Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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jeudi 6 octobre 2011

Tables séparées - Separate Tables, Delbert Mann (1958)


Dans une station balnéaire à Bournemouth sur la côte sud de l’Angleterre, quelques pensionnaires ont élu résidence à l’hôtel Beauregard. L’établissement est tenu par Miss Cooper et parmi ses pensionnaires il y a Mme Railton-Bell et sa fille Sybil jeune fille timide dominée par sa mère, Le major Pollack ancien militaire passant son temps à raconter ses exploits guerriers et John Malcolm écrivain tourmenté, fiancé à Miss Cooper. Sous cette apparente tranquillité débarque une femme très chic Ann Shanland qui se révèle être l’ex-femme de John.


Un joli et touchant mélodrame qui parvient même à surprendre quelque peu par sa manière d'aborder pour l'époque des sujets plutôt tendancieux. Il faut sans doute chercher cette audace dans la pièce anglaise à l'origine du film qui suscita l'intérêt de Burt Lancaster pour sa société de production Hecht-Hill-Lancaster et dont il parvient à embaucher l'auteur Terence Ratigan au scénario en échange des droits. A l'origine la pièce est divisée en deux actes où les deux couples sont dans chacun d'eux joués par les mêmes acteurs. A l'origine Lancaster engage Laurence Olivier pour diriger le film où il jouera le rôle finalement tenu par David Niven tandis que Vivien Leigh suite au départ de son époux pour mésentente avec son producteur star cèdera finalement sa place à Deborah Kerr. Le film s'étoffe de personnages secondaires mais conserve le cadre anglais de la pièce, si important dans ce récit jouant sur les conventions.

Separate tables propose donc un récit choral à huis-clos où les pensionnaires d'une résidence vont pour un temps se déchirer avec leur tourments et leur contradiction. On trouve parmi eux un écrivain porté sur la bouteille (Burt Lancaster), une vieille fille psychologiquement fragile dominée par sa mère (Deborah Kerr), un major retraité moins assuré que ce qu'il parait être ou encore l'apparition d'une élégante femme du monde (Rita Hayworth) qui va s'avérer être l'ex-femme de Lancaster. L'aspect huis-clos et la relative unité de temps renforce le côté théâtral d'origine, d'autant que la mise en scène de Delbert Mann se déleste du moindre effet trop voyant pour principalement mettre en valeur les acteurs, tous remarquables.

Le couple le plus en vue est bien évidemment celui autodestructeur et chargé de rancœurs entre Rita Hayworth et Lancaster. Celui-ci magnifiquement torturé met diablement en valeur une Rita Hayworth qui prend pas mal de risque avec ce rôle jouant de son aura glamour tout abordant la question de son vieillissement et du déclin de ce personnage séducteur qui à l'image de l'actrice a goûté plus que de raisons à tous les plaisirs de la vie.

Ils se font pourtant voler la vedette par Deborah Kerr et David Niven absolument bouleversant. Kerr en godiche ultra-sensible exprime une fragilité à fleur de peau sans tomber dans le ridicule et Niven avec son profond mal être dissimulé sous une fausse assurance et des mensonges qui ne trompent personne offre une de ses plus belles interprétations. Les échanges maladroits de ses deux abîmés de la vie sont très touchants et on est surpris par la manière d'aborder sans fard (sans trop en dire) la nature scabreuse du passé de Niven et globalement tout ce qui touche au sexe (le jeune couple Rod Taylor/Audrey Dalton qui flirte voire plus aux yeux de tous, le désir brûlant entre Hayworth et Lancaster).

Personne n'est totalement ce qu'il parait être et le cadre restreint et la promiscuité produit un effet de loupe sur les travers de chacun dans les jugements moraux qu'il soulève. Mais comme le souligne le très beau final c'est aussi une forme de protection plus tolérante, bienveillante et chaleureuse que le monde extérieur avec cette dernière scène très émouvante dans sa manifestation de solidarité. En levant la tête des fameuses tables séparées du titre on peut aussi rencontrer un regard concerné et amical. Une chose est sûre David Niven a plus que mérité son Oscar.

Sorti en dvd zone 2 français chez MGM

1 commentaire:

  1. Un film "choral" (comme on dit maintenant) superbe, très étonnant, avec une translation de la scène à l'écran qui ne fait pas trop "théâtral" dans le mauvais sens du terme. Oui, Niven est fantastique, et joue en profondeur (on a souvent l'impression qu'il "trafique" son côté British, même s'il en jouera délicieusement dans Casino Royale...) Mais tous mériteraient une mention, tant l'équilibre du jeu est tenu de bout en bout dans une architecture dramatique très soignée. A voir absolument. Dommage que la recette de ce type de films semble s'être perdue...

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