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jeudi 10 août 2023

Quest for Love - Ralph Thomas (1971)

Après une expérience ayant mal tourné, un scientifique se retrouve dans une réalité alternative ou il est un auteur connu marié à une très belle femme. Il tente désespérément de sortir de cette autre vie malgré son attirance pour sa nouvelle femme...

Quest for love est une belle romance surnaturelle qui brille par sa nature feutrée et sa modestie entièrement au service de son histoire d'amour. Le film adapte la nouvelle de science-fiction Random Quest de John Wyndham publiée en 1954. Le film de Ralph Thomas succède à une première adaptation produite pour la télévision en 1969 pour la série d'anthologie SF Out of the Unknown, et en précède une autre plus récente avec le téléfilm Random Quest diffusé en 2006. La singularité du film est de reléguer son argument SF au point d'en faire un quasi prétexte à initier la romance. L'introduction est ainsi expéditive avec le scientifique Colin Trafford (Tom Bell) expérimentant un accélérateur de particules qui va dérailler et le faire se réveiller dans une réalité alternative. 

Dans cette dernière il découvre, déboussolé, qu'il est désormais un auteur à succès, que John Fitzgerald Kennedy est toujours vivant et secrétaire des nations unies, que l'acteur Leslie Howard n'est pas mort en mission durant la Deuxième Guerre Mondiale puisqu'elle n'a pas eu lieu. Toutes les pistes uchroniques captivantes potentielles sont évacuées pour nous amener vers le moment de bascule où Colin célibataire dans sa réalité se découvre ici marié à la belle Ottilie (Joan Collins). La mise en scène de Ralph Thomas, très terre à terre jusque-là éblouit soudain par la saisissante apparition de Joan Collins, avec un gros plan féérique magnifiant sa beauté et nous faisant ressentir le coup de foudre immédiat de Colin. Ce parti pris va se poursuivre tout au long du récit puisque l'onirisme presque baigné de fantastique gothique ne naît pas de l'argument surnaturel, mais par la seule expression des sentiments dont l'intensité semblent faire basculer l'atmosphère (la scène du piano), porté par un beau thème romantique de Eric Rogers.

Malheureusement notre héros va constater que les sentiments de Ottilie lui sont largement hostiles, son autre "moi" s'avérant un infâme goujat adultère. Tout le bagage néfaste de son double l'empêche de se rapprocher d'Ottilie, lorsqu'il se trouve contraint à en endosser l'existence mondaine au sein de laquelle il va comprendre à quel point il est un être détestable et détesté. Peu à peu la passion renaît alors qu'il fait comprendre à Ottilie qu'il n'est plus celui qu'elle a connu, et là aussi l'explication SF est expédiée et c'est la licence poétique qui prévaut. Ce Colin si aimant, attentionné et doux ne peut pas être son mari pour Ottilie qui accepte ce changement. L'atmosphère romantique envoute, le lyrisme bien que discret est bien là et surtout la conviction des deux acteurs emporte l'adhésion. 

Tom Bell est incroyablement habité et intense, et Joan Collins est vraiment surprenante dans ce registre doux et évanescent. L'actrice est surtout connue pour ses rôles de vamps séductrice au début de sa carrière anglaise (Turn the key softly de Jack Lee (1953)) à Hollywood (La Fille sur la balançoire de Richard Fleischer ((1955), La Terre des pharaons d'Howard Hawks, Esther et le roi de Raoul Walsh (1960)) ainsi qu'à la télévision sur un registre plus mature dans le célèbre feuilleton Dynastie. Ici sans se départir de son aura glamour, elle fait montre d'une sensibilité à fleur de peau et d'une vulnérabilité qui fait immédiatement partager l'intensité des sentiments de Colin, et fait exister avec force la romance alors que celle-ci est en définitive assez brève.

En effet une péripétie va tragiquement séparer Colin et Ottilie, mais il est possible pour Colin de "réparer" l'anomalie en retrouvant le double d'Ottilie dans son monde. Là encore on est pris de court par la soudaineté du drame et c'est une véritable course contre la montre qui s'engage dans l'autre réalité où Colin fris la démence pour retrouver son aimée. Cela reste très étonnant cette manière de mettre tout le contexte et les explications en retrait mais la première partie nous a suffisamment conditionné pour n'être uniquement que soucieux de l'urgence des retrouvailles dans le récit. 

Le moment attendu survient en formant une boucle des deux grands instants romantiques des différentes réalités avec des fleurs, et nous laisse sur une belle fin ouverte. Il y avait matière à faire plus flamboyant dans le fond et la forme à la manière des classiques passés (Le Portrait de Jennie (1948), L'Aventure de Mme Muir (1948), Peter Ibbetson (1935)) et contemporains (Quelque part dans le temps de Jeannot Szwarc (1980), L'Armée des douze singes de Terry Gilliam (1996)) de ce type de romance surnaturelle autour de l'obsession amoureuse, mais c'est finalement son côté feutré et minimaliste qui fait tout le sel de Quest of Love.

Sorti en dvd zone 2 anglais sans sous-titres chez ITV 

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