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mercredi 5 janvier 2022

Dracula - Todd Browning (1931)

Renfield, chargé de conclure une transaction immobilière avec le comte Dracula, se rend dans son château des Carpates, où l'aristocrate, qui s'avère être un vampire, va l'hypnotiser pour le mettre sous ses ordres. Débarqué avec Renfield en Angleterre, Dracula ne tarde pas à créer de nouveaux semblables dans la société locale en commençant par la jeune Lucy. Mais la présence du docteur Van Helsing va contrarier ses plans.

Dracula est la première adaptation cinématographique officielle et parlante (puisque le Nosferatu de Murnau l’a précédé en 1922) du célèbre roman de Bram Stoker, et inaugure également l’âge d’or des Universal Monsters. Plus précisément il s’agit de l’adaptation de la pièce de de Hamilton Deane et John L. Balderston d’après le roman et jouée en 1924. Cette origine théâtrale se ressent dans les qualités et les défauts du film, un peu figé. L’introduction est tout simplement stupéfiante tant elle met en place sous une forme brute (même si Murnau avait posé les bases) tous les codes d’une imagerie gothique amenée à être maintes fois reprise. 

Atmosphère brumeuse baignée de peur et de superstition, vignette emblématique avec ce matte-painting du château surplombant les Carpathes et surtout une saisissante première apparition de Dracula (Bela Lugosi). Tod Browning instaure un croisement de naturalisme et de stylisation (renforcé par l’absence de musique) à travers une esthétique macabre. Les inserts s’attardent sur les détails les plus sordides (les rats courant parmi les ossements) tandis que Dracula traverse l’écran dans une allure aussi spectrale (la fumée que laissent ses pas) que théâtrale.

Le film porte encore indéniablement l’héritage du muet par sa manière de souligner une émotion ou un élément d’intrigue par l’image, que ce soit un objet (la croix de Renfield) ou les pensées d’un personnage tels ces gros plans sur le visage de Dracula assombri progressivement par la photo de Karl Freund pour exprimer ses funestes projets. Browning allie avec brio une certaine austérité à quelques envolées poétiques qui renforcent l’étrangeté des situations, notamment lorsque les trois goules dans leurs robes blanches vaporeuses accourent vers le corps inanimé de Renfield (qui endosse le rôle de Jonathan Harker dans le roman). 

L’influence de l’expressionnisme allemand est manifeste et donne à l’horreur une puissance évocatrice marquante comme lorsque les marins victimes des assauts de Dracula nous apparaissent sous formes d’ombres désarticulées. Bela Lugosi (qui remplace un Lone Chaney prévu mais prématurément décédé) apporte une dimension aristocratique et un sentiment « d’ailleurs », littéral avec son accent appuyé et plus marqué dans son teint blafard, ses regards carnassiers. Todd Browning dans sa mise en scène semble comme le faire évoluer à une vitesse différente des autres protagonistes, tout semble se figer à chacune de ses apparitions, le décor comme ses interlocuteurs sous son emprise par l’autorité ou le charme feint.

Todd Browning assume avec une croyance et un premier degré bienvenu tout le folklore gothique associé aux vampires et qui possède là la fraîcheur du pionnier. Les chauves-souris, les miroirs sans reflet, les crucifix, tout (ne manque que l’ail) s’agence avec une évidence parfaite pour véritable faire découvrir la figure du vampire et instaurer la peur par strates. On regrettera juste une certaine lenteur, un côté un peu figé (que n’auront pas par exemple les Frankenstein de James Whale) et un casting manquant de charisme. Todd Browning fera plus dérangeant par la suite, ce qui n’enlève rien aux qualités de ce film fondateur. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Universal

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