Koichi vit avec sa
mère à Kagoshima, séparé de son frère Ryûnosuke suite au divorce de leurs
parents. Ryûnosuke vit avec son père dans une ville éloignée mais les deux
frères gardent contact et complicité. Ils ont la nostalgie de leur vie d'avant
et souhaiteraient être à nouveau une famille unie de quatre personnes.
L'inauguration prochaine du Shinkansen dans l'île de Kyushu les amène à croire
que leur vœu se réalisera s'il est exprimé au moment et à l'endroit où les deux
premiers trains à grande vitesse se croiseront sur ce trajet. C'est le cadre
d'un voyage initiatique des deux frères et de leurs amis.
Après les réussites de
Nobody knows (2004) et Still Walking (2008), Hirokazu Kore-Eda
explorait à nouveau avec justesse et brio le monde de l’enfance avec ce beau I wish. A l’origine du film il y a une
image qui obsède le réalisateur, issue justement d’un des plus beaux films sur
l’enfance, Stand by me (1986) de Rob
Reiner. Cette image est celle d’un groupe d’enfants marchant le long d’une
ligne de chemin de fer. L’idée de I wish
sera de broder une intrigue permettant à Kore-eda de reprendre à son compte
cette image dans un nouveau récit initiatique sur l’enfance. Un détail pratique
(les rails du Shinkansen -TGV japonais - se situent en hauteur et ne peuvent
arpentés en plus de n’être visible que de haut et de loin) l’obligera à
remanier son premier jet au scénario mais la moteur de l’intrigue est bien là.
La partie encore rêveuse et innocence de l’enfance se
confronte aux premiers écueils de la dure réalité à travers les deux héros du
film. Koichi (Koki Maeda) et son frère cadet Ryūnosuke (Ōshirō Maeda) vivent
séparés depuis le divorce de leurs parents, l’aîné vivant avec sa mère chez ses
grands-parents et l’autre avec son père musicien dans une ville plus éloignée.
Le réalisateur marque la séparation par la différence de leurs environnements.
D’abord en opposant la campagne où vit Koichi à Kagoshima et l’environnement
urbain qui entoure Ryūnosuke. Les grands espaces et la nature environnante
nourrissent la mélancolie de Koichi qui lie son désir de voir sa famille réunie
à des chimères infantile comme celle de voir le volcan local se réveiller pour
de bon et les obliger à déménager. L’urgence de la ville, le plus jeune âge et
le caractère sautillant de Ryūnosuke l’éloigne d’un tel spleen. Pourtant
Kore-eda n’a de cesse dans une narration de croisée d’exprimer les manques et
les avantages de chacun.
Ryūnosuke est le plus souvent livré à lui-même et
forcé de grandir trop vite avec ce père musicien immature alors que Koichi
malgré l’absence vit dans un environnement privilégié notamment dans le lien qu’il
tissera avec son grand-père (Isao Hashizume). Le repas familial ou la
préparation de karukan (gâteau traditionnel japonais) de l’un ont pour réponse
les dîner en solitaire de l’autre avec des plats préparés. Les fêtes entourées
de musiciens de l’un trouvent le dépit de l’autre dans sa chambre observant le
paysage au loin. L’aîné semble plus enclin et vindicatif pour forcer l’union de
la famille, le cadet a encore trop bien les disputes ayant menées à la
séparation pour l’espérer aussi fort. Lors des rares entretiens téléphoniques
avec ces parents éloignés, la philosophie de son père est incompréhensible à l’impatient
Koichi tandis que le placide Ryūnosuke ne sait que répondre aux larmes de sa
mère. En dépit de tout, les deux frères s’aiment et se manquent pourtant.
L’inauguration d’une nouvelle ligne du Shinkansen -TGV japonais
- sur l'île de Kyushu offre donc l’argument de possibles retrouvailles. Une
fable affirme que le passage où se croiseront les deux premiers trains produira
une énergie équivalente à une étoile filante et permettant à celui qui y
assiste de faire le vœu qu’il souhaite. Dès lors s’entame les préparatifs pour
la grande expédition où les deux frères et leurs amis devront faire preuve d’astuce
pour mener à bien leur projet. Kore-eda filme l’odyssée avec charme, chacun des
enfants faisant preuve d’une énergie, d’une candeur et d’une foi en leur quête
terriblement attachante. Le regard des adultes se fait si bienveillant, le ton
si enjoué et l’atmosphère du film si lumineuse que l’on se doute bien qu’il ne
peut rien arriver à nos aventuriers et ce en dépit de quelques péripéties
surprenantes (la nuit chez les « grands-parents »).
Cet allant ne
doit cependant pas masquer la vraie pointe de noirceur exprimée à travers les
personnages secondaires eux aussi confrontés certaines douleurs du monde
adulte. L’aspirante actrice Megumi (Kyara Uchida) découvre ainsi la concurrence
des castings juvéniles tandis que Makoto (Seinosuke Nagayoshi) goutera à la
douleur de la perte avec la mort de son chien. Néanmoins on sent que Kore-eda
souhaite laisser une part d’innocence subsister pour un temps chez ses jeunes
héros, à l’inverse de Nobody Knows où
ils les avaient mis à rude épreuve. Un courage et une vision du monde plus
large subsistera toutefois de l’aventure, comme le montreront les vœux finalement
différents exprimés par les frères. Une œuvre magnifique qui confirmera le
statut d’Ozu contemporain associé à Kore-Eda.
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Side
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Side
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