mercredi 26 janvier 2011
Les Insurgés - We Were Strangers, John Huston (1949)
China Valdez rejoint les Cubains clandestins après que son frère ait été tué par le chef de la police secrète, Ariete. Elle fait la connaissance de Tony Fenner, un Américain expatrié, dont elle tombe amoureuse. Il planifie de creuser un tunnel sous le cimetière de la ville jusqu'à un terrain appartenant à un officiel, de le tuer et ainsi de provoquer le rassemblement de toute la hiérarchie cubaine à son enterrement afin de les tuer.
Alors que le Macarthysme s'apprête à jeter sa chape de plomb de suspicion sur Hollywood, We were strangers s'avère un film étonnant et risqué par la teneur de son sujet. Le film dépeint le destin de quelques résistant durant les dernières heures de la présidence tyrannique de Morales en 1933. Véritable ode à la liberté et incitation exaltée à briser le joug du pouvoir oppresseur, le film pouvait facilement être apparenté à une veine gauchiste tel que l'exécrait McCarthy notamment par la présence tout sauf anodine au casting de John Garfield communiste convaincu et dont la carrière sera brisée par la liste noire. Il semble cependant que les studios (McCarthy n'arrive réellement aux affaires que l'année suivant la production du film) avaient encore le libre arbitre dans le choix de leur sujets.
Dès les premières minutes, Huston appuie ses effets dans sa volonté d'opposer la corruption des puissant face à la noblesse et la solidarité du film. Le film s'ouvre sur une séquence au sénat où est votée une loi répressive interdisant les réunion publique de plus de trois personnes sous peine d'emprisonnement. La volonté de toute puissance, la lâcheté et l'opportunisme s'illustre alors à travers la caméra de Huston captant les expressions de chacun des sénateurs qui vont tous accepter cette mesure révoltante. Les effets s'en font ressentir dès la scène suivante lorsque la police apparaît sous forme d'ombre menaçante venant briser tout velléité d'insurrection en massacrant dans la plus grande indifférence le peuple.
Ayant dressé magistralement la vision globale de la situation cubaine, Huston ne se détachera plus alors des destins individuels de ses protagonistes. Jennifer Jones libéré par O'Selznick pour l'occasion trouve là un bien beau rôle en fille du peuple toute simple qui s'est engagée pour venger l'assassinant de son frère. Entre détermination et fragilité, haine et besoin d'affection elle offre une sobriété touchante à son personnage. Face à elle John Garfield, américain taciturne et mystérieux faisant preuve d'une conviction sans faille pour faire tomber le gouvernement. John Garfield confère son humanité et son charisme naturel à ce Tony Fenner. Pedro Armendáriz redoutable chef de la police secrète complète le trio avec une interprétation aussi pathétique (l'entrevu nocturne avec Jennifer Jones) que réellement menaçante avec un personnage retors et imprévisible.
Dans une construction proche de Pour sonne le glas (en bien meilleur heureusement) les préparatifs d'une manoeuvre historique (l'assassinat de l'ensemble du gouvernement dans un attentat rien de moins) servent à réunir différents révolutionnaires, capter leur rapprochement, leurs joie mais aussi leur doute. Malgré le manichéisme très prononcé destiné à renforcer l'empathie, le scénario n'en oublie pas de questionner les actions de ses héros, l'attentat étant amenés à créer des dommages collatéraux sur des innocents. Loin de stimuler une ferveur aveugle, l'action est donc considéré comme un mal nécessaire mais ne sera pas sans dégâts sur l'équilibre du groupe. Huston comme souvent fait merveille pour dépeindre les moments de camaraderies intimistes, ses petits rien anodins et cette proximité qui scellent des liens indéfectible. Tout le long épisode de la creusée de tranchée en sous sol est donc particulièrement chaleureux malgré la menace ambiante.
Huston délivre une mise en scène claustrophobique traduisant le danger permanent et la paranoïa latente provoquée par les manoeuvres de la police secrète. La photo tout en clair obscur de Russel Metty affirme cette idée, les visages dans la pénombres dissimulant toujours de noirs desseins ou des secrets douloureux notamment la révélation quant au passé de Garfield.
La grande fusillade finale avec ces ennemis invisibles et sans visages exprime parfaitement cela, avec comme seul rempart face aux balles la conviction d'une juste cause et l'amour pour l'autre avec une Jennifer Jones empoignant la mitrailleuse pour une pose et un carnage inoubliable. Elle ne retrouve d'ailleurs son jeu outré que pour une mémorable et passionné tirade final, en forme d'ode à son amant et à la révolution tandis que le chaos se déchaîne enfin dans toute La Havane.
Sorti en dvd zone 1 chez Columbia et doté de sous titres français.
Extrait de la dernière scène ne pas regarder jusqu'au bout sinon vous connaîtrez la fin !
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