L'histoire d'amour d'une chanteuse et d'un violoniste à Shanghaï, durant la guerre. Séparés, ils ont à nouveau l'occasion de se croiser quelques années plus tard.
Tsui Hark s’était inscrit avec ses trois premiers films Butterfly Murders, Histoire de cannibales et L’Enfer des Armes comme un des chefs de file de la nouvelle vague Hong Kongaise entre la fin des 70’s et le début des 80’s souhaitant bouleverser l’ordre établi et révolutionner le cinéma formaté d’alors dans la péninsule. Butterfly Murders était ainsi un wu xia pian déconcertant et anticonformiste, Histoires de cannibales un ovni croisant horreur outrancière et comédie délirante tandis que Le rageur L'Enfer des Armes n’est rien de moins que le Orange Mécanique hongkongais. Cependant si les films sont d’incontestables réussites artistiques, ils placent le réalisateur dans une impasse par leur échec public. C’est l’heure de la remise en question pour Tsui Hark qui souhaite tout autant être un cinéaste populaire qu’avant-gardiste et cherchera constamment désormais à équilibrer ses films entre expérimentations et accessibilité grand public. C’est dans cette démarche qu’il crée sa société de production Film Workshop qui révolutionnera le cinéma de Hong Kong et mondial pendant plus de dix ans.
On retrouve donc ici des scènes musicales endiablées et bariolées typiques des grandes comédies musicales hollywoodienne bien que toujours imprégné de culture chinoise dans les chansons typique de la variété de l’époque comme cette amusante scène ou Kenny Bee et Sally Yeh entame une drôle de chorégraphie sur les toits. Les échanges virevoltants, les multiples quiproquos et course poursuites évoquent le meilleur de la screwball comedy grâce à l’abattage de Sally Yeh (qui retrouvera un rôle dans cette veine dans le suivant Peking Opera Blues (1986)) tandis que la relation du couple navigue entre registre comique et sentimental.
Tout cela est vu sous un jour léger mais une réalité bien présente se fait jour à travers les multiples échanges évoquant le manque d’argent (Kenny Bee et son oncle économisant pour quitter Shanghai), l'amitié et l'entraide entre les deux héroïnes ou encore des personnages secondaires comme les loufoques et estropiés vétérans de guerre vivant dans la misère. Tsui Hark n’a pas encore tout à fait trouvé l’équilibre qui fera la perfection de ses œuvres suivantes et le film est parfois un peu trop hystérique notamment quand il multiplie cette situation typique de la grosse comédie cantonaise où tous les personnages se cachent les uns des autres dans une pièce exiguë.
La conclusion en forme de séparation mais aussi d’éternel recommencement recèle son lot d’émotion contrastée. Et pour ceux qui croyaient Tsui Hark tourné vers le passé avec cette nouvelle direction, il n’y a qu’à se souvenir de la destination du couple dans leur départ précipité : Hong Kong lieux d’avenir et de tous les possibles. Un bien beau film qui était une sorte de brouillon du chef d’œuvre à venir, le merveilleux Peking Opera Blues dont on a déjà dit le plus grand bien en ces pages…
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