire) des coïts Xavier/Amy. Jordan par son innocence et sa nature androgyne est un élément d’équilibre, Xavier par sa bisexualité et tempérament brutal celui de l’ambiguïté et Amy celui de la confusion. C’est finalement par le désir qu’elle suscite au sein du trio mais également face au monde extérieur (des ex amants imaginaire de plus en plus menaçants semblant la reconnaître et la poursuivant de leurs assiduités) changeant et de plus en plus cauchemardesque qu’elle bouleverse la tonalité d’ensemble. Elle participe à la promiscuité gay de Jordan et Xavier tout en étant un pur objet de désir magnifiquement incarné par une incandescente Rose McGowan. 

Toute cette confusion violence/douceur (l’indifférence face aux tueries est contredite par la vive émotion de la mort d’un chien), ombres /lumières est parfaitement résumée dans la dernière partie du film. Le triolisme et l’homosexualité s’assument dans un tourbillon de râles, effets stroboscopiques et fondus enchaînés avant que la barbarie vienne sauvagement interrompre la fragile harmonie. Le débordement final halluciné n’a pas d’ancrage social (le machisme autant qu’une homosexualité tordue guident les agresseurs) si ce n’est la folie latente d’un monde régressif. Le lendemain du cauchemar, le traumatisme peut se cacher derrière des lunettes noires et l’aventure se poursuivre sur une route baignée par le soleil. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Lumière 

 

3 commentaires:

  1. Super film avec Nowhere, pas vu le premier ni les suivants d'Araki, je ne sais pas pourquoi, je suis bloquée sur ces deux-là... Très bonne critique ! Merci...

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  2. En indispensable dans les suivants il faut voir le très beau Mysterious Skin qui a révélé Joseph Gordon-Levitt ;-)

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  3. Ah mais oui, j'avais complètement zappé que ce film était d'Araki, il est très beau, en effet !

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