Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mercredi 2 novembre 2011

Le Merdier - Go Tell the Spartans, Ted Post (1978)


En 1964, le commandant Barker (Burt Lancaster) dirige une équipe de conseillers militaires américains détachés dans une province du Sud-Viêtnam. Son supérieur, le général Harnitz, lui demande de faire réoccuper un village à l'abandon nommé Muc Wa, où les Français s'étaient déjà battus pendant la précédente guerre d'Indochine. Embarrassé par cette mission et par le manque de troupes disponibles, le commandant Barker n'a d'autre possibilité que d'affecter des moyens dérisoires à la garnison de Muc Wa.

Avant l'odyssée humaniste ambiguë de Michael Cimino (Voyage au bout de l'enfer), les visions hallucinées de Francis Ford Coppola (Apocalypse Now), la catharsis d'Oliver Stone (Platoon) et la mécanique implacable de Kubrick (Full Metal Jacket), Le Merdier (détail amusant c'est le titre français du roman de Gustav Hasford dont est inspiré le Kubrick mais c'est le Incident at Mu Wa de Daniel Ford qui est ici adapté) fut le tout premier film américain à aborder objectivement le conflit du Vietnam. Certes il y eu bien le douteux Les Bérets Vert de John Wayne et des films traitant indirectement du conflit comme MASH ou De l'or pour les braves mais le film de Ted Post en apparence moins ambitieux que les chefs d'œuvres précités est sans doute est sans doute la plus lucide des illustrations de la Guerre du Vietnam.

Tout le film tend à démontrer la nature impure de cette guerre, que ce soit ses soldats (la présentation des nouvelles recrues au début où on trouve un va t en guerre anticommuniste, un toxicomane et un vétéran usé et psychotique), ses missions (l'enjeu du film reposant sur la conquête d'un bastion sans intérêt) et ses enjeux nébuleux quel que soit le camp dans lequel on se trouve. Tout cela est symbolisé par l'officier vétéran incarné par Burt Lancaster, vestiges de conflits plus noble et désormais désabusé par la folie ambiante.

Lancaster délivre une grande prestation avec cet homme usé qui n'a plus que ses souvenirs (la scène où il narre la raison qui a freiné sa promotion au sein de l'armée est un grand moment comique) pour et comme seul but de limiter les dégâts. L'aspect modeste du film renforce d'autant plus les signes avant-coureurs de la déroute américaine à venir notamment leur profond mépris envers les français défait sur ces mêmes lieux, ce qui est bien sûr une hérésie (nous sommes au début du conflit) en ce qui les concerne.

La grande force du film est cependant de tuer toute idée de gloire guerrière et d'héroïsme. Le jeune soldat volontaire joué par Craig Wasson est ainsi une figure noble et héroïque qui va perdre toute ses illusions, sur le partage avec l'étranger comme de l'exaltation du champ de bataille. Comme lui dira Lancaster, il arrive bien trop tard pour les combats justes auxquels sa droiture le destinait. Le titre original qui est un extrait de l'inscription du monument élevé par les Grecs à Léonidas et ses 300 héros de la Bataille des Thermopyles se révèle alors dans toute son ironie. Le lieu de l'affrontement aura abrité précédemment la déroute de 300 français et leurs tombes disposées là s'orne d'une aura bien plus légendaire que la boucherie inutile qui conclut le film.

Point d’actions désespérées, de sauvetage et de fraternité dans l'adversité, juste un massacre que Ted Post escamote d'ailleurs d'un fondu au noir. Ted Post qu'on associe plus volontiers à Eastwood (réalisateur sur la série Rawhide et le dirigeant dans Pendez les haut et court ou Magnum Force un des meilleurs Inspecteur Harry) délivre une mise en scène sobre et efficace tandis que le casting recèle quelques jeunots qui connaîtront leur quart d'heure de gloire comme Marc Singer (futur héros de V) excellent en jeune officier aux dents longues.

Sorti en dvd zone 2 français dans la collection Fnac


8 commentaires:

  1. Le Z1 était recadré, ce n'est pas le cas de l'édition fnac d'après tes captures. Tu confirmes ?

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  2. Oui tout à fait le zone 2 français est au bon format !

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  3. Merci ! Je vais pouvoir revendre mon Z1.

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  4. Film très intéressant, le thème est bien traité et le spectateur n'est pas assailli d'effets spéciaux et d'explosions (je pense à WINTALKERS, de John WOO, dispensable), le message passe bien. A voir, en effet, pour compléter ces multiples visions de la guerre proposées par les films que vous citez.

    SUR LE FORMAT : non, je pense que votre version ne respecte pas le format original. Sur mon DVD zone 1, j'ai davantage d'image en haut et en bas, (je vous envoie une capture d'écran par mail), mais elle n'est visible sur mon téléviseur que si je le mets en format 4/3. Problème alors : l'image est déformée, trop étroite. Le format qui ne déforme pas l'image et qui en conserve le maximum est le 14/9, mais il manque une petite plage en haut et en bas. Résultat : je ne peux voir ce film dans son format original, et sans déformation d'image, il y a recadrage.
    C'est très souvent le cas pour les films un peu anciens, et il est assez insupportable de ne pouvoir visionner certains films dans leur format original, on se sent entravé spatialement, c'est très gênant... si l'on est sensible à ce problème, bien sûr : équilibre de la composition, beauté des cadrages originaux…
    Le comble dans le genre : le recadrage en écran large de RIO BRAVO, qui vous mange au moins un tiers de l'image et trahit vraiment le travail de HAWKS. Le (jeune) vendeur (FNAC!) auprès duquel, il y a déjà quelques années, je déplorais ce fait m'a regardée avec une très grande commisération : "Ma pauvre dame (pauvre vieille, elle n'est pas bien à la page!), mais les films sont tournés maintenant en écran large!" Je lui en ai voulu pendant un bon moment ! Et combien ne verront jamais ce chef d’œuvre en format original?

    D'autres éditeurs présentent les films en deux versions : format original et format écran large. Vous pouvez choisir... Voir LA PRISONNIÈRE DU DÉSERT...

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  5. J'ai oublié de préciser que la qualité de la copie de mon DVD Zone 1 est déplorable : pire que la plus faible définition des antiques VHS...

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  6. Oui c'est cette mode du 16/9 à tout pris qui fait que je ne regarde plus de vieux films à la tv notamment sur le service public les formats son régulièrement massacrés pour se plier à cette nouvelle norme. La réaction du vendeur ne m'étonne pas malheureusement...

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  7. Et pour Abronsius effectivement après vérification (merci Isabelle !) le zone 2 français finalement est aussi légèrement recadré mais différemment en rognant un peu en haut et en bas on peut comparer avec ma capture dans le texte et celle ci d'Isabelle

    https://mail.google.com/mail/?ui=2&ik=d390dc6ba8&view=att&th=1338c91038f81514&attid=0.1&disp=inline&realattid=f_guthllv60&zw

    La copie du zone 2 français est nettement meilleure par contre et malgré tout ça ne défigure (pas trop) le film...

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  8. Je vous rejoins sur cette chronique d'un film longtemps occulté par les titres fracassants des grandes figures du Nouvel Hollywood. Sans atteindre le niveau stylistique de Coppola ou de Cimino, je trouve que Ted Post donne à son film une rugosité bienvenue, qui s'appuie sur un scénario sans concession signé du prestigieux Wendell Mayes (à l'œuvre sur plusieurs Preminger). A l'image de Peckinpah et sa "Croix de Fer" qui précède "le merdier" de peu, il propose une vision crue d'une armée déjà en déroute, supportant un pouvoir lui-même corrompu (la scène chez le colonel Sud Vietnamien est édifiante). Lancaster y est ici impérial, rappelant ses rôles ambigus chez Robert Aldrich. Un film aux qualités multiples, ce dont témoigne votre éclairante chronique.

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