À Baltimore, en 1954. Les États-Unis entrent
dans une nouvelle ère et la famille Kurtzman va connaître, de nombreux
changements, elle aussi. Le fils cadet qui répond au nom de "Ben" et qui
a toujours vécu dans un milieu et un quartier exclusivement juif va
tomber amoureux de Sylvia, la seule élève noire de son lycée, contre
l'avis du père de cette dernière, pour le motif de la couleur de peau
(blanche) de Ben. De son côté, Van, le frère aîné de Ben, est éperdu de
la belle et aristocratique Dubbie. Quant au père, il s'efforce de sauver
son petit music-hall.
Liberty Heights est dans la filmographie de Barry Levinson le quatrième film du cycle "Baltimore" après Diner (1982), Les Filous (1987) et Avalon
(1990). Ces films s'inscrivent dans la veine la plus personnelle du
réalisateur, chacun d'eux recelant une part autobiographique où il se
penche sur son adolescence et entrée dans l'âge adulte (Diner et Liberty Heights), premiers pas de sa famille juive et leur quotidien dans l'Amérique du début du siècle puis des années 50 (Les Filous et Avalon). Liberty Heights est une sorte de synthèse du cycle, chacune des storylines
creusant un sillon qui constituait la trame entière des films
précédents.
Le fil rouge est le constat d'une Amérique à la fois figée
et doucement changeante dans ses clivages à travers les différents
personnages. Au sein de la famille Kurtzman, les plus jeunes aspirent à
sortir du microcosme de leur communauté juive pour s'ouvrir au monde qui
les entoure. Pour Ben (Ben Foster) cela passe par les lois de mixité
scolaire qui le verront s'attacher à Sylvia (Rebekah Johnson), jeune
fille noire ayant intégré son lycée juif. Pour son grand frère Van
(Adrien Brody) cette ouverture sera sociale quand il tentera de se mêler
à la jeunesse dorée de Baltimore et tombera amoureux de la belle Dubbie
(Carolyn Murphy).
Levinson oppose les jeunes insouciants et
curieux envers l'ailleurs aux adultes rigides par leurs éducations,
préjugés et probables souffrances passées qui interdisent tout
rapprochements. Chacune de ces deux tendances s'expriment par un humour
décapant (Ben déguisé en Hitler pour Halloween, la réaction de sa mère
quand il dit trouver Sylva attirant) mais où les barrières n'en semblent
pas moins présentes. La tonalité nostalgique expriment ainsi moins une
révolution en marche qu'une parenthèse enchantée où l'on s'ouvre au
monde à travers une nouvelle culture notamment Ben sous le charme de la
musique noire et son humour (James Brown et Sammy Davis jr en tête dont
on reconstitue un concert et entend un sketch). Pour Van
l'émerveillement que représente la jeune bourgeoisie de Baltimore à
travers Dubbie (symboliquement déguisée en fée durant leur première
rencontre) va se confronter à leurs penchants autodestructeurs
(attachant personnage de Justin Chambers).
L'inconnu est donc source
d'un ailleurs lumineux et festifs ou plus torturé qui se combine dans la
trame adulte où la criminalité de petites mains du père (Joe Mantegna)
rencontre celle imprévisible et dangereuse des ghettos noirs avec Little
Melvin (Orlando Jones). Avec ses attitudes outrées et son look de pimp,
le personnage pourrait sombrer dans la caricature mais au contraire il
suinte à la fois la menace et les injustices qui semblent expliquer sans
excuser son comportement. Levinson aurait pu verser dans une noirceur
plus prononcée avec ce protagoniste mais préfère maintenir une tonalité
bienveillante mais où demeure une vraie mélancolie. Au final les
différents mondes n'auront fait que s'entrecroiser et même cette timide
proximité restera source de crispation (le baiser d'adieu final). Un
joli film, l'une des belles réussites de l'inégal Barry Levinson.
Sorti en dvd zone 2 français chez Warner
[Film] Les Jeux de la Mort, de Michael Elliot (1984)
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