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mardi 31 janvier 2023

March Comes in Like a Lion - Sangatsu no raion, Hitoshi Yazaki (1991)


 À Tokyo, Ice ramène son frère aîné amnésique Haruo de l'hôpital pour s'occuper de lui. Il hésite à y aller jusqu'à ce qu'Ice lui dise qu'elle est son amante. Il la suit. Combien de temps avant que sa mémoire ne revienne ?

March Comes in Like a Lion est le second film tardif du réalisateur Hitoshi Yazaki après un inaugural Afternoon breezes (1981) où il explorait déjà le thème des amours refoulés et coupables. Il évoque ici le tabou de l'amour fraternel incestueux dans un film très étrange. Le récit s'ouvre sur une vision de photo polaroïd de Haruo (Bang-ho Cho) et sa sœur Natsuko (Yoshiko Yura) enfants, accompagné d'un texte succinct nous disant que depuis cette époque Natsuko est voue un amour guère fraternel pour Haruo. Une ellipse nous amène à l'âge adulte où Haruo est victime d'amnésie pour des raisons que nous ignorons.

C'est l'opportunité pour Natsuko d'assouvir cette attirance taboue en faisant sortir son frère de l'hôpital et lui faire croire qu'elle est sa petite amie. Dès lors s'engage une narration flottante, dépourvue de vraies péripéties autre que la relation trouble des personnages. Natsuko est une jeune femme vivant dans les marges en se prostituant, paradoxalement la romance interdite est le seul éclair dans un quotidien solitaire que le réalisateur suit dans des déambulations tokyoïtes chargées de spleen. Haruo est quant à lui un homme-enfant se laissant porter par les évènements, en pleine redécouverte du monde qui l'entoure.

La première partie donne dans le quotidien romantique languissant, accompagnant sur une bande-son assez entêtante les pérégrinations du couple. Cette candeur est contrebalancée par les environnements assez sordides donnant à voir justement un Japon loin de l'urbanité fière des grandes villes, entre l'appartement insalubre du couple, les chantiers sur lesquels travaille Haruo. Cette précarité entrecroisée au lien fragile des personnage dessine déjà l'es ombres qui planent sur leur relation. A mi-film, une rupture de ton intervient alors qu'après une turpitude joyeuse, Haruo a cette phrase terrible : "Je me souviens". La mémoire ne lui revient pas à ce moment-là mais néanmoins des bribes de ses émotions passées semblent lui revenir. Dès lors la tension et la culpabilité s'installent avec cette crainte pour Natsuko que Haruo se souvienne et li reproche son mensonge. Hitoshi Yazaki multiplie les idées formelles, notamment rattachées aux miroirs pour traduire la crise identitaire d'Haruo et laissent flotter une ambiguïté qui restera irrésolue jusqu'au bout. Et si Haruo à un certain stade de l'histoire avait effectivement retrouvé la mémoire mais sans l'avouer à Natsuko afin de préserver leur relation ? 

Le doute existe grâce à la subtilité du jeu des acteurs où la culpabilité possible se mélange à une réelle passion dont ils ne peuvent se départir. Hitesho Yazaki fait passer tous ces questionnements avec une sécheresse narrative prononcée, des dialogues rares, la mise en scène et les différentes atmosphères installées se chargeant d'orienter nos émotions contradictoires. Dans cette idée, le tabou de la scène de sexe est absent dans la première partie très naïve et chaste, et l'interdit charnel n'intervient qu'une fois ce doute mémoriel installé pour rajouter au malaise dans le filmage. La dernière scène est assez magistrale de ce point de vue, franchissant un ultime interdit qui amènent les personnages à verser des larmes que l'on ne saurait qualifier de joie, ou d'un autre sentiment plus insaisissable. Un très joli film qui manie avec une rare nuance son postulat provocateur. 

Sorti en dvd japonais

 

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