Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

Pages

mardi 29 juin 2021

Guet-apens - Conspirator, Victor Saville (1949)

Pendant la Guerre froide à Londres, Melinda Greyton, une jeune Américaine, épouse Michael Curragh, un major de l'armée britannique, qui se révèle en fait être un espion travaillant pour les Soviétiques.

Conspirator est un film d'espionnage qui offre une sorte de variation du Soupçon d'Alfred Hitchcock avec son climat de paranoïa conjugale. On pourrait même penser à Rebecca lorsque cette tension conjugale s'orne d'une esthétique expressionniste à travers la mise en scène de Victor Saville. C'est l'innocence lumineuse de Melinda (Elizabeth Taylor) qui va se confronter à l'ambiguïté ténébreuse du major Curragh (Robert Taylor) et l'atmosphère du film oscille constamment entre les deux. La fébrilité des premiers émois amoureux s'expriment dans les séquences montrant Melinda émerveillée par l'apparition de Curragh lors de son bal de débutante puis quand elle est dans l'attente des retrouvailles, d'un appel de sa part.

Curragh voit cette romance à la fois comme un bienfait et un risque à ses activités d'espion à la solde des soviétiques, et Robert Taylor passe de l'amant soucieux à l'espion glacial avec une saisissante ambiguïté qui rappelle son rôle dans Lame de fond de Vincente Minnelli. L'attrait et le danger qu'il représente repose sur cet aspect et Victor Saville transforme littéralement l'ambiance du récit selon l'humeur et l'objectif de Curragh. On passe de délicieuse séquences amoureuses pastorales à des traversées d'un Londres inquiétants que traverse incognito Curragh, et le travail de Freddie Young à la photo et Alfred Junge aux décors apporte une stylisation qui exacerbe ce ressenti.

On pourrait initialement trouver la prestation d'Elizabeth Taylor (âgée de 16 ans face à Robert Taylor en fin de trentaine ce qui fit controverse) trop candide et naïve mais cela accompagne justement cette volonté d'exprimer cette dualité (dont est dénuée la très opaque et uniforme incarnation des agents soviétiques pour figurer le dogme idéologique implacable face au sentiments) par les extrêmes. Lorsqu'elle va démasquer la duplicité de son époux, son interprétation gagne superbement en maturité, cette traitrise la faisant basculer dans l'âge adulte. A l'inverse la détermination froide de Curragh vacille, la lumière de Melinda brouille son monde de faux-semblants quant à l'inverse les ténèbres troublent la candeur de cette dernière. La tension fonctionne particulièrement bien dans les non-dits, les confrontations sourdes qui rendent le foyer irrespirable. Les sentiments contradictoires du couple culminent ainsi en rendant menaçante une campagne jusque-là bienveillante à travers une scène de chasse au petit matin particulièrement oppressante. C'est donc plutôt réussi et prenant dans l'ensemble, sans égaler les références hitchcockiennes évoquées plus haut (avec une scène lorgnant explicitement sur le "verre de lait" de Soupçons).
 

Sorti en dvd zone 1 chez MGM 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire