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vendredi 22 juin 2018

Les Épices de la passion - Como agua para chocolate, Alfonso Arau (1992)


Au début du XXe pendant la révolution mexicaine, Tita, une jeune femme est tombée amoureuse de Pedro. Mais la tradition lui empêche de partir épouser le jeune homme, tant que sa mère est vivante. Elle exprime donc ses sentiments à travers la préparation de plats épicés.

Les Épices de la passion fut un grand succès critique et commercial qui contribua à populariser le cinéma mexicain à travers le monde. Le film adapte le roman Chocolat Amer de Laura Esquivel, grand succès en librairie s’inscrivant dans le courant du réalisme magique au sein de la littérature sud-américaine - le plus célèbre étant bien sûr Gabriel Garcia Marquez. L’originalité du livre était d’user de la cuisine pour intégrer les éléments fantastique et surréaliste du Réalisme Magique à un magnifique récit romanesque et féministe. La confection des plats dépeint dans le détail et leurs effets avaient un vrai rôle narratif et dramatique rythmant les bonheurs et les drames de son héroïne et de sa famille. C’est Alfonso Arau, époux de Laura Esquivel, qui va s’attaquer à l’adaptation attendue sur un scénario de celle-ci.

Le film est d’une fidélité quasi littérale au roman dont il reprend la construction et les évènements à la virgule près, si ce n’est quelques libertés chronologiques. Cela suffit-il à en faire une bonne transposition ? Pas vraiment. Adapter c’est faire des choix tranchés où est traduit l’esprit de l’œuvre originale mais pas en faire une illustration servile mais tiède. L’histoire dépeint sous la révolution mexicaine, l’entrave de la jeune Tita (Lumi Cavazos) condamnée au célibat à cause de la tradition familiale qui oblige la cadette à s’occuper de sa mère Mama Elena (Regina Torne) jusqu’à sa mort. 

Lorsque son fiancé Pedro (Marco Leonardi) pour rester proche d’elle va épouser sa sœur Rosaura (Yareli Azizmendi). Dès lors toujours rongé par l’amour et le désir, le seul moyen d’exprimer leurs sentiments seront les plats préparés avec passion par Tita. D’un point de vue narratif, Alfonso Arau est assez respectueux mais sa mise en scène reste péniblement illustrative quand elle devrait être sensitive. Le livre faisait passer un sentiment quasi olfactif pour exprimer l’émotion, l’odeur des condiments se ressentait dans les descriptions de Laura Esquivel et la moiteur du désir contenu émanait magnifiquement de son écriture.

Alfonso Arau offre un joli livre d’images mais totalement inodore et incolore. Les passages les plus extravagants du livre sont bien là, mais la platitude de leur illustration dessert totalement l’ensemble. On a notamment cette idée folle d’un plat préparé à partir de pétale de rose qui va enflammer les sens des convives dont Gertrudis sœur de Tita qui fera jaillir des flammes de son corps à vif durant une douche peu salvatrice. Il aura fallu une mise en scène baroque et décomplexée osant tutoyer le ridicule pour que cela fonctionne mais en l’état on reste sur notre faim – si l’on ose dire. Sans connaître l’ouvrage on peut éventuellement y voir une certaine poésie mais même dans ce cas une certaine démesure sud-américaine manque. 

L’aura rêvée du film tient plus à la magnifique photo d’Emmanuel Lubezki (dans un de ses premiers travaux au cinéma) qu’à la platitude ampoulée de la réalisation d’Alfonso Arau. On est plus proche de la tele-novela haut de gamme que du romanesque sensoriel et mystique que le film aurait pu être. Le dernier défaut (mais peut-être que c’est la partialité du lecteur qui s’est fait son idée) serait l’interprétation inégale. Si Lumi Cavazos dégage la fragilité et sensualité attendue et que Regina Torne est parfaite en mère tyrannique, Marco Leonardi campe un bien tiède Pedro loin de la présence virile et machiste du roman. 

Cette tiédeur ampoule du coup toute les manifestations surnaturelles du roman, la voix-off déclamant absolument tous les phénomènes et émotions que la mise en scène aurait dû exprimer. Les scènes de cuisine sont d’une rare platitude et très peu nombreuses finalement, mais il aurait suffi de suffisamment mettre en valeur celles filmées pour que l’idée prenne vie. L’originalité du postulat et le dépaysement suffiront néanmoins à faire le succès du film pas désagréable au demeurant. C’est décevant néanmoins et une vraie belle adaptation reste à faire. 

Sorti en dvd zone 2 français et bluray che Sony

 

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