Jonathan Cooper, épris d'une comédienne et
chanteuse, Charlotte Inwood, est soupçonné d'être l'assassin de son
mari. Il réussit à convaincre son amie Eve de son innocence. Elle décide
de l'aider.
Stage Fright est
un Hitchcock mineur mais passionnant dans sa manière de traiter la
figure récurrente de l'artifice dans son cinéma. Chez Hitchcock les
images mentent constamment au spectateur comme aux personnages, happés
par l'illusion de ce qu'on leur donne à voir à travers une normalité qui
bascule dans Une Femme disparait (1938) ou le fantasme dans Vertigo (1959). Le monde du théâtre de Stage Fright
offre donc un terrain fertile au réalisateur notamment par ces deux
héroïnes Charlotte Inwood (Marlene Dietrich) et Eve (Jane Wyman) actrice
établie et aspirante.
Le postulat habituel du faux coupable met ainsi
en parallèle les deux personnages féminins dans cette question de
l'artifice. Charlotte à travers la présence glamour de Marlene Dietrich
et la sophistication que confère Hitchcock à ses apparitions véhicule
ainsi d'emblée noirceur et duplicité. Le jeu sournois et séducteur de
Dietrich se conjugue à la photo diaphane de Wilkie Cooper dans des
moments clés tel la joyeuse scène d'habillage qui précède l'enterrement
de son époux. A l'inverse l'artifice ne peut fonctionner par la seule
imagerie pour la novice Eve obligée de changer gauchement d'apparence,
d'attitude et de nom pour mener l'enquête, le scénario tournant à la
comédie (la mère qui la démasque sans difficulté sous son attirail) ou
au pur suspense cette double identité fragile.
Cet aspect gagne
tous les seconds rôles, que ce soit les truculents et so british parents
d'Eve (Alastair Sim et Sybil Thorndike) ou la calculatrice Nellie (Kay
Walsh), tous amené à mener double-jeu plus ou moins habilement tout au
long du film - et pas étonnant que le personnage le moins intéressant
soit le flic unidimensionnel joué par Michael Wilding. Le générique de
début avec sa fresque théâtrale nous invitant dans un monde d'illusion
mais Hitchcock va plus loin. La dramaturgie qu'il prend tant de temps en
développer pour tisser les pièges où tombent ses faux-coupables,
Hitchcock l'escamote en partie en l'illustrant dans un flashback qui va
s'avérer être un mensonge.
Quelques motifs formels (l'incrustation
curieuse de Marlène Dietrich se changeant, l'insert sur la robe
ensanglantée) peuvent éventuellement laisser anticiper le mensonge mais
Hitchcock par sa maestria nous embarque d'emblée dans ce monde de
faux-semblants, bien aidé par le jeu imprévisible de Richard Todd, entre
malaise et pitié. On regrettera juste un script un peu boiteux qui ne
mène pas tous ces chausse-trappes vers une conclusion en apothéose et
haletante. Il y aura bien cette entrevue entre Jane Wyman et Richard
Todd mais la manière d'y arriver est assez laborieuse. Passionnant
malgré ces défauts néanmoins.
Sorti en dvd zone 2 français chez Warner
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