Dans une petite ville du sud
de la Chine, Xiaozhang dérobe une forte somme d'argent à son patron et pense
que celle-ci va l'aider à sauver sa relation avec sa fiancée. Il se retrouve
poursuivi suite à son vol...
Big Fish and Begonia
avait été l’occasion de constater l’avènement et la maturité récente du cinéma
d’animation chinois. Cependant on en restait là à un versant
« blockbuster » de la production et avec Have a nice day c’est l’occasion de découvrir aussi la vitalité de
l’animation chinoise indépendante. Le spectateur français avait eu vent du film
récemment lorsque Have a nice day
avait été à la demande des autorités chinoise retiré d’une sélection hommage à
l’animation chinoise lors du Festival d’Annecy 2017. Pour comprendre les
raisons de ce veto, il s’agit de resituer le parcours du réalisateur Liu Jian.
Celui-ci réalise son premier film en 2010 avec Piercing, œuvre sociale et politique âpre marquée par la crise
économique de 2008. Piercing fit son
chemin dans les festivals dont celui d’Annecy et donna à voir, à l’image du
cinéma indépendant live chinois un autre visage que les grandes fantastiques et
fantasy plus visibles à l’international.
Have a nice day
creuse donc le même sillon près de sept ans plus tard. Cette longue attente
vient autant d’une inspiration longue à retrouver pour un Liu Jian ayant fait
le tour du monde pour promouvoir Piercing
que d’un tournage à l’économie très restreinte. Le réalisateur occupe en effet
la plupart des postes technique d’un film dont la production de longue haleine
a quasiment été menée en solitaire grâce aux divers outils informatiques à
disposition. Si les contraintes techniques se ressentent profondément à l’image
et l’animation rudimentaire (les voitures seulement vues de profil, toutes les
astuces et transition pour éviter d’avoir à animer l’image bien visibles), Liu
Jian fait de ces aspects des atouts propres à appuyer son propos. Cet aspect
figé se répercute complètement sur l’esthétique générale, le cadre du récit et
la caractérisation des personnages.
La sinistre, pluvieuse et boueuse petite ville de province
où se déroule l’intrigue est déjà à elle-seule l’illustration de l’avenir sans
issue des protagonistes. La vulgarité d’un parrain local, la dévotion et la
brutalité d’un chargé des basses œuvres, la stupidité d’une petite main de
cette chaîne criminelle, tout concours à nous signifier la médiocrité de
« héros » à la hauteur de leur environnement minable. Liu Jian évite
pourtant en tout point le pensum dépressif par la tonalité qu’il confère à
l’ensemble. L’humour noir, les éclats de violence et surtout le tempérament
haut en couleur des personnages confère une drôlerie à froid assez irrésistible
qui fait de Have a nice day un
pendant chinois et animé du meilleur des frères Coen. Tout comme ces derniers
(en particulier les films moquant les hillbilies comme Blood Simple (1984), Fargo
(1996) ou No Country For Old Men
(2009)), Liu Jian s’amuse de personnages produits de leur environnement mais
porte sur eux une tendresse et un humanisme qui leur fait dépasser la
caricature (en particulier l’homme de main).
Le McGuffin est purement matérialiste avec ce sac rempli
d’argent après lequel courent tout le monde, symbole de l’ambition aussi
médiocre et superficielle (une opération de chirurgie esthétique pour la
fiancée de l’un, Un après-midi de chien
de Sidney Lumet (1975) n’est pas loin non plus) chez les uns que les chez les
autres. La bande-son très electro-pop apporte une distance ironique bienvenue à
ce jeu de massacre, mais Liu Jian apporte toujours un contrepoint plein
d’empathie et de tendresse comme avec cette scène de rêve ou chacun aspire à
son El Dorado loin de la fange ambiante. Entre le rire moqueur et/ou résigné du
malheur, Liu Jian ne choisit pas et c’est ce qui fait tout le prix de Have a nice day.
Sorti en dvd zone 2 français chez Blaq out
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