Une jeune flic
masochiste utilisant comme arme des menottes rouges redoutables fait tout pour
retrouver la fille kidnappée d'un ministre.
Les Menottes rouges
est un décalque assez évident du cultissime La Femme Scorpion de Shunya Ito (1972) sorti l’année précédente. Le film est
initié par les mêmes producteurs et adapte à nouveau un manga de Tooru
Shinohara. Les similitudes frappent tout au long du film, que ce soit Miki
Sugimoto en héroïne taciturne et iconisée par son imperméable rouge, la
chanson-titre composée par Shunsuke Kikuchi (compositeur de La Femme Scorpion) sonnant exactement
comme le Urami Bushi chantée par Meiko Kaji dans La Femme Scorpion. Cependant Shunya Ito avait par son brio formel
et thématique ainsi que grâce à sa charismatique interprète réussit à
transcender le film d’exploitation pour livrer une vraie œuvre féministe et
subversive. Héroïne malmenée, humiliée mais toujours vaillante se dressait de
tout sa hargne face à une société japonaise machiste dans trois films brillants
(puisque suivraient deux suites cruciales toujours dirigées par Shunya Ito Elle s’appelait Scorpion (1973) et La Femme Scorpion : La Tanière de la bête (1974) puis la série se poursuivit sans le duo
initial pour une moindre qualité).
Les Menottes rouges
tout en arborant les mêmes contours est bien loin de cette profondeur et est
simplement un film d’exploitation relativement efficace. Si La Femme Scorpion
exploitait le sous genre du Women in
Prison, ici nous avons droit à un vrai polar urbain avec notre héroïne Miki
Sugimoto du bon côté de la loi. Comme d’habitude dans le pinku eiga l’exploitation putassière se dispute à la dimension
féministe représentée par l’héroïne tenace. C’est plutôt l’aspect racoleur qui
domine néanmoins, tous les prétextes étant bon pour dévoiler les formes sculpturales
de Miki Sugimoto (sans Reiko Ike, son acolyte habituelle des films pinky). L’ouverture
conjugue donc ces deux facettes, lorsque la policière feint d’être droguée par
un diplomate violeur pour mieux radicalement le châtier. C’est l’occasion de
découvrir sa botte secrète avec ces menottes rouges emblématiques, la même
couleur que l’hémoglobine qui inonde bientôt les malfrats trop entreprenant, le
violeur voyant ses ardeurs calmées par une balle dans l’entrejambe.
Autre point commun avec La
Femme Scorpion, l’héroïne seule rempart d’un monde d’hommes prêt à
soumettre les femmes, celle-ci étant également faibles et/ou corrompues. Miki
Sugimoto remonte donc la piste de kidnappeurs ayant enlevés et violés la fille
du futur premier ministre (Tetsuro Tamba). Les femmes ne sont ici qu’outil ou
entrave à l’ambition (le chef de la police espérant une promotion avec l’affaire,
le politicien prêt à sacrifier sa propre fille pour sa carrière, les
kidnappeurs et le montant de la rançon qu’ils réclament) ou source de plaisir
non consentant pour l’essentiel. Cette monstruosité des figures masculines s’expriment
ainsi dans le froid calcul chez les puissants (Tetsuro Tamba parfait) et la
barbarie dégénérée au sein de la plèbe représentée par les kidnappeurs – avec en
point d’orgue ce meurtre fratricide brutal. Si dans La Femme Scorpion l’intrigue révèle un vrai motif de vengeance pour
Sasori traie par son fiancé, Miki Sugimoto est bien plus insaisissable ici. La
moue boudeuse et le visage opaque quels que soient les outrages subis, c’est un
ange de la mort attendant patiemment son heure pour délivrer son châtiment.
Le sort fait aux femmes répond de cette dualité entre cinéma
d’exploitation et féminisme musclé. Le viol et l’enlèvement de la fille du
ministre est ainsi particulièrement sordide alors qu’à l’inverse quand Miki
Sugimoto subira le même sort la réalisation en fait un véritable rituel SM et
bondage (attendu par le spectateur vu le passif filmique de l’actrice) où l’on
s’éloigne du réel avec ces éclairages baroques et la fétichisation du corps de
l’actrice. Formellement Yukio Noda s’éloignement beaucoup du style pop tapageur
et opératique de Shunya Ito. Noda s’est fait connaître par ses films de yakuzas
et ses nombreuses collaborations avec Sonny Chiba (dont une adaptation du manga
Golgo 13). Donc le résultat est ici nettement
plus heurté (montage nerveux, caméra à l’épaule, panoramiques frénétique), un
polar urbain (qui rappellera les outrances de son pendant italien de l’époque)
tout en excès qui trouve son point d’orgue dans une poursuite et un gunfight
final sanglant où justice est faites. Donc un pinku d’exploitation plutôt bien
mené, mais pour l’intensité et la profondeur thématique on préférera revenir
encore et toujours à La Femme Scorpion.
Sorti en dvd zone 2 français chez HK Vidéo
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