Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
À la fin du XIXe siècle, Catherine Sloper vit dans une riche demeure de Washington Square, le « beau quartier » de New York, en compagnie de son père, Austin Sloper, veuf, richissime et tyrannique. La jeune fille, timide et sans grands attraits, fait la rencontre du séduisant Morris Townsend au cours d’un bal. Le jeune homme lui fait aussitôt une cour empressée. Devenant un habitué de la maison des Sloper, il demande la main de Catherine à son père. Mais, celui-ci, ne tarde pas à l’accuser d’être un coureur de dot et refuse.
Avec L'Héritière, Olivia de Havilland poursuivait l'ascension en cours depuis le milieu des années 40 et le conflit qui l'opposa à la Warner. Refusant les rôles stéréotypés de jeune fille en détresse qui lui étaient assignés par le studio depuis les triomphe des films d'aventures où elle formait un couple avec Errol Flynn, l'actrice entama une procédure face au studio dont elle triompha et gagna (ainsi que les autres acteurs qui la respectèrent pour son courage) une plus grande autonomie dans le choix de ses films. Dès lors les prestations marquantes allaient s'enchaîner tel que À chacun son destin de Mitchell Leisen (1946) qui lui vaudra son premier Oscar , Double Enigme de Robert Siodmak où elle incarne des sœurs jumelles ou encore La Fosse aux serpents où elle jouera une malade mentale.
Forte de ce nouveau pouvoir, c'est elle qui sollicite William Wyler pour L'Héritière après avoir vu une adaptation théâtrale du roman Washington Square d'Henry James. Ayant déjà donné dans les portraits de femme marquant dans des films comme Jezebel ou La Lettre, Wyler trouve également dans l'histoire des préoccupations sociales (la différence de classe, le pouvoir de l'argent) qu'il traitera de nouveau dans le futur et meilleur encore Un Amour désespéré (1952).
L'Héritière nous dépeint ainsi la cruelle prise de conscience de Catherine Slopper qui va découvrir que son seul attrait pour les hommes repose sur sa dot richissime. Cette désillusion prend la forme de deux trahisons. Celle de son père tout d'abord vivant dans le souvenir de son épouse décédée et ne cesse de rappeler à Catherine comme elle manque des qualités de sa mère. Olivia de Havilland, dont la beauté est altérée par un maquillage disgracieux ajoute à ses artifices une fragilité, une gaucherie et une innocence qui en font une proie facile pour les prédateurs les lus sournois de cette société. Ils prendront la forme de Morris Townsend (Montgomery Clift fraichement révélé par La Rivière Rouge de Howard Hawks) séduisant jeune homme poursuivant Catherine de ses assiduités.
Le récit dessine ainsi la déchéance de Catherine sous deux approches opposées et complémentaires. Le dédain et le mépris du père (formidable Ralph Richardson) pour cette fille sans attrait d'un côté lors de scènes familiales glaciales (le salut distant lors de l'ouverture, l'inévitable comparaison avec sa mère lorsque Catherine se présente sous de beaux atours avant le bal et surtout la terrible séquence où il lui révèle la faible opinion qu'il a d'elle) et l'autre la cour trop belle pour être vraie de Morris.
Wyler pensait reformer le couple Errol Flynn/Olivia de Havilland pour le film mais le désistement du premier l’amena à opter pour le jeune Montgomery Clift. On y gagne grandement au change puisque le stupre et le vice trop évident dégagé par Flynn est ici remplacée par la remarquable ambiguïté de Clift. Beauté juvénile angélique, port élégant et flamme passionnée de tous les instants en fond une figure mièvre idéalisée qui ne peut que dissimuler d'autres desseins et apte à duper l'inexpérimentée Catherine.
Wyler capture idéalement ces deux approches, tout en retenu avant de faire tomber les masques lors de deux grand pics dramatiques formant une boucle. Le premier arrive lorsque Catherine sera cruellement abandonnée par son prétendant voyant l'héritage s'éloigner avec une Olivia de Havilland totalement bouleversante de désespoir. La seconde arrive lors du final où le cœur sec et amer de son expérience passée elle prend une terrible revanche sur celui qui l'a blessée.
Wyler filme les deux séquences de la même manière avec une Catherine grimpant les escaliers dans l'immense et oppressante demeure new-yorkaise, seule au monde, d'abord brisée puis inhumaine et indifférente au monde. Olivia de Havilland glanera son second Oscar pour cette prestation marquante tandis que Wyler signe un de ses tout meilleurs films.
T'as oublié d'ajouter le tag William Wyler en bas pour celui là !
J'ai vu son Cavalier du désert récemment, un western vraiment étonnant pour 1940, entre légèreté et tragédie, avec une photo à tomber du grand Gregg Toland.
C'est rajouté pour le tag merci ! Pas vu le Wyler dont tu parles je suis curieux. Wyler en western j'ai autant vu de très bonne chose comme "Les Grands Espaces" que d'autres très moyenne tel "La Loi du Seigneur" mais au moins il aura un peu touché à tout !
Oui c'est surtout ce côté "La Petite Maison dans la Prairie" qui m'avait déplu dans "La Loi du Seigneur" où même les moments potentiellement plus dur sont esquivés via une pirouette. Toujours aussi surpris que ce film ait eu la Palame d'or à l'époque... Et j'encourage les lecteurs à être bavards au contraire c'est mieux d'échanger que des avis qui s'empilent sans réponses ;-)
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RépondreSupprimerJ'ai vu son Cavalier du désert récemment, un western vraiment étonnant pour 1940, entre légèreté et tragédie, avec une photo à tomber du grand Gregg Toland.
C'est rajouté pour le tag merci ! Pas vu le Wyler dont tu parles je suis curieux. Wyler en western j'ai autant vu de très bonne chose comme "Les Grands Espaces" que d'autres très moyenne tel "La Loi du Seigneur" mais au moins il aura un peu touché à tout !
RépondreSupprimerOui c'est surtout ce côté "La Petite Maison dans la Prairie" qui m'avait déplu dans "La Loi du Seigneur" où même les moments potentiellement plus dur sont esquivés via une pirouette. Toujours aussi surpris que ce film ait eu la Palame d'or à l'époque... Et j'encourage les lecteurs à être bavards au contraire c'est mieux d'échanger que des avis qui s'empilent sans réponses ;-)
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