Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Au Revoir, Mon Amour - Ho yat gwan joi loi, Tony Au (1991)
Saga se déroulant pendant la guerre
sino-japonaise à Shanghai. Une chanteuse de cabaret (Anita Mui) est
amoureuse d’un guerillero chinois qui apparaît et disparaît au gré de
ses activités secrètes. Elle tombe enceinte de ce dernier, mais se
morfond de l’absence de son amant...
Au revoir mon amour est une fresque historique que l'on doit à Tony Au, surtout connu pour son travail de directeur artistique chez Ann Hui (The Story of Woo Viet (1981), Boat People (1982), Stanley Kwan (Women (1985)), Sammo Hung (Shanghai Express (1986) ou plus récemment Wong Kar Wai sur The Grandmasters (2013). Il mena en parallèle une carrière de réalisateur dont ce Au revoir, mon amour
est certainement un des budgets les plus nantis dont il a pu
bénéficier. L'histoire se déroule dans la Chine occupée par les japonais
à la veille de la Seconde Guerre Mondiale. C'est une véritable
poudrière où les japonais imposent tyranniquement leur volonté, aidé par
la milice de collaborateur chinois menés par Tieh (Norman Chu) tandis
qu'une résistance clandestine s'organise autour de Liang Seng (Tony
Leung Kar fai). Le récit conjugue ainsi fresque historique, film de
guerre et d'espionnage mais surtout en fil rouge l'histoire d'amour
avortée entre Liang Seng et la chanteuse chinoise Mui Yi (Anita Mui). Le
devoir pour la patrie empêche cette romance de pleinement s'épanouir,
le contexte politique séparant les amants tout au long de l'histoire et
posant nombre de sacrifices douloureux.
Le passé de directeur artistique de Tony Au éclate à l'écran avec une
somptueuse reconstitution magnifiquement en valeur. On reconnaît bien là
la patine du cinéma hongkongais des années 80/90 (notamment les
productions FilmWorkshop de Tsui Hark) mais à laquelle le savoir-faire
de Tony Au amène encore un faste et un soin supplémentaire dans la
stylisation du décor (le cabaret en ouverture), l'usage des maquettes et
la photo magnifique que se partagent rien moins que Peter Pau, David
Cheung et Bill Wong. Le bât blesse donc plutôt sur le fond que la forme.
Même si le drame du récit fonctionne sur les rendez-vous manqués entre
Liang Seng et Mui Yi, leur moments ensemble ne possède pas le souffle et
la puissance émotionnelle suffisante pour frustrer le spectateur et le
rendre fébrile de leur retrouvailles. Tony Leung Kar fai et Anita Mui
sont pourtant au sommet de leur glamour et photogénie, mais leurs rares
scènes communes sont trop quelconques et elliptiques pour poser la fibre
romanesque attendue - hormis peut-être la dernière scène.
Les
personnages énoncent leurs sentiments (les nombreuses voix-off) plus
qu'ils ne les manifestent dans la mise en scène. A trop travailler
l'idée de cette frustration, le scénario (signé Gordon Chan futur
réalisateur de Fist of Legend (1994))
cloue un peu sa romance au sol, ainsi que le triangle amoureux avec le
diplomate japonais joué par Hidekazu Akai. Il y a pourtant bien une
vraie romance vibrante au sein du film, celle entre le "collabo" Tieh et
la chinoise Wu (Carrie Ng). Là tout d'un coup les mots sont inutiles et
c'est une fièvre sensuelle et érotique puissante qui guide leur
irrépressible rapprochement, faisant imploser amitié et alliance
politique en arrière-plan. C'est le traitement que l'on aurait voulu
pour le couple principal, et avec touche d'ambiguïté bienvenue par
l'humanisation du méprisable personnage de Tieh.
Le cadre dépeignant l'atmosphère d'une Chine sous occupation japonaise
est intéressante mais trop timorée, loin des questionnements complexes
du magnifique Red Dust de Yim Ho sorti l'année précédente, et encore plus loin de la violence insoutenable du plus récent City of life and death
de Chu Luan (2009). Le film est sans doute un peu écrasé par son cahier
des charges cherchant à trop brasser de genres et direction, notamment
quand surgissent de façon incongrues des scènes d'actions à la John Woo
sans la virtuosité filmique et l'émotion viscérale. Pas inintéressant
donc mais pas vraiment réussi.
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