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jeudi 26 novembre 2020

Steaming - Joseph Losey (1985)


 Les conversations intimes et les problèmes quotidiens d'un groupe de femmes fréquentant régulièrement un bain turc dans un quartier populaire de Londres.

Steaming est le dernier film de Joseph Losey, sorti à titre posthume en 1985. Il s'agit de l'adaptation de la pièce éponyme de Nell Dunn jouée en 1981. Losey conclut sa carrière sur un veine lumineuse étonnante, donnant un pendant positif au motif du huis-clos si oppressant avec lui dans The Servant (1963) ou encore Cérémonie secrète (1968). C'est également la possibilité de poser une forme de regard féministe qui là aussi court dans certaines œuvres précédentes comme Le Messager (1971) ou Une Anglaise romantique (1975). Steaming est une sorte de variation contemporaine du Femmes de George Cukor (1939) dont il reprend le principe d'un casting entièrement féminin. Nous suivons les rencontres quotidiennes d'un groupe de femmes fréquentant régulièrement un bain turc londonien. La scène d'ouverture où une jeune femme s'y replie après avoir été battu et quitté par son homme définit d'emblée le lieu comme refuge et sanctuaire des âmes blessées.

Le film n'a pas de ligne narrative définie (si ce n'est le fil rouge où ses pensionnaires essaieront d'empêcher sa fermeture) et avance au rythme des rencontres entre trois personnages qui représentent chacun une impasse existentielle de la femme. Nancy (Vanessa Redgrave) est une mère de famille issue d'un milieu nanti, fraîchement quitté par son mari, et perdue après avoir consacré voué son existence à son foyer. Sarah (Sarah Miles) quant à elle mène une brillante carrière d'avocate tout en savourant son célibat et sa liberté tandis que Josie (Patti Love) est d'extraction plus modeste et végète entre amours tumultueuses et boulots minables. Le récit enchaîne les saynètes où toutes trois se retrouvent au fil des semaines ou mois et son confient les unes aux autres sur l'état de leur vie. 

Les conversations varient entre leur rapport aux hommes, le sexe abordé crûment, les bienfaits, le poids ou le manque d'un foyer et d'enfants dans leur vie. Joseph Losey évite le piège du théâtre filmé dans la manière spontanée et inventive dont il orchestre chaque retrouvaille. On oscille ainsi entre naturel confondant où la nudité est exposée sans fard (des seconds rôles aux stars comme Vanessa Redgrave ou Sarah Miles qui donne de sa personne en full frontal) où la caméra de Losey se promène avec fluidité des bains au sauna, en passant par des compositions de plans où se devine pleinement l'inspiration picturale impressionniste notamment. Les transitions se font à travers des idées magnifiques également comme ce fond de piscine qui se confond avec un jet d'eau par un habile fondu enchaîné.

 Losey évite de faire de son film un long fleuve tranquille et les différences entre les héroïnes font montre de heurts féroces. Elles s'envient l'une l'autre ce qui lui manque, le confort financier de Nancy pour Josie et la liberté d'être soi-même dans l'autre sens alors que l'insouciance de Sarah est une façade masquant sa profonde solitude. C'est l'occasion du pic émotionnel du film, lorsque Josie prise de haut par Sarah et Nancy pique une colère mémorable (Patti Love est une vraie révélation) où elle crache tout son vécu prolo et douloureux aux deux bourgeoises arrogantes. 

Un aspect intéressant aussi est la dimension intemporelle que confère cet espace des bains turcs au film (si ce n'est la bande-son et la coiffure de Sarah Miles bien marqués 80's) et qui rend les problématiques des héroïnes universelles encore aujourd'hui. Pas le plus grand Losey certes mais un beau point final.

Sorti en dvd zone 2 anglais chez Sony et doté de sous-titres anglais

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