Dans l'Australie du
XIXe siècle, les années d'apprentissage d'une jeune fille, indépendante et
ambitieuse, cherchant à échapper à la misère de la ferme paternelle. L'amour
lui apportera la chance d'une promotion sociale. Mais elle préférera construire
elle-même sa vie en devenant écrivain.
My Brilliant Career
est un des fleurons de la nouvelle vague australienne, qui de par son message
et le fait d’être dirigé par une réalisatrice (Gill Armstrong dont c’est le
premier long-métrage) constitue une bel ode féminise qui sera une influence
majeure pour la génération suivante des Jane Campion notamment. Le film adapte
le roman éponyme de Miles Franklin et
nous dépeint le destin de Sybella (Judy Davis), jeune fille de ferme qui
aspire à une existence moins déterministe que celle à laquelle la condamne son
sexe.
L’un des aspects les plus intéressant du film, c’est de ne pas justifier
la volonté d’émancipation de Sybella par son supposé talent. On a un aperçu
succinct de ses rudiments de piano, on la voit noircir des feuillets sans
connaître la nature de ses écrits. Ce qui rend Sybella digne d’être libre, c’est
sa volonté et personnalité excentrique et pleine d’énergie qui l’éloigne de son
environnement rural rustre, comme le montre la scène d’ouverture où perdue dans
ses rêves elle ne voit pas la tempête s’abattre sur la ferme.
L’incompréhension rencontrée auprès de sa mère (Julia Blake),
elle la retrouve dans le milieu plus aristocrate de sa grand-mère (Aileen
Britton). Les extravagances de Sybella n’y sont vues que comme une parenthèse
enchantée avant qu’elle ne trouve un mari et rentre dans le rang. Que ce soit
dans la fange boueuse du Bush où subsistent ses parents, les grands
espaces verdoyants et le luxe de de la demeure grand-maternelle, l’environnement (où l'inspiration impressionniste se marie bien à l'aridité partielle de ce décorum australien)
n’existe que pour figer, enfermer Sybella. C’est particulièrement vrai dans les
scènes de séduction avec le beau Frank (Sam Neil) où malgré l’attirance
mutuelle, ce possible rapprochement
constitue également une prison. Cette symbolique passe notamment par l’image
comme lors de la scène de bataille d’oreillers, où les espaces opaques du
jardin enserrent Sybella puis, en fin de séquence lorsqu’en cédant un pouce de
terrain au prétendant, celui-ci arrête l’énergie et le mouvement de Sybella, comme si elle lui cédait (et par conséquent à la société) à l'usure.
Le récit a donc par son esthétique et ses amorces de
tonalité un pied dans le romanesque sans jamais y céder totalement. Sybella a
constamment un mouvement de recul lorsqu’elle s’apprête à céder aux conventions
(ses sentiments étant un plus grand danger que les injonctions de sa famille
dont elle se défie) mais, tout comme le récit ne célèbre pas un talent somme
toute aléatoire, il ne délivre pas un blanc-seing à toutes les aspérités de la
rébellion de notre héroïne, parfois condescendante. Les protagonistes féminins (la grand-mère, la tante
Helen (Wendy Hughes), la mère de Frank (Patricia Kennedy)) sont toutes pétries
de bonnes intentions mais sont conditionnées à ce statut féminin guidé par le
patriarcat.
Cela traverse les couches sociales, les nantis comme les démunis ne
voyant le salut féminin qu’à travers les hommes et selon leurs moyens
financiers. C’est donc captivant de bout en bout, porté par une lumineuse Judy
Davis qui embellit à l’écran au fil de son émancipation (son physique supposé
ingrat et loin des canons de beauté traditionnels lui étant plusieurs fois
rappelé), jusqu’à un final aussi audacieux que logique, un splendide message de
liberté salué par une dernière image qui étend enfin son horizon.
Sorti en bluray all région chez Blue Underground et doté de sous-titres français
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