Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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vendredi 4 octobre 2024

Ces garçons qui venaient du Brésil - The Boys from Brazil, Franklin J. Schaffner (1978)

Ezra Lieberman, célèbre chasseur de nazis, reçoit un étrange coup de téléphone du Paraguay : un jeune américain prétend avoir surpris une conférence tenue par le sinistre docteur Mengele. L'ancien médecin-chef d'Auschwitz aurait commandité l'assassinat de 94 fonctionnaires aux quatre coins du monde. Quand la source est assassinée, Liberman décide d'enquêter sur cette mystérieuse affaire, sans savoir qu'il s’apprête à découvrir une conspiration d'une horreur inqualifiable.

La fuite, traque, capture et jugement des anciens officiers du régime nazi dans les décennies qui suivirent la fin de la Deuxième Guerre Mondiale nourrirent autant les gros titres de l’actualité qu’ils alimentèrent la fiction. La fin des années 70 se montre particulièrement friande du sujet, qu’elle emmène du côté du pur thriller avec le glaçant Marathon Man de John Schlesinger (1976), et dans un versant plus pulp sur ce The Boys from Brazil. Le film est adapté du roman éponyme de Ira Levin, publié en 1978. On a pu constater sur les deux précédentes adaptations de Levin sa capacité à mêler un contour réaliste avec une sorte de high concept tirant les récits vers un périlleux mais brillant équilibre entre effroi et grand-guignol. C’est évidemment le cas dans Rosemary’s Baby (1968) magnifiquement transposé par Roman Polanski avec l’angoisse de la grossesse, la paranoïa et le satanisme s’entremêlant dans un cadre newyorkais inquiétant. Les Femmes de Stepford de Bryan Forbes (1975) fait de même en exposant l’envers trouble d’un environnement pavillonnaire américain apaisant.

Ce monde sous-terrain monstrueux s’étend ici à l’échelle du monde, avec ces anciens pontes nazis circulant librement à travers le monde sous de nouvelles identité. Le versant réaliste est incarné par Ezra Lieberman (Laurence Olivier passant dans le bon camp après avoir joué le nazi sous couverture de Marathon Man), chasseur de nazi qui sous la bonhomie et l’excentricité, rappelle durant plusieurs dialogues cinglants les horreurs commises par les monstres qu’il traque dès que son action est remise en question. A l’inverse la solennité et l’outrance est réservée aux nazis, l’ignominie de leur vision du monde et desseins étant renforcée par le fait de s’exprimer dans un cadre contemporain. Franklin J. Schaffner est sur la corde raide du ridicule mais parvient toujours à trouver le ton juste en thriller réaliste et tonalité plus extravagante - double lecture parfaitement saisie par Jerry Goldsmith sur son score. 

La révélation progressive du plan des nazis, ressusciter Hitler, tient habilement ces deux versants dramatiques. D’un côté une enquête qui débouche sur une longue et quasi documentaire explication des principes scientifiques du clonage démonstration à l'appui (ces principes étant certainement très nouveaux pour le grand public des années 70), et de l’autre la mise en place de ces données pour un usage de pure démence. Les environnements réalistes que traversent Lieberman dans différents pays trouvent leur contrepoint dans l’oasis coloniale que s’est façonné Joseph Mengele (Gregory Peck) poursuivant ses sinistres expériences sur les autochtones. D’un côté un homme en quête de vérité parcourant le monde pour la découvrir, de l’autre un monstre qui se fabrique le sien afin de rester conforté dans ses certitudes.

Schaffner démontre une fois de plus son brio narratif pour distiller habilement les indices même si, dans une moindre mesure mais à la manière de son La Planète des singes le twist du film semble assez connu désormais. Peut-être conscient de cet écueil, le réalisateur ne fait pas reposer le récit sur la grande révélation, mais plutôt sur le thème de la permanence du mal. Les nazis veulent créer les conditions de l’avènement d’un nouvel Hitler, mais le « candidat » malgré leurs efforts est-il condamné à cultiver la mauvaise graine semée en lui par ses créateurs ? La fin du film reste ouverte sur la question, du moins une dernière scène absente du montage salle mais désormais systématiquement inclue dans les éditions vidéo semble faire un choix plus tranché. La confrontation finale est d’ailleurs à l’image du film, avec d’un côté un face à face étonnamment minimaliste, et de l’autre un Gregory Peck en pleine hystérie nazie basculant dans la folie pure – pour l’anecdote le vrai Joseph Mengele encore caché au Brésil mourut quelques mois après la sortie du film.  

Sorti en bluray français chez Elephant Film

8 commentaires:

  1. Bonjour Justin,

    J'aime beaucoup ce film qui a vraiment des moments d'ambiance glaçante, en grande partie due à la composition de Gregory Peck en Mengele et bien sûr le grand James Mason n'est pas en reste (le peu qu'il apparait). De plus c'est peut-être bateau de dire ça mais dans la plupart de ses films il est soit le gendre idéal ou le justicier. La il a vraiment cassé cette image, et très bien en plus, deux autres films avec lui qui me viennent à l'esprit, ce sont les Mulligan : "Du Silence et des Ombres" et "L'homme sauvage".... sont des films où il a cassé son image, quoique l'avocat de "Du Silence..." soit aussi un justicier. Mais on s'en fout, G.Peck prouve au peu de cinéphiles qui ne le savaient pas, qu'il est un super acteur.

    Catherine

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    1. Salut Catherine ! Oui Gregory Peck avait déjà un peu cassé son image notamment dans le western avec des films comme La Cible humaine ou The Bravados où il incarnait des protagonistes plus sombres. Mais là effectivement performance géniale de pur perso maléfique et fanatique, il y va à fond j'adore sa performance !

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    2. Oui, maléfique est le mot dans le sens où il fait des expériences que l'on imagine sur des êtres humains vivants (un peu d'anesthésie peut être ??) pour créer un "être", comme Dieu ou plutôt le Diable.....
      Pour d'autres raisons "L'île du Dr Moreau" (reliés par le thème du médecin fou) est l'un de mes films de chevet et Charles Laughton aussi.

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    3. Oui une autre référence qui m'est venu aussi était "La Malédiction" déjà avec Gregory Peck, puisque là en quelque sorte il cultive aussi la venue d'un genre de nouvel antéchrist ^^

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    4. Pour la franchise des "Malédictions", j'aime bien aussi le 2, because William Holden et une mort impressionante sous la glace d'un lac, et le 3 parce que c'est un tout jeune Sam Neill, déjà très doué, qui interprète Damien. c'est un des rares acteurs stars (Jurassic) qui a joué superbement dans des films d'horreur et fantastiques, pour moi le top c'est "L'Antre de la Folie" de J.Carpenter. Et pour le reste il y a "La Leçon de Piano"....et un film de S.F dans l'espace où il devient diaboliquement troublé, avec Lawrence Fishburne aussi ...ah oui, l'excellent "Event Horizon". J'ai fait un petit hors-sujet. Serais-je damnée ??

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    5. Je me vois dans l'obligation de lâcher les dobermans des enfers pour le hors-sujet ! D'ailleurs concernant La Malédiction, le préquel sorti cette année était étonnamment réussi vraiment un superbe film d'horreur.

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    6. Alors si tu lâches les dobermans, je sors mes caniches-vampire (élevés en Transylvanie) !!
      (smiley smileur)

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  2. (suite) Ah oui, en regardant sa filmo il y a des films où il peut être considéré comme rebelle, "Duel au Soleil" et "Moby Dick" (Achab se rebelle contre Dieu)...et surement d'autres que je n'ai pas vus peut-être.
    Il y a ce film où il joue un shérif je crois, dans une petite ville du Sud des E.U, année 50 peut-être... en tout cas je ne retrouve plus le titre, ni celui de la jeune actrice qui le drague...
    Il y a une édition française.

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