Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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dimanche 9 septembre 2018

Le Barbare et la Geisha - The Barbarian and the Geisha, John Huston (1958)

Le Japon en 1856. Le diplomate Townsend Harris, accompagné d'un interprète et ami, Henry Heusken, vient prendre son poste de premier ambassadeur américain au Pays du Soleil Levant, à la suite d'un traité signé avec les États-Unis. Il se heurte à l'hostilité des nobles, notamment du Gouverneur local Tamura, et s'ingénie à gagner leur confiance. On lui impose une domestique, la geisha Okichi, chargée en réalité de rendre compte des faits et gestes du consul. Mais bientôt, une réelle amitié teintée d'amour naît entre eux...

Le Barbare et la Geisha s'inscrit à une période de fascination hollywoodienne pour le Japon avec des films comme La Maison de bambou de Samuel Fuller (1955), La Petite maison de thé de Daniel Mann (1956) ou encore Sayonara de Joshua Logan (1957). Tout ces films étaient plus (La Maison de bambou) ou moins (Sayonara) réussis, le réalisme oscillant avec un exotisme forcé et quelques fautes de gouts (Brando grimé en japonais dans La Petite maison de thé) dans des genres aussi marqués que le film noir ou le mélo. Le Barbare et la Geisha s'avère un projet bien plus ambitieux avec cette réelle évocation de Townsend Harris, missionné pour être le premier ambassadeur américain au Japon en 1856. Il s'agit initialement d'un projet d'Anthony Mann qui faute d'avoir pu trouver une grande star pour incarner Harris revend les droits de l'histoire à la Fox. Les choix de productions correspondent aux mues hollywoodiennes du moment et plus précisément aux velléités réaliste de la Fox avec un tournage qui se fera au Japon dans les villes de Kyoto et Nara pour les extérieurs, et dans les studios de la Toho pour les intérieurs. Cinéaste globe-trotter depuis le début des années 50, John Huston s'avère le candidat idéal et trouve l'occasion de tourner pour la première fois avec John Wayne.

Le récit s'avère très réaliste sur le déroulement des évènements, y compris la relation de Harris avec une geisha durant son séjour semble-t-il avéré. Huston en plus du cadre s'entoure en partie de techniciens japonais pour un rendu entre la magnificence des extérieurs et le chatoiement des intérieurs grâce à la recherche des décors et costumes et la belle photo de Charles G. Clarke. C'est cependant dans le rapprochement des hommes que l'histoire articule celui des peuples, mutuellement méfiant et hostile. Le Japon est dans une période charnière où cette ouverture à l'extérieur mènera à l'ère Meiji, mais les craintes de perversion de leur identités et tradition subsistent face à l'étranger. Le décorum offre ainsi un parfum dépaysant et fascinant tandis que les mentalités sont fermées. Les américains ne sont cependant pas mis en valeur pour autant, la prestance naturelle de John Wayne n'en finissant pas d'être désarçonnée dès qu'il se pose en American hero.

Cela donne des instants comiques comme lorsqu'il sera ridiculisé du haut de son allure de colosse en combattant un petit et véloce japonais, mais surtout des conséquences dramatiques lorsqu'il introduit malgré lui le choléra sur la cité portuaire. C'est par la proximité et les actions que le fossé se réduira. La curiosité des mœurs et objets occidentaux se révèlent notamment dans la voix-off de la geisha Okichi (Eiko Ando pour son seul rôle au cinéma), ponctuation (et parfois surlignage) du regard japonais dont Huston ne sous-titre pas les dialogues. A l'inverse la dimension de découverte du Japon est plus brute et spontanée à travers le regard de Wayne, ce qui provoque une belle émotion quand les lignes bougent notamment la scène où les villageois le remercie de son aide durant l'épidémie de choléra ou encore la procession glorieuse avant l'entretien avec le shogun.

Huston respecte les étapes de cet apprivoisement mutuel dans le rythme du film qu'il veut "japonais" par le temps passés à mette en valeur un décor, à dépeindre un rituel dans le détail. On évite l'exotisme cliché en dépit de passages obligés (Wayne surpris d'être choyé et déshabillé avant le bain par des suivantes) et même l'inévitable séquence de harakiri découle d'un vrai cheminement dramatique. Néanmoins Huston posera un regard mitigé sur le film du fait du remontage effectué par la Fox qui atténue un peu la force de ses partis pris. Cela n'en reste pas moins une belle réussite méconnue du réalisateur.

Sorti en blu-ray et dvd zone 2 français chez Rimini 

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