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lundi 20 avril 2020

Passe montagne - Jean-François Stevenin (1978)


Serge vit dans un hameau isolé du Jura, séparé de sa femme. Il répare des autos dans son atelier, et rencontre un jour Georges, avec qui il se liera d'amitié...

Passe montagne est un premier film à l’image de la singularité de Jean-François Stevenin. Il gravit les échelons en effectuant tous les métiers, de technicien à assistant-réalisateur pour des réalisateurs comme Jacques Rivette ou encore François Truffaut qui repère en lui un potentiel d’acteur et le fait jouer dans L'Enfant sauvage (1970), Une belle fille comme moi (1972), La Nuit américaine (1973) jusqu’à la prestation marquante de L’Argent de poche (1976). Truffaut décèle les futures aspirations de son collaborateur l’intéressé, qui prend donc son envol avec la réalisation de Passe montagne. Stevenin fait ses classes avec Jacques Rozier dont les tournages libres et en petit comité l‘ont séduit. On sent la parenté de Du côté d'Orouët (1973) ou Les Naufragés de l’îlede la tortue (1976) dans la capture d’un lieu et les velléités d’échappée libertaires dans Passe montagne que Stevenin tourne dans sa région natale du Jura.

On y suit la rencontre entre deux solitudes, Serge (Jean-François Stevenin) mécanicien local et Georges (Jacques Villeret) architecte parisien tombé en panne de voiture dans la région. Le premier aide le second avant qu’une amitié inattendue et une quête improbable les emmène vers joyeuse errance. On retrouve cette idée de lâcher prise avec les vicissitude et l’urgence de la civillisation à travers un Georges agacé puis séduit par le périple, Stevenin adoptant un rythme et une narration lâche susceptible de faire surgir l’impromptu et la poésie au fil des pérégrinations comme le feraient les hasards de la vraie vie – même si l’écriture et le tournage furent plus maîtrisés que ne le laisse croire le côté foutraque du film. Les deux acteurs sont complémentaires et attachants et formellement Stevenin capture merveilleusement la beauté verdoyante et l’immensité des montagnes jurassiennes lorsqu’on en reste au simili road-movie. Le problème réside dans toutes les séquences où Stevenin cherche à concevoir des moments singuliers, des interactions avec les locaux rencontrés. 

Ces passages ne présentent ni des personnalités, ni des situations suffisamment marquantes dans ce parti-pris spontané pour nous intéresser réellement. Le côté naturaliste dessert même l’ensemble dans la prise son étrange où les dialogues vont de l’inaudible à l’incompréhensible lorsqu’interviennent accents et/ou patois locaux, sans que cela soit surmonté par les évènements quelconques ou les figures croisées. C’était justement le sel d’un Jacques Rozier de glisser une fantaisie dans l’inattendu du quotidien qui revêtait progressivement un dessein plus vaste, la capture d’un lieu, d’un mode de pensée. Là difficile de savoir où l’on va malgré l’indéniable originalité de traitement, hors des canons classiques du cinéma français. L’essai sera peut-être transformé avec le second essai à la réalisation de Stevenin entre-temps retourné à la comédie, Double messieurs (1986).

Sorti en dvd zone 2 français chez Le Pacte 

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