Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
La Vie facile - Easy Leaving, Mitchell Leisen (1937)
Au cours d'une dispute conjugale, un banquier milliardaire et coléreux jette la veste de zibeline de sa femme par-dessus le balcon de sa luxueuse demeure. Le manteau atterrit sur Mary, une jeune employée pauvre et honnête qui passait par là. Cette dernière cherche à le restituer mais Mr Ball, bon prince, lui offre et l'accompagne en voiture chez un modiste de luxe. Aussitôt les gens jasent et les malentendus s'accumulent joyeusement.
Easy Living est une screwball comedy des plus furieuses et inventive où s'annoncent déjà le sens du chaos et l'hystérie des futures réalisations de Preston Sturges. Celui-ci signait là le premier scénario du contrat qui le liait alors à la Paramount, remaniant de fond en comble une histoire à l'origine écrite par Vera Caspary. Le exécutifs du studio gouteront peu ton survolté de son script et malin Sturges le délivrera en main propre à Mitchell Leisen qui séduit lance aussitôt la production du film, les deux hommes signant ensemble plus tard le beau mélo Remember the night.
Comme pas mal de grandes comédies de l'époque (Les Invités de huit heures de Cukor, Mon homme Godfrey de Gregory La Cava), Easy Living est un film où sous la légèreté plane le spectre de la crise des financière des années 30 (et sans doute ce qui reste de plus significatif du premier jet de Vera Caspary qui vécut durement cette période-là). Tous les traits d'humour et rebondissements reposent donc sur la condition financière apparente ou supposée des personnages et ce dès l'entrée en matière hystérique. Le richissime banquier J.B. Ball (Edward Arnold) y arpente furibard sa luxueuse demeure en hurlant après domestique, femme et enfant sur le gaspillage qu'il constate de toute part.
C'est une de ses colères qui lance l'intrigue lorsqu'il jette par la fenêtre une fourrure hors de prix acheté par son épouse. Le manteau tombe sur la tête de Mary Smith (Jean Arthur) une modeste employée passant par là. Celle-ci s'empresse de venir le rendre mais Ball trop heureux du mauvais tour joué à sa femme l'enjoint à le garder et lui achète même un chapeau dans une boutique de luxe. Dès lors l'entourage suspecte une liaison entre eux ce qui va entraîner une drôle de réaction en chaîne...
Le film est propice à de grands numéros comiques et de charme des attractions principales du casting, Edward Arnold et Jean Arthur. Le premier signe une prestation bougonne et colérique absolument déjantée, entre son phrasé mitraillette, son timbre de stentor et ses manières d'ours mal léché est aussi imposant qu'attachant. Quant à Jean Arthur elle demeure la star hollywoodienne la plus attachante et au charme le plus contagieux. Elle est ici à croquer en jeune écervelée au caractère bien trempé et enchante de bout en bout par sa candeur irrésistible.
L'intrigue prend en effet un tour délicieusement scabreux quand divers personnages supposant sa liaison avec le puissant banquier lui propose cadeau et avantages de plus en plus extravagants en échange de faveur sans qu'elle ne se doute de rien. Le plus insistant est le propriétaire d'hôtel en faillite Louis Louis (Luis Alberni tout aussi excité que ses collègues, les déboires de son personnage s'inspirant du réel flop des Waldorf Towers au moment de leur ouverture à l'époque ) pour une série de quiproquos tordants.
On sent vraiment l'influence de Sturges que ce soit le jeu à la fois comique et tragique sur la condition difficile de Jean Arthur (lorsqu'elle cherche un sous pour s'acheter de quoi manger) qui annonce Les Voyages de Sullivan mais aussi les dérapages incontrôlés où le chaos est en marche comme ce restaurant qui finit dévasté ou encore le final dans la banque et là c'est notamment la folle séquence des chasseurs en train de The Palm Beach Story qui vient en tête.
Sous ce déchaînement parvient à se glisser une bien jolie histoire d'amour entre les attentes complémentaires de celui qui se cherche une carrière (Ray Milland excellent en fils à papa perdu) et celle qui se cherche une vie (Jean Arthur) l'alchimie entre fonctionnant idéalement en quelques séquences tendres et amusantes (le baiser sur le canapé et le petit regard de Jean Arthur qui suit toute résistance est inutile, le gag de la baignoire géante). Un souffle de fantaisie et d'humour qui fait un bien fou.
Sorti en dvd zone 1 chez Universal et doté de sous-titres français
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