Un jeune ingénieur
russe arrive en Angleterre en 1939. Installé à Barchester, une petite ville de
province, il découvre un monde replié sur lui-même, attaché aux conventions, et
doit affronter les préjugés racistes...
The Demi-Paradise
est un bel exemple de l’intelligence du cinéma de propagande anglais des années
40 qui saura toujours diffuser son message dans un versant original et
humaniste produisant de vrais bons films. The
Demi-Paradise se présente donc comme une sorte de croisement (en moins
réussi) du Ninotchka de Lubitsch et
de Mrs Miniver (1942) de William Wyler. Du
Lubitsch, on retrouve le postulat du russe égaré en Occident avec le personnage
d’Ivan (Laurence Olivier), jeune ingénieur venu en Angleterre chercher un
partenaire industriel pour financer son invention, une hélice de bateau
révolutionnaire. Nourri de préjugé envers les anglais, il verra ceux-ci presque
tous confirmés sous des formes diverses. C’est d’abord la légendaire météo
grise et pluvieuse londonienne qui va calmer ses ardeurs, puis le ton hautain
et guindé ainsi que la méfiance des locaux envers « l’étranger » qu’ils
abordent avec leur flegme british le plus glacial. Un unique rayon de soleil
viendra éclairer son voyage avec la rencontre de la belle Ann (Penelope
Dudley-Ward), fille de son possible mécène. Sa joie de vivre, ses sourires et
son humour pétillant amène ainsi un autre visage plus lumineux à cette
Angleterre et va troubler un Ivan peu à peu amoureux. Ce dernier arrive
également avec la vision binaire du régime communiste malicieusement moquée au
détour de quelques dialogues et de la franchise avec laquelle il fustige les mœurs
anglaises.
Si ses aprioris sont raillés à travers la préciosité du
héros, ils ne sont pas totalement faux non plus et l’on y retrouve le recul que
peuvent avoir les anglais sur leurs propres failles (notamment dans les films
de Powell et Pressburger). La première partie du film se déroule en effet en
1939 avant l’engagement Anglais dans la Seconde Guerre Mondiale mais alors qu’Hitler
étend son emprise en Europe. Même si biaisé par la vision d’Ivan on voit donc
là une Angleterre repliée sur elle-même, cela se manifestant par la méfiance
envers l’étranger donc, les discours isolationnistes dominants au sein d’une population
tournée vers le passée (symbolisée par la célébration de la bataille de
Waterloo annuelle). Cette situation va bien sûr perturber l’amorce de romance
entre Ivan et Ann, la rigidité du premier s’opposant à la frivolité de la
seconde et brisant pour un temps toute possibilité d’union.
Drôle, captivante et audacieuse, cette première partie est
le moment le plus intéressant du film. Dans la seconde, Ivan reparti en Russie
revient dans une Angleterre désormais en guerre et confrontée aux restrictions
et au Blitz.
Le ton est clairement plus policé et la dimension de film de propagande
se ressent avec la célébration de la solidarité et du courage du peuple anglais
face à l’adversité. De même l’humanisme et l’union des peuples sont magnifiés
avec ce contexte difficile amenant l’acceptation d’Ivan par la communauté dans
une fraternité inattendue. L’histoire d’amour peut ainsi enfin s’épanouir et
certaines séquences répondent à la première en écho inversé, la célébration de
Waterloo laissant place à une fête russe hommage à la ville natale d’Ivan.
Tout
cela est bienveillant et agréable mais déroule un programme lisse et attendu
loin des aspérités intéressantes du début du film. L’histoire d’amour si
piquante devient très classique, Penelope Dudley-Ward perd son allant d’héroïne
de screwball comedy et Laurence Olivier de sa raideur géniale. Ce n’est pas le
message pacifiste qui est en cause mais le traitement linéaire du scénario
puisque d’autres œuvres de propagande anglaise sauront à la même période
prendre des chemins plus déroutant pour délivrer leur message (les films de
Powell/Pressburger bien sûr ou en pépite méconnue le fabuleux Thunder Rock (1942) de Roy Boulting). Surtout que là on esquive les sujets qui fâche et potentiellement intéressant comme le fait qu'à l'origine la Russie est alliée à l'Allemagne. Plaisant,
dans un premier temps audacieux mais finalement sans surprise, dommage.
Sorti en dvd zone 2 anglais sans sous-titres assez difficile à trouver mais Elephant Film doit bientôt l'éditer en France
Extra
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