Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
La Mousson - The Rains Came, Clarence Brown (1939)
En Inde, Tom Ransome, un haut fonctionnaire bourgeois mène une vie opulente entre ses conquêtes et son ancienne épouse Lady Edwina Esketh. Celle-ci fait la connaissance d'un jeune médecin indien, le major Rama Safti, et s'éprend de lui. La ville de Ranchipur est dévastée par un tremblement de terre, des inondations et d'une épidémie de peste.
Voilà du grand et beau mélodrame romanesque dont Clarence Brown avait le secret avec ce superbe The rains came qui le voyait adapter le roman à succès de Louis Bromfield paru deux ans plus tôt. Comme le titre l'indique, c'est bien le climat qui détermine la tonalité du récit qu'on peut ainsi diviser entre sécheresse et mousson. La sécheresse de la première partie est autant due à la température qu’au cœur des personnages qui se dissimulent derrière des masques. On découvre ainsi le quotidien de la communauté étrangère établie dans cité de Ranchipour.
Entre réception et dîners mondain, les personnalités se distinguent. Le blasé jouisseur Tom Ransom (George Brent) qui va croiser la route d'une ancienne amante Edwina (Myrna Loy, rôle au départ prévu pour Marle Dietrich) désormais mariée, le médecin indien dévoué à sa cause Rama Safti (Tyrone Power) ou encore la jeune Fern (Brenda Joyce) rêvant d'une vie plus excitante. Le destin va lier ces quatre être lorsqu'Edwina va tenter de séduire Safti par jeu et que Fern va tomber amoureuse du pourtant peu recommandable Ransom.
Toute ces relations sont vouées à l'échec tant chacun semble ancré dans ses certitudes bonnes ou mauvaise et le film déroule une ambiance lascive et sensuelle (le doux échange dans l'obscurité entre Myrna Loy et George Brent, le regard de ce dernier qui change sur Fern lorsqu'elle apparaît plus femme en mettant une tenue épousant ses formes).
Le tournage qu'on devine pour large part effectué en studio rend vraiment bien l'atmosphère indienne si particulière dépeinte par Louis Bromfield et s'équilibre bien entre pittoresque et respect du cadre dépeint que ce soit par la direction artistique somptueuse de William S. Darling et George Dudley ou la prestation pleine de noblesse de Tyrone Power (tout à fait crédible en jeune indien) et Maria Ouspenskaïa plus vraie que nature en charismatique Maharani. On est ainsi loin de la vision colonialiste et impérialiste d'autres film de cette période se déroulant dans ce cadre comme Gunga Din ou Les Trois Lanciers du Bengale, sans être appuyé.
Une extraordinaire séquence de catastrophe naturelle fait basculer l'intrigue. Un moment apocalyptique et terrifiant filmé avec virtuosité par Clarence Brown où d’impressionnants effets spéciaux nous montrent une population locale décimée par un tremblement de terre puis une inondation dévastatrice. La mousson est là et avec elle les carcans imploser pour révéler la vraie nature des personnages dans l'adversité.
C’est un torrent de sentiments qui se déchaîne à travers le doux rapprochement entre Ransom baissant la garde face au regard admiratif de Fern (ce beau moment ou après avoir traversé les flots il revient la chercher épuisé) et surtout la passion aussi intense que platonique de Tyrone Power et Myrna Loy.
Celle-ci, si hautaine et détachée dans la première partie devient bouleversante dans son sacrifice total à celui qu'elle aime et qui lui fait découvrir la satisfaction à secourir autrui. Quand à Tyrone Power, son masque de quiétude s'estompe peu à peu pour le rendre plus humain quand il s'abandonne enfin voyant son amour lui échapper.
Les contradictions qui animent les personnages entre devoir et aspirations personnelles, détachement et sincérité sont magnifiquement capturées par la mise en scène de Brown. Toutes les nuances de la photographie (qui devient immaculée sur le visage de Myrna Loy à l'agonie) ou des choix de mises en scène rendent finalement ces moments dramatiques plus intenses que le morceau de bravoure qui donne son titre au film.
La chanson lourde de souvenirs revenant lors du couronnement final indique un retour de ce romanesque vers u nouveau règne des apparences mais le visage troublé et ému de Tyrone Power laisse comprendre que quelque chose a changé. Entre temps, la mousson est passée...
Disponible en dvd zone 1 chez Fox et doté de sous-titre anglais. Il existe aussi un remake produit dans les années 50 avec Richard Burton et Lana Turner réalisé par Jean Negulesco sous le tire "The Rains of Ranchipur". Pas vu mais curieux...
Et petit aperçu de la scène catastrophe impressionnant pour l'époque
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