Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
L'Ange du Mal - Vallanzasca, Gli angeli del male, Michele Placido (2010)
Un premier crime à l’âge de 9 ans, une réputation d’envergure à 27 ans. Le gangster Renato Vallanzasca défraie la chronique en Italie. Son charme et son humour gagnent le cœur de la plupart des Italiens, malgré les violences commises par son gang. Arrêté à maintes reprises et aujourd’hui condamné à une quadruple perpétuité, celui qu’on surnomme "l’Ange du mal" s’est joué des institutions pénitentiaires et a créé sa propre légende.
En nette baisse qualitative avec le ralentissement d’activité des grands réalisateurs de son âge d’or (Risi, Comencini, Scola…) et la mainmise de la télévision sur le système de production, le cinéma italien a retrouvé des couleurs tout au long des années 2000. Cette renaissance eut cours lorsque les cinéastes italiens décidèrent de ramener la politique au centre de leurs préoccupations. Le mouvement se fit notamment en se penchant sur le passé et plus précisément sur les « années de plomb » qui virent le pays vivre au rythme des attentats, prises d’otages et revendications des extrêmes de tous bords dans les années 70. Tout comme les réalisateurs de l’époque avaient situé certains de leur film durant le fascisme mussolinien pour répondre aux maux contemporains (Le Jardin des Finzi-Contini de De Sica, Liberté mon amour de Bolognini, Un journée particulière de Scola…), ceux des années 2000 sont revenus à leur tour à ces années de plomb en réaction à la politique de Berlusconi.
Cela donna des films passionnants comme Buongiorno Note, Mon frère est filsunique ou encore la fresque Nos meilleures années. Parmi cette vague, Romanzo Criminale et Le Rêve italien de Michele Placido tiennent une place essentielle. Le premier montrait comment l’ambition de petites frappes romaines croisait les soubresauts extrémistes d’alors tandis que le second (en partie autobiographique) s’attardait sur la montée de la rébellion étudiante qui allait mener certains vers des chemins plus violents.
Le nouveau film de Placido semble donc s’inscrire dans cette veine mais pas tout à fait. L'Ange du mal est le biopic de Renato Vallanzasca, fameux gangster italien qui sema la terreur dans le pays durant quelques mois en 1976. Sorte d’équivalent transalpin à notre Mesrine, Vallanzasca était lui aussi fortement attiré par les sirènes médiatiques et devint une sorte d’icône une fois emprisonné lorsque son visage fut connu de tous. Kim Rossi Stuart (déjà dans Romanzo Criminale et ici co-scénariste) en propose une excellente interprétation exprimant bien la dualité mi-ange mi-démon qu’on lui prête, l’humour et la séduction constante qu'il dégage s'opposant à une détermination sans faille et une violence sans états d’âme dans ses entreprises criminelles. Le script n’est pas particulièrement novateur ou inventif dans sa construction mais Placido, par quelques nuances et partis pris intéressants, lui confère une identité propre.
La forme de L’Ange du Mal est ainsi totalement au service du narcissisme de son héros. Pour retranscrire la frénésie qui accompagne l'odyssée criminelle de Vallanzasca (qui s'étale sur quelque mois à peine), Placido adopte volontairement un rythme saccadé et frénétique. On se perd dans un tourbillon de braquages, d'enlèvements et de fusillades sanglantes. Les acolytes et ennemis sont en retrait sans être négligés pour autant (l’amitié avec Turatello), les policiers ne sont que des silhouettes dans la fuite en avant d’un Vallanzasca ne jetant jamais un regard en arrière, vivant dans l’instant.
Si la facette politique de Romanzo Criminale est clairement absente, cette violence décomplexée et naturelle véhiculée par Vallanzaca et sa bande se pose en parfait miroir de cette époque (l’épisode de l’enlèvement) où sévissait les Brigade rouges. La deuxième partie plus introspective avec son héros désormais emprisonné est du même ordre, l’adrénaline des braquages étant remplacée par la quête de notoriété et le jeu avec les médias. Le regret et la mélancolie pointent certes, mais c’est toujours la personnalité flamboyante de Vallanzasca qui surnage dans la vision de Placido qui interrompt judicieusement son récit au moment où celle-ci sera sans doute brisée de manière définitive par une ultime arrestation.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire